Wednesday, 15 October 2008
CHRONIQUE
Une journée bien remplie
Après l'effort de formalisation du billet précédent qui m'a épuisé par sa concision et par son sujet propre à nous plonger dans la dépression, j'ai envie de partager avec vous des moments de pure joie.
Ci-dessus à l'entracte du concert Prokofiev salle Pleyel : Valery Gergiev, Henri Dutilleux, Bruno Lussato.
Je devais diner avec un de mes anciens élèves, qui est devenu quelqu'un dans l'ex-yougoslavie, et doté d'un sens de l'humain et d'une élévation spirituelle hors du commun, quand j'ai reçu un coup de téléphone pressant de la part du plus grand de nos chefs d'orchestre, Valery Gergiev, directeur du célèbre London Symphony Orchestra, et ardent propagateur du Marinsky, l'illustre opéra de Saint Petersbourg. Il donnait salle Pleyel deux concerts Prokofiev. J'avais décliné pour cause de santé le premier, mais il tenait absolument à m'avoir au second car le grand compositeur Henri Dutilleux avat tenu à lui rendre visite. Le tandem Gergiev - Dutilleux se révéla un succès étonnant, et le maestro russe exécuta de nombreuses oeuvres du compositeur. français. Or il se trouve que j'ai eu l'honneur d'emmener le compositeur à l'hôtel de Gergiev, rue St. Louis en l'île. Je croyais à l'entente des deux grands hommes. Mon intuition se révéla exacte et c'est aussi pour la commemorer que je fus invité au concert Salle Pleyel.
La composition du programme mérite quelques commentaires. On donna dans l'ordre la deuxième symphonie, le concerto de violon, et après l'entre-acte, la Septième Symphonie.
La Deuxième Symphonie op.40, 1925 en ré mineur op.19 aux puissantes dissonances fut composée au moment où Nolde revenait des Iles Salomon. Même sens de la couleur, même rugosité,
Gergiev l'exécuta avec un sens du rythme, et une puissance meurtrière terrifiants. J'eus beaucoup de mal à d'y déceler quelques lambeaux de mélodies qui m'eussent donné l'envie de la réentendre. Je jetai un regard en coin inquiet à mon ami qui n'avait jamais assisté à un concert et que j'avais emmené avec moi à tout hasard. Je craignais qu'il ne soit agacé par ce pandémonium. Loin de làIl était sidéré, transporté, comme galvanisé par tout : la puissance, le rythme implacable de la gestuelle de Gergiev, le son de l'orchestre. Il venait de découvrir la musique classique in vivo, non congelée dans le numérique ni réduite en bouillie par le téléchargement. L'ambiance solennelle de la salle, le maintien recueilli de l'assistance, l'interdiction d'émettre le moindre son, la moindre toux, l'habit de cérémonie des musiciens interprétés comme un signe de respect envers l'oeuvre et le public, il n'avait pas imaginé que tout cela puisse exister.
La structure de la symphonie est d'une rigueur et d'une puissance presque Beethoveniennes: même plan en deux parties la dernière étant un thème et variations rappelant l'Op. 109.
Concerto pour violon N°1 en ré majeur op.19, 1919, première à Paris en 1923.
La facture romantique et trop simple fut sévèrement jugée par les personnalités présentes : Picasso, Pavlova, Arthur Rubinstein etc...Cette oeuvre met en lumière le sens mélodique et le penchant au classicisme de Prokofiev. Il aimait les pièces claires, sans trop d'innovation et destinées à durer. On se doute que le grand public d'aujourd'hui, peu accoutumé à affronter les innovations de Schönberg à John Cage, était ravi qu'on se mettre à son niveau. Il en alla ainsi hier dans la salle.
Symphonie N°7 en do dièse mineur op. 131, 1951 - 1952
C'est la dernière oeuvre d'un homme affaibli physiquement et moralement.Comme tous ceux qui ont eu la malchance de vivre sous l'oppression jadnovienne, il doit comme Chostakovitch se plier à l'esthétique socialiste et publier une humiliante autocritique. Le goût de Jnadov pourrait certainement convenir à ceux qui trouvent la musique classique est trop intellectuelle et réservée à une élite de snobs.Ces gens-là n'ont évidemment jamais essayé de travailler sérieusement une grande oeuvre. L'Art est divertissement populaire et non masturbation intellectuelle!
Prokofiev est classé artiste dégénéré (comme l'avant-garde sous Staline et Hitler) et subit harcelements et sévices. Le 20 février 1948 Lisa son ex-femme est condamnée à vingt ans de déportation pour espionnage !
Le compositeur essaie de rentrer dans les bonnes graces du pouvoir communiste et compose une symphonie correspondant aux critères communistes. Ils correspondent il faut le reconnaître au goût de la plupart des ignorants recherchant le joli et l'agréable. Plus de contrepoint, plus de dissonances (au propre comme au figuré) . Mais on obligea Prokofiev à recommencer le dernier mouvement pour luii imprimer un caractère plus brillant que la fin inhabituelle jugée trop discrète. C'est cette fin imposée que Valery Gergiev a donné en bis. Notons que des rangées de fauteuils vides étonnaient dans une salle jusque là archicomble. C'est le public éduqué et peu curieux qui boudait la musique trop facile.
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Sunday, 12 October 2008
CHRONIQUE
Le point sur la crise
La thèse systémique:
la triade monnaie-actions-liquidité
J'ai déjà exposé dans des billets passés les deux scénarios : récession dramatique, catastrophe planétaire.
Au fur et à mesure que se rapproche l'issue fatale prévue, le temps se rétrécit, l'espace se ferme, le mur des certitudes s'écroule par pans entiers.Mes clients s'écrient :" bon, vous aviez raison je vous l'accorde, et vous n'avez pas pris le temps de me convaincre.A présent on vous écoute : comment sortir de la fondrière.?
Je crois qu'à ce stade il vaut mieux brûler les étapes et clarifier la problématique de la crise dont l'idée de deuxième fondation permet de concrétiser certaines mesures immédiates au niveau des états et des particuliers, deux extrémités du cordon fatal, celui qui relie le signifiant au signifié, le mot à la chose, la convention au réel.
Il me faut brievement rappeler les notions et concepts déjà détaillés et sans lesquels on ne saurait ni décrire ni affronter la situation exceptionnelle qui est la notre.
LE DEFERLEMENT
Sous ce chapeau on range les notions qui précisément définissent l'exceptionnel.
Pierre Lecomte du Noüy avait émis une idée frappante
Chaque infini engendre ses propriétés particulières. Ces dernières, en totale discordance avec notrre expérience quotidienne, émergent d'un coup lorsqu'on franchit le seuil mystérieux qui nous fait passer de notre échelle humaine à un infini.
L'infiniment petit engendre la physique quantique. Le poisson devient soluble, la non-séparabilité cause l'ubicuité : un objet est simultanément ici et à l'autre bout de la galaxie, un chat est à la fois vivant et mort... aujourd'hui ce seuil est proche, car la miniaturisation extrême des composants électroniques provoque des réactions quantiques. Les ordinateurs seront affectés de troubles étranges, de comportements imprévisibles.
L'infiniment grand engendre la relativité. Lorsqu'un an s'écoule pour un voyageur, une minute s'écoule pour un autre. Avec la vitesse dans les grands espaces, l'espace devient temps, le temps se transforme en espace ("zum Raum wird hier die Zeit," ici le temps devient espace Parsifal I, Richard Wagner). Les appareils GPS doivent corriger les effets relativistes.
L'infiniment complexe engendre la pensée. Effectivement, la conscience réflexive semble émerger de l'accroissement de la pensée du cerveau. Rappelons que la complexité est le produit de l'universum A, nombre d'éléments constituant un système et de la caractéristique R, nombre de relations intégrant ces éléments. (Klìr et Valach). Non seulement on voit la conscience passer d'un stade primaire (le bébé) à un stade évolué (le philosophe) avec l'accroissement du poids du cerveau, mais on constate même dans les robots un semblant d'autonomie quasi psychique (Culbertson : The Mind of Robots). Le perceptron de Rosenblatt, est un robot très complexe, dont les composants électro-chimique, communiquent de façon aléatoire, fait preuve d'autonomie par rapport à l'expérimentater, et engendre la notion de gauche et de droite, sans qu'on la lui programme. Toute une école dominante de pensée a sauté sur l'occasion, afin d'alimenter son anticléricalisme. Ainsi, l'âme n'existe pas, et Dieu est un produit de nos hormones ! Joël de Rosnay dans L'homme symbiotique se fait le propagateur grand public de cette vision réductionniste de l'homme, partagée par J.P. Changeux (L'homme neuronal), Robert Wright (L'animal moral), Nicholas Negroponte (L'homme numérique).
Ces notions, de prime abord sont innocentes,mais serinées à longueur de journée elle préparent l'acceptation d'un climat propice à l'irruption dela crise que nous commençons à entrevoir. Les étudiants, puis les élites et les populations cultivées, adhèrent au principe que l'homme n'a pas de valeur intrinsèque, insubstituable puisqu'on peut précisément le remplacer, l'interchanger, avec un équivalent électronique. Ils pensent d'ailleurs que la compétitivité passe par l'automatisation du tertiaire, l'homme se voyant affecter des tâches nobles.Mais lesquelles si la programmation et la créativité peuvent être simulées elles aussi par des automatismes?
Il y a pire : Gaïa. James Lovelock considéré comme un immense visionnaire (il a inspiré le dernier volume de Fondations d'Isaac Asimov, le chef d'oeuvre de la science-fiction) a imaginé la terre comme un être vivant dont les humains ne sont que des composants à la manière des neurones, composants du corps humain. Joël de Rosnay a appelé Cybionte ce monstre planétaire contrôlant aussi bien animaux, végétaux, climats et humbles individus. Il avoue que l'homme doit renoncer à une partie de son autonomie, de sa volonté, pour la déléguer à un être infiniment sage, le grand tout collectif.
Voici donc les individus cultivés persuadés que la macroéconomie, les grands observatoires, les modèles globaux (car c'est de globalisation qu'il s'agit) doivent dominer leur pensée. Ils sont conditionnés à accepter ceux qui commandent et représentent le cybionte : grands argentiers, technocrates rompus aux réunions internationales, et au dessus,les maîtres du cybionte, qui comme Paulsen ont sacrifié Lehmann Brothers, une honorable organisation vieille de cent cinquante ans. Si l'on pense à la haine que Paulsen porte au président de la plus prestigieuse banque d'affaires et la catastrophe qui s'en est immédiatement ensuivie pour la planète, on est perplexe. Néanmoins il y a des limites aux contradictions que chacun d'entre-nous peut absorber entre les propos du sommet, et leur expérience quotidienne, d'où une méfiance croissante du public pour les discours officiels.
En matière de conclusion, nous sommes dangereusement proches du seuil où de produit le basculement entre expérience actuelle et un monde que nous n'entrevoyons même pas mais qui nous prendra à rebours. Un monde incompréhensible,incroyable,impossible. Tout ce qu'on peut dire est que si la globalisation persiste, elle deviendra un être autonome qui nous écrasera, et que si elle éclate, les fragments résultants, économies locales, chaos, retour aux féodalités, auront un effet dévastateur.
LES MOTS ET LES CHOSES. L'approche sémantique.
Le verbe STAND FOR, (tient lieu de) est la clé de toute la sémantique générale. Il désigne les relations entre deux termes, un terme qui est la réalité, un autre qui en tient lieu. On nomme respectivement la chose signifiée le SIGNIFIÉ SÉ et l'objet qui la représente : image,mot,schéma, parole représente, leSIGNIFIANT ST.
Comment désigner un signifié, si on ne peut utiliser un mot, une expression, une photo? Korzybsky dans Science and Sanity réponpar le "différenciateur sémantique". Il consiste à disposer l'objet à signifier,de telle sorte qu'il me soit possible de le montrer par le bout de mon doigt,en m'interdisant d'émettre le moindre son.
Cela revient à distinguer le mot et la chose comme étant irreductibles l'un à l'autre Quand je vais chez le dentiste et que je subis le supplice de la fraise, ce que je recueille est essentiellement différent que la description qu'on m'en a fait.
Notre vie quotidienne, notre vécu, est essentiellement du domaine de la chose, donc de l'humble destin individuel, alors que les systèmes collectifs globalisants sont voués aux projets régaliens (pour adopter la formulation de Simon Nora et d'Alain Minc, qui désavouèrent dans " Informatique et Libertés" le local au profit du projet technocratique, ce qui entraîna la disparition de l'informatique française.
Une recommandation primordiale des sémanticiens, est de ne pas confondre signifiant et signifié. De les distinguer soigneusement, ils ne sont ni convertibles, ni interchangeables. La pratique inverse relève de la pensée magique. Le signifiant se charge par contamination inconsciente des attributs du signifié. Le mot "merde" est sale,la prière en soi permet de compenser nos crimes et les sacrifices humains ou animaux sont aussi efficaces que les actes religieux.
La pensée magique attribue précisément au signifiant,des attributs du signifié. Quel que soit la garantie attachée au dollar, le billet possède les mêmes propriétés. La seule valeur qui maintient cette valeur est une contrepartie immaterielle :la confiance. Lorsque la guerre du Viet-nam contraignit les Etats Unis à une faillite virtuelle, on suspendit l'étalon or - insuffisant - et on le remplaça par la confiance. Il suffit dès lors d'actionner la planche à billets. On fit comme si tout rectangle de papier imprimé avait une valeur en soi, indépendante de toute contrepartie physique matérielle.
Ci dessus : 25 roubles 1808. Faux billet de l'époque, fabriqué par les Français et destinés à ruiner l'économie russe.
Vente Colombo, 22, La Canebière, Marseille - France. 12 octobre # 727
EST.400/600€
Une excellente illustration du décrochement entre signifiant (le billet) et sa contrepartie signifiée (la valeur espérée).La distortion entre le signe et la chose a été exploitée par les Français. Elle ne se serait jamais produite dans une monnaie grecque où le signe avait la même valeur concrète que ce qu'elle représentait.
POUR CAUSE DE PANNE D'ORDINATEUR, (Le corps du texte ne veut pas s'imprimer) , le billet est repris dans le journal du 14 octobre. Au secours Emmanuel !
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Saturday, 11 October 2008
CHRONIQUE
Bibliographie et documentation
Grâce à Emmanuel, à Michel et à mon fils (il n'a pas fallu moins que leur concours à tous trois !) je maîtrise pour l'instant le transfert d'images, qu'elles . proviennent du scanner ou du Cool Pix (l'appareil photo) . Je vous engage ainsi à revoir le billet du 12 OCTOBRE qui traite de la numismatique, d'autant plus que j'ai profité de la mise en image pour revoir de fond en comble le texte.
Indiscrétions sur le blog
Au chapitre des recommandations qui m'ont été prodiguées, on m'a vivement conseillé d'éviter des allusions transparentes qui permettraient à chaque blogueur malin - où aux esprits malveillants, de reconnaître compagnies et individus. Bien souvent ils se trompent car je modifie les portraits pour leur imprimer un caractère de nature générale. Au lieu d'énoncer une théorie et de chercher des preuves (déduction), je préfère donner des cas, souvent inspirés par mon devenir quotidien, pour, après, en tirer la substantifique moëlle. Néanmoins il me convient d'être plus prudent, et de m'abstenir de toute allusion sur la Russie, sur le Pouvoir qui nous dirige (ou celui qui ne nous dirige pas!) .J'ai remarqué en revanche, que ceux qui se plaignent, ne sont jamais ceux que je cite à mots couverts, mais de bonnes âmes qui rôdent autour de tout ce qui a un renom, comme la mouche du coche. Ils s'offusquent le plus souvent de propos que je livre au blog et qui se trouvent à la télévision et dans les grands quotidiens!
Une bibliographie très personnelle
Ne vous attendez pas à un travail exhaustif, ni même significatif du genre "les livres à acheter". Non.
Il s'agit simplement d'un constat: que suis-je en train de lire, d'écouter, qu'est-ce qui m'a marqué, et qu'est-ce que j'emporterais avec moi dans une malle si j'embarquais comme Prospero (La Tempête, Shakespeare) vers un île déserte pour une longue retraite. Cette liste n'a de valeur que si elle écrite spontanément, au fil de ma mémoire, sans la moindre réflexion.
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CHRONIQUE
Une visite au palais Brongniart
Il s'y tient le 53e salon numismatique, une occasion pour bavarder avec les exposants sur les tendances et les relations entre les ventes et ce début de crise... en faisant la part des choses, évidemment. En l'occurence un optimisme de commande. Mon fils m'amène ma petite fille de trois mois que je ne connais pas encore et que ces préoccupations ne torturent pas encore.
J'ai acheté pour ma petite fille qui vient de fêter son anniversaire, et que j'ai rencontré pour la première fois, un objet-symbole qui lui reste toute la vie : une chouette d'Athena. Je l'ai trouvée chez -Paul-Francis Jacquier, Kehl am Rhein, Honsellstr.8 - D 77694
Tetradrachme var. Tardive (ca 415-407) var.7, Svoronos, 17,11 gr.
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Friday, 10 October 2008
CHRONIQUE
Décadence du système monétaire
Dans le précédent billet j'ai présenté la constitution de la monnaie, son enrichissement progressif par des valeurs culturelles, politiques, artisanales. L'apogée fut proche de sa naissance : Grèce et la Sicile.
Le schéma ci-dessous montre le lent dépérissement, l'aplatissement des valeurs véhiculées, parallèle à un dessèchement culturel et spirituel porté par la mondialistation et aboutissant au regne de la mondialisation et de la technologie triomphante.
Ci-dessus, extrait d'un feuillet,publicitaire, pour un salon de numismatique, montrant les étapes successives du déclin monétaire.
Le passage qui suit ne prétend pas esquisser une histoire de la monnaie. Il s'agit de mettre en évidence une évolution lente et inéluctable vers la banalisation et l'abstraction qui semble aller de pair avec le rétrécissement de l'espace sémantique des populations et des élites, dont le how ((comment faire) remplace le why (pourquoi faire?).
Les décadrachmes d'Euainetos et de Kimon, marquent le point exceptionnel où la fonction esthétique dépasse toutes les autres. Cette étape ne sera plus ni dépasséeni même égalée d'où la célébrité de ces documents de l'histoire de l'art.
La seconde phase cède à un style où la fonction esthétique est représentée par l'art du portrait, celui des empereurs. La finesse et la psychologie remplacent le mythe, témoin ce tétradrachme de Carrahe 215-217. 850-1000 €. Vente Burgan 20 juil 2007. En même temps l'emploi du bronze se généralise car il permet une subdivision plus fine des valeurs. Une pièce de bronze assez large remplace une microscopique pièce d'argent ou d'electrum. Certes, bien que la patine puisse être superbe, il s'ensuit une distanciation supplémentaire entre la valeur métal intrinsèque et celle de la monnaie de bronze qui repose davantage sur une convention.
Comparez avec un exemplaire de la vente Vinchon du 7 octobre 2008
Parallèlement la fonction symbolique très stylisée et quelque peu sommaire marque les monnaies "barbares" . Elles rappelent les manuscrits et les icones du temps du livre de Kells ou de Lindisfarne, mais la stylisation est plus poussée et les déformations des figures confine à l'abstraction.
La troisième phase, bien que décorée est beaucoup plus conventionnelle. Les figures sont beaucoup moins individualisées. Il subsiste néanmoins une trace de la main de l'artisan et une préoccupation esthétique bien qu'accessoire.
Elles disparaissent avec la mécanisation qui transforme la monnaie en un objet industrialisé, dont le principal intérêt consiste dans le poids d'argent (silver dollar) ou d'or (napoléon). toute fonction artistique, culturelle ou religieuses ont disparu.
Cette valeur elle-même disparait avec la nécessité pour les Etats-Unis de faire face aux déficit énormes causés par la guerre du Viet-Nam. Le panurgisme des acheteurs, les habituent à l'idée, que la garantie militaire et la puissance de l'Amérique tient avantageusement lieu de présence physique réelle. La confiance remplace la certitude. Mais lorsque cette confiance vient à s'ébranler, plus aucun frein métallique ne vient garantir la valeur physique, réelle, de la monnaie qui n'est plus représentée que par un signe. L'aboutissement du processus de dématérialisation, est évidemment la monnaie électronique.
Que se passera-t-il si le processus continue à évoluer dans ce sens?
Deux thèses contradictoires s'affrontent.
1.On distingue la valeur de la monnaie, garantie par l'Etat ou toute autre instance "sûre" (la poste, les actions privées comme celles d'Auchan, le papier monnaie). La convertibilité-divisibilité sont assurées, de la valeur des actions, des obligations, etc. qui repose sur des activités naguère solides et inaltérables, aujourd'hui en faillite ou ne valant plus qu'un centième de leur valeur passée. Si l'on admet la permanence du système monétaire, on aurait intérêt d'attendre avant d'investir, et à thésauriser les billets de banque. Avec 100 000 € on pourra acheter des actions d'entreprises importantes, de véritables leaders, à une fraction du prix jadis normal. La fortune ira à ceux qui savent attendre.
2. Cette thèse repose sur la croyance, qu'en dépit de leur insolvabilité, les états pourront entretenir la confiance en des signes artificiels qui ne dépendent que de mesures hasardeuses. Dans le cas où la panique s'installerait, le fil tenu qui relie la monnaie (sgnifiant) à la réalité non arbitraire ( Signifié) se romprait, accroissant encore l'affollement des populations et débouchant sur la violence et la montée des extrémismes. A ce moment on en serait réduits à en revenir au troc, c'est à dire aux échanges entre biens à valeur concrète. Cela peut être de la nourriture (provisions, fermes, prosumérisme, bricolage) et du chauffage (abris oeu dispendieux ou bien placés, à proximité d'une école par exemple), pour ceux qui possèdent des biens important, on se rabattrait sur l'autres valeurs, notamment scientifiques (financement de la recherche), esthétique (achat d'oeuvres d'art de très haute qualité et surtout incontournables par leur rareté et leur importance, comme les pièces grecques décrites dans le billet précédent). En revanche les pièces de moyenne importance ou abondantes, comme les meubles Louis XV, s'écrouleraient.
Le deuxième scénario, nous l'avons appelé "catastrophe" parce qu'il se développerait sans aucun contrôle. Un seuil serait atteint puis dépassé, celui du déferlement, où les lois "normales" sont renversées. Vouloir raisonner en financier dans un tel contexte, c'est comme traiter les phénomènes quantiques avec les mêmes notions familières qui donnent sens à notree existence.
On peut même ajjouter, que cette phase catastrophique est déjà présente mais qu'elle ne se manifeste pas par un phénomène de sursaturation provisoire. Une goutte d'eau de plus (quand, laquelle?) et brutalement le liquide déborde, déclenchant l'irréparable.
Voici mes chers internautes, la manière dont j'utilise la numismatique comme modèle de ce qui risque de se produire. J'espère que mes prévisions, ou plus exactement le raisonnement qui leur donnent crédibilité, sont fausse. Jusqu'ici, cela n'a guère été le cas, mais lisons le hai-ku de Basho à l'envers
Le nuage
qui ne bougeait jamais,
n'est plus
Bruno Lussato. 6h.30 du matin, 11 octobre 2008
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CHRONIQUE
Grandeur et décadence de la monnaie
DU TROC AU TROC
Au départ était le troc,c'est-à-dire l'échange entre biens de valeur intrinsèque, opération sur les signifiés.
"Je te donne en dot quatre chameaux, dix tapis précieux, douze esclaves si toi, ô savant, tu te maries avec ma fille. "
Les valeurs échangées sont des objets U (utiles) contre un objet D (développement).
Il nous faut bien convenir qu'un tel échange est bien incommode sous deux aspects : il est difficile de transporter frequemment des chameaux ou des esclaves et de mesurer le degré de compétence d'un savant, il n'est pas plus aisé de calculer objectivement et précisément combien de chameaux valent-ils un tapis ou un esclave.
La solution consiste à utiliser un objet x facile à déplacer et à échanger que l'on troquera deux fois, une fois contre le chameau, une seconde contre le tapis, et dont le troc se fasse dans les deux sens. Chameau contre x, x contre tapis, un consensus s'étant obtenu durablement dans un espace aussi large que possible.
Le meilleur candidat à la fonction x est incontestablement le métal précieux : or, électrum (alliage d'or et d'argent), argent. Le petit lingot est facile à véhiculer des valeurs importantes sous un petit volume,
Ci dessus un exemple de la finesse atteinte par les artisans grecs.
Malheureusement, bien souvent le volume est si petit, qu'on peut aisément égarer la pièce, voire l'avaler. Jenkins montre un échantillon de monnaies avec des tailles comprenant le drachme,la triobole, la trihemiobole,l'obole, l'hemiobole,le tritartemorion, le trihemitartemorion, noms barbares qui montrent le besoin de fragmenter les valeurs. En dépit de cette exiguïté, la plus minuscule de ces pièces est encore trop chère pour permettre de faire son marché !
Ci-dessus,une sélection du British Museum des différentes subdivisions du drachme. Athènes 480 à 420 BC.
Graduellement, les monnaies tirèrent leur valeur de la qualité esthétique de la pièce et du prestige politique qu'elle apportait à la ville dont elle était isuue. Ceci, à telle ancienne, que lorsqu'une ville était vaincue, on conservait le poids de métal, élément constant de valeur, mais on refrappait la monnaie aux effigies de la ville dominante. En d'autres termes, la pièce était, outre, une sorte de Fort Knox microscopique, garantissanrt le patrimoins du détenteur, mais une oeuvre d'art à part entière pour les uns, un manifeste politique pour les autres.
On peut en inférer que les civilisations en déclin, ou uniquement matérialistes, limitèrent leur vision, à des images stéréotypées, banales et sans intérêt. Ce fut le cas également pour les cités vaincues. C'est effectivement ce qui se passa et qui a atteint un paroxysme aujourd'hui.
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