Monday, 20 July 2009
CHRONIQUE
FIDÉLITÉS
Il est des moments où on est au plus bas, c'est le contraire de la grosse tête. Disons la tête tzantzas ou tête réduite au tiers de sa dimension. Les indiens Jivaro après avoir décapité leur adversaire, soumettent sa tête à un traitement très complexe pouvant durer deux semaines, et qui emplissait d'horreur les conquérants espagnols. Le but était shamanique : emprisonner l'esprit de l'adversaire dans la tête qui devait offrir la plus grande ressemblance possible avec l'original. La tête tzantzas, disons la tête jivaro est donc l'état où on se trouve lorsqu'on se sent de trop, misérable, méprisés, pièce rapportée au sein d'une communauté qui vous exclut et à laquelle vous vous raccrochez sans dignité. J'avoue qu'Alxel Poliakoffa le don de me plonger dans cet état. Il est différent du syndrome "moineau déplumé" que je ressentais lors de mon amnésie. Je n'était pas inférieur aux autres, mais comme Saint François, proche de ce moineau sautillant que je vis tout heureux fouiller dans une poubelle d'Hédiard.
Puisque j'en suis aux variantes sémantique, plusieurs amis m'on suggéré de comparer grosse tête à snobisme ou à arrivisme. Le snob, dirais-je, est celui qui conscient d'appartenir à une caste ou un milieu elevé, ne daigne pas frayer avec le niveau au dessous. Un homme comme le grand François Dalle, était un snob, comme bien des professionnels de la mode ou des cosmétiques. L'arriviste, ferait n'importe quoi pour satisfaire son ego et sa position sociale. Il utilise le name dropping et fait sonner ses relations, vraies ou supposées, pour s'en faire d'autres. L'arriviste comme le snob, sont obséquieux devant ceux de la classe supérieure.
L'avantage de se faire la grosse tête, c'est qu'on finit par y croire (que vous êtes quelqu'un). Et à force d'y croire, les autres y croient aussi et agissent en conséquence. Ainsi s'instaure une dynamique positive fondée sur le culot, la morgue, baptisés audace et entregent.
En revanche lorsque vous avez la tête jivaro, à force de vous sentir un moins que rien, vous en persuadez également les autres, qui vous fuient ou qui vous traitent avec cette condescendance distraite et aimable, qui est plus insultante qu'une gifle.
J'étais hier dans cet état d'esprit, lorsque Oleg est venu à la rescousse, comme s'il ressentait télépathiquement mon désarroi. Il m'a donné carte blanche pour continuer mes achats d'objets Mingei, qui dès à présent peut compter comme le plus important du monde occidental.
En revanche le silence persistant d'Axel Poliakoff en dépit de nos accords, m'a plongé dans le dernier dessous.
J'ai alors adressé un SMS à Igor son père qui a aussitôt répondu, puis téléphoné affectueusement pour me dire que tout était prêt pour me recevoir dans sa résidence de la Côte d'Azur. Cela m'a mis du baume sur le coeur je l'avoue.
Je suis par ailleurs assez embarrassé, car je n'ai jamais été invité nulle part et j'ai honte d'imposer à mon hôte les nombreuses restrictions : régime sans sel, repas pris à l'intérieur etc. Mais c'est aussi une preuve que la fidélité ne s'arrête pas aux paroles aimables. J'existe. Marina a le même sentiment que moi et sa discrétion exagérée emposonne l'agrément de cette invitation sur la Côte. Elle aussi se fait une tête jivaro ! Elle a toujours peur de déranger, d'être de trop, et elle culpabilise sa santé délicate. Je sais que bien des gens de qualité sont comme elle et préfèrent décliner les invitations à résider chez des gens pour descendre à l'hôtel où ils se sentent plus libres.
Sunday, 19 July 2009
CHRONIQUE
MARCHANDS ET EXPERTS
J'en reviens au sujet qui me tient à coeur en ce moment : la constitution de la troisième fondation, cette réssurgence de la deuxième, condamnée par les experts
On connaît mon projet de base : réunir en un lieu restreint des œuvres significatives du patrimoine de l’humanité, qui parlent à tout le monde, érudits comme ouvriers, et provoquent un électrochoc durable. En tant que professeur au Conservatoire des Arts et Métiers, dont je suis un pur produit, je fais corps avec ces courageux travailleurs, qui le soir et le dimanche, sacrifient leur vie de famille pour obtenir le diplôme d’ingénieur. Je sais de quelle curiosités, de quel sérieux ils sont capables.
Mon modèle a été au fond le musée des arts et techniques, qui a été fondé pour servir de cabinet de curiosités, de collection d’objets pédagogiques de démonstration, mais à quel niveau ! Le laboratoire de Lavoisier, la machine à calculer de Pascal, l’avion de Blériot en faisaient partie. Aujourd’hui on a construit autour de ces pièces maîtresses, un écrin muséal moderne.
Le but de ma deuxième fondation était de donner à voir les témoins de l’évolution de la pensée et de connaissance, pris à leur racine, quand ils sont pour la première fois diffusés auprès d’une élite restreinte de connaisseurs. On y trouve des manuscrits exceptionnels comme les heures de Bening, mais aussi les premiers tirages des premières éditions de monuments de la science et de la littérature : l’héliocentrisme de Copernic, les dialogues de Galilée, la découverte de l’Amérique par Colomb, le premier livre d’anatomie et ses planches démonstratives par Vesale, etc.
Comment décrire l’émotion qui s’empare des hommes les plus simples pour peu qu’ils veuillent s’élever, en contemplant, voir en touchant, la première encyclopédie médiévale, une pièce de bronze où se détache en haut relief un portrait d’une expression indicible de l’empereur Hadrien, ou de Brutus, l’assassin de Jules César. De contempler ce livre d’heures de padoue, de 1370, dont tous les caractères sont sculptés en or brillant, de feuilleter la masse imposante de l’exemplaire unique sur grand papier de la Grande Encyclopédie de Diderot, ou encore le célèbre livre à couverture verte, que l’on voit dans les reconstitutions historiques de la vie de Darwin.
Certes toutes – ou presque toutes – ces merveilles se trouvent entreposées dans les grande bibliothèques d’état à Londres à NewYork ou à Paris. Mais y avoir accès est une autre paire de manche. Par ailleurs elles sont noyées armi des centaines de milliers d’ouvrages de valeur. Dans ma fondation au contraire, toutes les pièces exposées sont visibles simultanément, autorisent toutes les comparaisons, dialoguent d’objet en objet…
La densité d’une telle collection est unique au monde et elle était en voie de constitution quand le sponsor : Misha, prit la décision funeste de s’adresses à des « experts ». Tous furent aussitôt violemment critiques pour des raisons opposées ou incompatibles. L’un prétendait que détenir un livre sous forme physique était un non-sens à l’époque de la numérisation, l’autre qu’on ne pouvait rivaliser avec les grandes institutions. Le plus grotesque des jugements concernait l’édition originale du Don Quichotte de Cervantès. On en déconseillait l’achat, prétendant que le chiffre demandé (2.500.000 €) était impensable, délirant. L’ignorance s’étala au grand jour : le dernier exemplaire de ce livre fut négocié pour quatre fois cette somme voici dix ans !
Malheureusement, malgré l’ignorance et l’obscurantisme de ces étranges experts, Misha les suivit et arrêta aussitôt les achats.
Aujourd’hui, le flambeau est repris par le jeune Axel Poliakoff mais celui-ci ne se fia pas plus que Misha à mon propre jugement. Il fit traîner indéfiniment les choses au grand dam des marchands de référence qui avaient manqué des ventes pour le réserver les plus précieux ouvrages. J’appris que sans me le dire, il voulait la garantie d’un expert, partant que quelle que soit la compétence d’un marchand, il ne peut être à la fois juge et partie. Dès que je compris cela je me mis en chasse des plus incontestables sommités de chaque département. Ainsi que je le pensais, les pièces que j’avais réservées étaient à un prix au dessous du marché. En effet depuis plus d’un an, elles avaient augmenté de valeur, comme toute les pièces exceptionnelles.
Je compte passer les prochains jours sur la Cote d'Azur chez mon vieil ami Igor le père d’Axel, et partisan de la fondation. Je compte l’éclairer sur la manière dont se font les grandes fondations d’importance muséale. Elles sont toutes nées de la passion de grands collectionneurs, et de l’orgueil de marchands d’envergure mondiale, fiers de participer à la naissance d’un musée. Par exemple la célèbre collection Yves St. Laurent – Pierre Bergé, a été édifiée avec Alain Tarica pour la peinture, et de deux grands marchands de premier plan pour l’orfêvrerie et l’Art Déco. Les rares pièces achetées à droite et à gauche, comme le faux della Robbia dont j’ai fait l’acquisition (ravalée depuis) se sont révélées douteuses.
J’ai constitué des collections muséales parmi les pus importantes du monde, et j’ai souvent acheté aux enchères. Mais jamais directement mais par l’entremise d’un de mes marchands de référence. Un seul problème se posa, avec Albi Rosenthal, qui avait comme client et votre serviteur, et la Piermont Morgan Library. Il me le dit franchement : il faisait le jeu de l’institution new-yorkaise, mais avec toute cette honnêteté, il se débrouilla pour me refiler de l’intox pour me décourager de participer à la vente. La fois d’après, je ne me fis pas prendre et cela me permit de l’emporter sur la Deutsche Bank et la fondation Richard Wagner à Bayreuth.
Mon marchand de référence en matière de partitions musicales avait la réputation auprès de ses collègues d’être affreusement cher. Mais c’était le numéro un Mondial et de loin. Aucun expert ne pouvait rivaliser avec son expérience. Cet homme s’appelait Hans Schneider et son fief était Tutzing dans le lac où vécut Richard Wagner. Je finis par lui acheter tout son fonds wagnérien, accumulé pendant quinze ans. Je ne regrettai jamais de lui avoir fait confiance.
L’équivalent de Schneider, en matière de manuscrits anciens, est Heribert Tenschert à Bibemühle sur le Rhin. Mais d’une part, Tenschert occupe une position mondiale plus importante car les manuscrits à peinture sont plus prisés que les partitions musicales. D’autre part, alors que je n’éprouvais aucune sympathie pour Schneider, j’éprouve une réelle amitié pour Tenschert et une estime et une considération que je manifeste à peu de gens autour de moi. C’est un homme généreux, d’un désintéressement total quand il croit à un grand projet, et d’une universalité culturelle rare. On peut en dire autant pour d’autres grands marchands comme Alain Tarica qui a hérité de son père Samy, ou Clavreuil, de la troisième génération de libraires de très haut niveau.
Je suis donc absolument affirmatif : une collection d’envergure muséale ne se fait pas sans un marchand digne de confiance, et qui se passionne pour un projet commun.
Actuellement grâce à Oleg qui a compris à fond le concept, et Philippe Boudin qui après une période où il nous considérait comme de simples collectionneurs, adoptait une attitude de commerçant, et qui est devient un grand marchand, nous avons surclassé ce que Montgomery a accumulé en trente ans d’activité. Nous pouvons tous déclarer sans mentir, qu’en six mois nous avons constitué le seul musée d’envergure en art Japonais poulaire (Mingei) du monde occidental, et nous en sommes, Oleg, Boudin et moi, légitimement fiers. Mais Oleg m’a fait confiance. Il a agi en humaniste et en homme d’envergure, de la trempe culturelle des Getty ou des Thyssen.
lire les expertises dans le corps du billet.
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Saturday, 18 July 2009
CHRONIQUE
DES TROPIQUES
Ce court billet relate l'instabilité du climat qui affecte la région. La station se trouve coincée entre la mer et les montagnes, redoutable topographie génératrice de brouillard, ce que l'on nomme ici "la foschia". C'est pire à Montecarlo, mais ce n'est guère brillant.
"Le monde n'est plus ce qu'il était, il n'y a plus de saisons, il faisait beau sur la côte d'Azur et la Riviera Italienne, et il neigeait dans les Alpes." Ce genre de propos peut être rangé dans ce que Hayakawa nomme la communication phatique. Elle n'a pas de valeur, elle ne nous apprend rien, mais elle sert à établir des points sur lesquels tous sont d'accord et qui créent le sentiment d'appartenance, comme "comment allez-vous? Au plaisir de vous revoir, C'est terrible la grippe porcine, un fléau, et ça n'épargnera personne. Tous les masques sont dévalisés...
Il ne faut surtout pas prendre à la lettre ces simples tests d'amorçage d'une communication. Autrement voici sur quoi cela déboucherait :
1. La côte, on y allait en hiver, la meilleure saisons et cela est toujours ainsi.
2. Je ne vais pas bien. Je dois aller chez le dentiste,et puis, j'ai la rate qui se dilate et le foie qui se contracte, ah! Ceque c'est bon d'être bien portanr, ce qu c'est moche d'être malade !virus grippal
3. Je n'aurais aucun plaiisir à revoir votre sale gueule. Bon débarras, enfin parti !
4. La grippe porcine dont il est temps de dire qu'elle n'est qu'une grippe comme les autres, on la soigne comme une vulgaire grippe (qui n'est jamais vulgaire pour les personns affaiblies).
Friday, 17 July 2009
CHRONIQUE
INFORMATION DEGRÉ ZÉRO
Ma sœur informée de la chute du taux de fréquentation du blog, m’affirme que je ne tie pas compte suffisamment de l’actualité politique et que je devrais livrer mes commentaires et mon décodage aux internautes.
A propos de couverture médiatique, il n’est de jours où on ne parle pas de Elkann, de ses démêlés avec sa mère, Margherita de Pahlen, des exploits de son frère Lapo sacré à New York grand couturier qui vient de se marier, de la soirée à St. Trop ; où il invite les Bucellati, les Bulgari et autres huiles.
J’ai eu le plaisir de recevoir John Elkann à dîner. On a fait le compte : il y a plus de cinq ans que je le connais et nous avons eu un échange approfondi depuis le début. Il venait de vendre la Rinascente à Auchan et Arnaud Mulliez n’avait cessé de chanter mes louanges : « il faut absolument rencontrer B.L. . etc. » Il finit par venir me voir et en ces temps-là il se trouvait dans une situation de grand inconfort. Il était l’héritier désigné du cavalière, Giovanni Agnelli, et il reçut de sa grand-mère, Marella, le complément qui devait lui assurer le contrôle absolu de l’entreprise familiale, dont Fiat n’est qu’un des fleurons à côté de Maserati, Lancia, Ferrari, La Juventus, véritables icones de l’imaginaire italien. Il se demandait alors avec beaucoup de modestie, s’il était à la hauteur, s(il était bâti pour développer un héritage aussi pesant symboliquement que dangereux financièrement. Je mis beaucoup de temps à le convaincre qu’il était taillé pour affronter les complexités et les paradoxes les plus redoutables d’un début de millénaire particulièrement complexe et paradoxal. La discrétion m’empêche d’aller plus loin dans mon appréciation et l’évocation de nos échanges profondément enrichissants. Qu’il me suffise de dire, que la complexité et la richesse de son organisation mentale, le rendait apte à examiner froidement et à s’orienter avec prudence dans un environnement semé d’embuches. Le plus beau compliment qu’il me fit, est qu’après que Gabetti son mentor vénéré fut mort, il me dit qu’en quelque sorte je prenais sa suite.
Néanmoins ce qui compte plus que tout pour lui est sa famille étroitement unie : son frère Lapo, turbulent et impliqué dans une sinistre affaire, mais qui assagi est devenu un des plus féconds stylistes mondiaux, sa sœur et sa grand-mère. Son père Elkann est une personnalité respectée du monde littéraire et d’un haut statut intellectuel. Mais ce qui caractérise l’aspect extérieur de John est son extrême élégance, la distinction aristocratique un peu froide et distante en dépit d’une extrême courtoisie, et une grande gentillesse. Très souvent il m’interrogeait sur ce qui le tenait à cœur et nous tombâmes toujours d’accord. A l’hôtel on parle encore de sa visite, tant la famille, la première d’Italie est honorée.
La veille, Tatiana a fait un saut de Moscou pour me voir. Elle manqua de peu John, car après s’être baignée dans la mer fraîche et déserte, elle dut partir pour Moscou.
Le rôle de John dans ma relation avec Oleg fut déterminant. Bien avant de lui parler de covenants je me posais des questions sur Oleg Deripaska, ne voulant pas m'attacher à un de ces miliardaires russes pour qui vous êtes un jouet dont on se lasse bientôt. Tous mes doutes furent dissipés par le jugement très positif posé par John qui le connaissait depuis dix ans et le tenait pour un homme de parole, d’une totale fiabilité. Son appréciation me poussa à m’engager totalement pour celui que je considère comme mon fils aîné. Mais revenons-en à la revue de presse.
En guise de prolégomène voici un exemple de la valeur de l'information dispensée au lecteur. La BBC interviewa avant son départ pour la Sibérie Oleg. Ce dernier voulait parler de son travail, de son plan de financement, des mesures de sauvegarde prises pour éviter de mettre au chômage les forces vives de son entreprise. Mais tout cela n'interéssait nullement les journalistes qui le criblèrent de questions relatives à sa vie sexuelle supposée obsessionnelle, comme celle qui est attribuée à tous les oligarques russes. Oleg se referma comme une huitre et cela aggrava le climat tendu entre l'anglais et le russe.
Voir la revue de presse dans le corps du billet.
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Wednesday, 15 July 2009
CHRONIQUE
CONFLIT D'INTÉRÊTS
On entend souvent ce terme dans les pages économiques ou politiques, quand il s'agit d'épingler un encombrant personnage.
Que recouvre cette expression passe-partout ? On nous dira qu’elle désigne un personnage dont, parmi les mobiles qui déterminent son comportement, deux au moins sont incompatibles. Par exemple on ne peut être juge et partie, ni se battre pour une cause et pour la cause opposée, ni encore être un avocat et faire le jeu d’un adversaire qui vous paye en sous-main, obéir au serment d’Hippocrate et négliger un malade parce qu’il ne peut payer. Le mot intérêt on le voit a un sens non exclusivement mercantile.
Dans le cas d’un petit juge qui s’acharne sur une proie pour satisfaire son ego et atteindre la célébrité alors que tout la désigne pour innocente, l’intérêt moral d’instruire à charge et à décharge, entre en conflit avec son intérêt médiatique ou, tout simplement son ego.
Il arrive parfois qu'en toute innocence on se trouve pris dans un dilemme : choisir entre deux amis, entre deux cultes, entre deux critères de valeur. Le mot intérêt est apparemment bien éloigné de son sens mercantile.
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Tuesday, 14 July 2009
CHRONIQUE
JOUR DE SANG
Lorsque je demeurais au dernier étage du Rond Point des Champs-Elysées, toutes mes relations ambitionnaient de voir le défilé du 14 juillet de mon balcon... Le dernier était particulièrement fastueux et je prévoyais ce jour-là une audition du Requiem de Mozart dirigé par Joseph Krips, aux Capucins. Sefit alors un partage des eaux. Les gens que j'estimais et qui étaient de mon bord, se retrouvèrent aux Capucins pour commémorer ce jour de deuil national, où les prémisses sanglantes de ce qu'il annonçait était, avec la Saint Barthélémy et les massacres nazis justiciable de la formule d'André Malraux : "Ce jour-là l'homme donna des leçons à l'enfer". Les autres me remercièrent chaleureusement pour leur avoir permis d'assister à la liesse populaire. Ils appartenaient à un système de valeur que je comprenais fort bien mais que je ne partageais point.
En 1989, toute une école d'historiens professionnels et courageux, François Furet entre autres, s'attaquèrent au mythe tout puissant, pour essayer, derrière les concrétions accumulées d'ignorance et de mauvaise foi, de découvrir ce qui restait de réalité, puis de comprendre à partir de ces vestiges, ce qui avait pu engendrer une des grandes abérrations de l'histoire. Je veux bien que celle-ci soit forgée par les vaiqueurs, mais imagine-t-on aujourd'hui que la population allemande toute entière, commémore, ou laisse commémorer, l'avènement de Hitler ou la Nuit des grands couteaux?
Pour faire court, ce que l'on découvrit, et qui fut d'ailleurs largement diffusé et compris par érudits et classe dominante, ce fut que la réalité avait été outrageusement déformée, que ce soit par les révolutionnaires, ou par les romantiques, par Taine ou par Michelet. Et la falsification répétée à des millions d'élèves, au cours des générations, renforcée par le jour honteux promu comme un au fait, finit par devenir vérité, selon une des lois fondamentales de la désinformation.
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PETITE CHRONIQUE
J’ai eu le plaisir et la surprise de recevoir ce 14 juillet, la visite de Tatiana, qui venue de Moscou, reprend l’avion pour Moscou le 15 à 15heures. Celle que je considère un peu comme ma fille adoptive fut très contente de rencontrer les Russes dont Marina a fait la connaissance. Elle c’est une Tatiana, la grâce faite femme, rayonnante de joie et de douceur, et parlant l’italien ce qui assure un lien, car son mari, un brave homme à la voix superbe, ne parle que le russe. Tatiana (la mienne) était toute heureuse de rencontrer un compatriote et ils ont commencé à se parler avec beaucoup d’animation. Se vérifie l’adage : un Russe + un Russe = la Russie.
Je me suis fait photographier entre mes deux Tatiana. Quel joli nom ! Je me dis que si au cours de mon existence j’avais connu une de ces créatures de rêve, mon rêve eût pleinement été réalisé : tomber amoureux ! Mais Marina me ramena sur terre : elle n’aurait pas voulu de toi. Les femmes veulent un homme protecteur, qui s’intéresse à elles, qui aime se divertir … Le contraire de ce que tu es : égocentrique, enfermé dans ton univers, orienté vers ton travail, un intellectuel, quoi !
Elle a certainement raison. Mais cela fait mal. Et puis elle oublie un fait déterminant. Lorsque j’étais jeune, Staline et ses successeurs étaient au pouvoir. Les femmes russes étaient de grosses bonnes femmes aux souliers plats, habillées d’une espèce d’uniforme que récuserait une SDF, sans grâce ni intérêt. La libéralisation a transformé la race et une nouvelle génération de créatures merveilleuse en est sortie, comme le papillon sort de la larve écœurante.
Là où est Tatiana, Oleg n’est jamais loin. J’espère l’avoir au téléphone pour lui demander de faire un nouvel effort pour les merveilleux mingei que Boudin a vu au Japon.
Bruno Lussato 14 juillet à minuit, 15 juillet à 8h30
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