Friday, 15 June 2007
L'amour et l'admiration
J'ai beaucoup de chance.
Ma plus grande joie est de partager avec des débutants, mes expériences de débutant. Si la culture est ce qui reste quand on a tout oublié, pour reprendre l'aphorisme d'Edouard Herriot, je suis vraiment cultivé!
Cette semaine, j'ai eu le privilège d'accueillir deux de mes étudiants préférés (je n'ose dire disciples, ce mot suggèrerait que je suis un maître) . L'un est un jeune homme, l'autre un homme jeune. Les deux n'ont pas grand chose à craindre de la vie, ils sont parvenus au faîte de la réussite et de la gloire matérielle, les équivalents de ce lord WH qu'admirait tant Shakespeare. Les deux ont en partage une distinction naturelle, une simplicité qui est la marque des grands, et une volonté de s'accomplir, en dépit de la chape qui pèse chez les héritiers de vastes empires. Le premier était triste, blasé, n'ayant aucun horizon autre que la réussite matérielle et le pouvoir.
L'autre, doutant de lui même, affronte l'épreuve qui attend ceux qui construisent leur voie afin de la découvrir. Il m'a posé une question : comment rester humble alors que vous êtes adulé, et que vous n'avez plus grand chose à prouver? Comment rester fier, sans tomber dans l'orgueil redoutable ou dans la vanité pitoyable? Comment atteindre cette qualité spéciale d'humilité qui, contrairement à la coulpe vaniteuse dont parle Diel, est la marque des êtres d'exception?
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SÉQUENCE 241
La lettre de Clara à Lasse
« Codex éléphant » Volume XVI p.1921
Mon amour,
Ce mot a-t-il encore un sens? Je ressens au fil des jours, la tristesse de notre séparation et notre enfant -mais ce mot a-t-il encore un sens? - l'avive à chaque instant. Il te ressemble au delà du supportable. L'éloignement clarifie tout, mais avec la lucidité, vient la confusion des sentiments. Car il me faut te haïr et mon enfant je dois le renier. Tout ce en quoi je crois, tout ce pour quoi je me bats, se révolte à l'évocation de tes actes. Tu incarnes la barbarie, la loi implacable de la nature inculte, asservie à la fatalité génétique. Mais ce que je ressens contredit ma raison. D'où vient que le chef d'une bande de criminels voués à la damnation, prenne pour moi l'apparence de la figure la plus chère, du regard le plus doux, du plus candide des sourires? Assassin plus brutal, condottiere plus sournois, je n’en connais point. Froid, calculateur, dominateur et destructeur, le voici celui qui m'a fécondé et dont le rejeton risque à son tour de m'enchaîner. Qui a distillé l'alchimie de ces noces politiques?
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SÉQUENCE 180
Aparté et aube de Noël
Le Bungalow Hartzman
Le maître d'Atoll, Clara puis Lasse.
CLARA (au téléphone) Je ne comprends pas ce qui se passe et je crains de commettre un impair. C'est un cas d'extrême urgence. Lars Hall est à côté. Il nous faut être prudents
LE MAÎTRE D’ATOLL Pas de panique, Clara. Reprenez vos esprits, vos idées et votre sang froid. Partez du commencement.
CLARA Comme convenu je lui ai fait la cour et j'allais le rejoindre au bungalow quand ... J'ai perdu connaissance. On m'a tiré d’un état de catalepsie le lendemain vers midi. Je ne me souviens de rien. Ma tension était très basse et je m'étais déshydratée. Puis au cours de l'après-midi j'ai miraculeusement récupéré. J'ai dévoré une collation abondante, en proie à une faim gargantuesque dont la fringale est à peine apaisée. J'avais besoin de viandes, de laitages, d'oeufs, et ... de fraises! Comme une femme enceinte. Puis... Puis ...
LE MAÎTRE D’ATOLL
Continuez. (Un silence). Vous vous êtes rendue au bal.
CLARA C'est cela. J'allais m'excuser mais il m'a devancé. Il a prétendu que... que... j'avais couché avec lui et que j'étais enceinte. Plus tard en rentrant au bungalow, il m'a dit combien il était heureux de m'avoir prise vierge, oui, vierge! Il a ajouté que j'étais ATOLL, que notre fils serait l'héritier de MINOTAURE et d'ATOLL. J'étais sidérée. J'ai fait comme si je partageais ses divagations. Serait-il devenu insensé ou est-ce moi qui déraille? Et le voici qui va s'amener et qui voudra coucher avec moi. Que faire? Moi vierge? Moi enceinte? Et de Minotaure! Que vient faire Minotaure dans tout cela? J'avoue que je perds pied.
LE MAÎTRE D’ATOLL
Cela est tout à fait compréhensible.
CLARA
Ah! Vous semblez y comprendre quelque chose Maître! Vous me rassurez. Je commençais à me faire des idées.
LE MAÎTRE D’ATOLL
Ce n'est ce que j'ai voulu dire. Tout simplement, votre affolement est légitime et il faut que nous réfléchissions.
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SÉQUENCE 178 Le bal des clochettes
L'antichambre de la grande salle de bal du Campanelli's Resort à Saint Martin. Veillée de Noël.
Personnages :
Philaos : animateur de télévision
Amanda Fletcher : journaliste people et pipelette officielle
Sir Hilary Onianos : Ambassadeur plénipotentiaire anglais
Bruno-Anton Zemlinsky : violoniste de second ordre
Ingrid : jeune suédoise, jeune fille au pari chez les Hall à Santa Samarea
Le père Zezette :Prêtre orthodoxe à San Lazzaro degli armeni à Venise..
Lars Hall-Bentzinger II : industriel
David Kahn. Psychanalyste. Médecin personnel de Mrs. Reubenstein
Philaos en père Noël PHILAOS
Chers amis, carissimi amici, nous voici réunis dans cette salle prestigieuse, réplique enrichie du Palais de Cristal d'Altona. L'arbre de Noël est chargé, comme vous pouvez le constater, de resplendissants paquets multicolores : ce sont des cadeaux, le prix de notre tombola en faveur des oeuvres de Mgr. Zezette et du père Alcibiade. En prime, trois lots-mystère pour les trois derniers arrivés dans cette salle avant minuit. Prenez vos billets sans tarder
AMANDA FLETCHER
Voyez donc qui arrive : Sir Hilary, le clan Hartzman au complet ... ou ce qui en reste. C'est une honte. Se produire en public après un deuil pareil! Pauvre Vera.
SIR HILARY ONIANOS
C'est dans l'intérêt des enfants. La magie de Noël effacera de morbides souvenirs.
BRUNO-ANTON ZEMLINSKI
Santa Samarea est sinistre pendant les fêtes.
INGRID
Vous êtes au dessous de la vérité. Attendez de voir la forteresse Hartzman!
BRUNO
Vous y habitez?
INGRID
Si l'on veut... Excusez-moi, on m'appelle.
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SÉQUENCE 172
PIÈGE
La chambre à coucher du bungalow Hartzman. Premières heures du matin
Lasse et Clara.
CLARA
J'ai cru que tu plaisantais, Lasse, je me suis cruellement trompée. Cesse de me regarder comme ça et de me faire mal, je t'en supplie. Tu n'as pas dit un mot. Pas une explication. Seulement des assauts sauvages, des raffinements cruels et humiliants. Tu ne m'as laissé aucune chance.
LASSE
Tu es tombée tête baissée dans le piège que je t'ai dressé. A Fontanahead tu as appris ma présence à Saint Martin. En manipulant cet imbécile de Bruno, tu t'es fait engager pour Noël. Ma passion pour les filles intelligentes et sensibles est notoire et tu as deviné que je traverse une période de vide affectif. Tu m'as fait le coup de l'amour fou. À présent c'est l'heure de vérité. Ce que je t'ai fait subir n'est rien à côté de ce que je te réserve si tu refuses de répondre à mes questions. Tu vas parler.
CLARA
J'accepte de bon coeur et, vois, je te mets en position de sentir si je mens. Interroge-moi, je te jure de te dire la vérité, rien que la vérité.
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Nouvelles du blog
Le médecin à un ami qu'il vient d'examiner :
J'au deux nouvelles à vous annoncer, une mauvaise et une bonne. La mauvaise la voici : vous n'en avez pas plus de trois mois à vivre. La bonne : je viens de coucher avec ma secrétaire.
Non, ce n'est pas une plaisanterie : c'est une oeuvre de Richard Prince de la série des "jokes". Prine est un des vingt cinq artistes de la liste New Wave. J'attends que Bonnet m'explique où réside le génie de cet artiste , dans le traitement de la surface, le caractère des lettres?
J'ai été revoir Chute d'étoiles avec un jeune Russe fort intelligent mais tourné vers les choses matérielles de la vie et ne connaissant rien d'autres que les arts de distraction. Il a découvert là, un art d'élévation. J'espère que cela constituera un déclic pour toute une vie. Mais aussi qu'il utilisera une partie de son immense fortune pour faire du mécénat et s'intéresser à l'art si riche de notre époque. Quant à moi, j'ai commencé de lire les lettres à Félician de Ingeborg Bachmann, Actes Sud, 2006. Une nostalgie mystérieuse, tendre et déchirante. Le duo d'amour me rappelle celui entre Lars et Clara. J'ai l'intention à ce propos de vous livrer demain la suite et la fin du duo d'amour de Saga. J'ai lu aussi quelques poèmes choisis de Paul Celan, chez Gallimard, 1952-1998. La richesse de la poésie est désespérante, comme celle de la musique d'ailleurs. Des centaines de relectures n'épuisent pas les connotations de ces mots mystérieusement juxtaposés.
Le tableau intitulé Voie Lactée, est peut être ce qui m'a le plus impressionné. Ce qui est décourageant, c'est le sentiment qu'on reverra jamais pareille exposition, et son passage est si court? Un mécène serait bien avisé de transporter tout l'ensemble dans un musée construit ad hoc. Pendant que j'écris ces lignes, la lumière grise de l'aube me rappelle celle, mystérieuse de l'immense tableau de Kiefer.
J'ai écrit cette nuit deux textes que je vous soumets. L'un provient de L'Entretien. D'une secheresse voulue on ne peut le comprendre que dans son contexte qui est d'un thriller assez effrayant, car il a été placé dans une enquête macabre, pour faire diversion. Le second texte, est la suite de la masterclass sur la grande distribution. (David le chameau).
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