Saturday, 24 March 2007
Le Ring de Richard Wagner raconté par Robert Wilson
et par Cristoph Eischenbach
La Tétralogie de l'anneau du Nibelung, (Der Ring des Nibelungen) appelée communément Le Ring, est certainement l'oeuvre dramatique la plus complexe qui ait été créée, non seulement par ses dimensions, supérieures à la plus ambitieuse production de Hollywood qui s'en inspire (Starwars) mais par une complexité jusqu'ici inconnue et qui se manifeste à tous les niveaux de lecture de la partition : le microcosme aussi fin et détaillé qu'un livre d'heures médiéval, le macrocosme, digne par son ampleur de la Chapelle Sixtine. Ce qui frappe dans cet immense édifice, est la cohérence non seulement de chaque niveau mais aussi des niveaux entre eux qui forment un contrepoint de sons, d'images, et de mots, d'une extrême subtilité.
Continuer à lire "Notes sur le Ring de Bob Wilson"
Friday, 23 March 2007
Histoire d'un sauvetage : l'enregistrement du Ring par Bob Wilson et Christoph Eschenbach.
Je viens de recevoir l'enregistrement du dernier Ring représenté au Theâtre du Châtelet à Paris. 11 DVD tirés à quatre exemplaires, donc rigoureusement confidentiels, fixent pour la postérité une des visions les plus originales de ce drame musical, impossible à monter conformément aux intentions du compositeur.
Cette production offre matière à réflexion, sur la désinformation dont est victime l'oeuvre dramatique la plus ambitieuse de tous les temps : quinze heures de spectacle d'une densité inouïe et faisant appel à toutes les ressources multimédia disponibles... et à celles encore à inventer.
Parmi l'immense majorité des mises en scène contemporaines du chef d'oeuvre de Richard Wagner, celle de Bob Wilson est l'une des plus audacieuses, déroutant même les spectateurs habitués aux outrances de Lenhoff à Munich ou de Kupfer à Bayreuth. C'est que la conception de Wilson semble - est -aux antipodes de la logique interne de l'oeuvre. Elle est statique, s'inspirant du Nô japonais, réduisant les personnage à des figures stéréotypées de tarot.
Ceux qui connaissent ma répugnance pour la déformation des oeuvres d'art, que j'apparente à la désinformation du public lorsqu'elle devient le culturellement correct, se sont étonnés de l'enthousiasme dont j'ai fait preuve pendant les répétitions et les représentations. J'espère que mes explications dissiperont ce paradoxe. Je me réfèrerai pour l'illustrer à une création presque contemporaine, le Tristan de Bill Viola, donné à l'Opéra Bastille, et accueilli avec le même scepticisme de la part des wagnériens.
L'attention du public est constamment attirée par l'écran géant qui occupe la plus grande partie de l'écran. La scène "réelle" mise en scène par le plus iconoclaste des metteurs en scène : Peter Sellars, est aussi statique et japonisante que celle de Wilson, laissant libre champ à la fantasmagorie virtuelle.
Or les images de Viola forment un contrepoint parfois dissonant avec le texte et les indications scéniques. Pendant le duo d'amour, Isolde allume des bougies dans une sorte d'oratoire. On assiste à des rites initiatiques étrangers à l'esprit apparent de l'oeuvre.
Pourtant, cette représentation, dirigée avec ferveur par Valery Gergiev, a été l'expérience la plus bouleversante que j'ai jamais vécue à l'Opéra, avec le Ring du centenaire. Pourquoi un tel enthousiasme pour une interprétation "désinformée"? C'est tout
simplement que les "bruits" introduits pas le plus grand des vidéastes, sont de la qualité plastique la plus élevée. Le Tristan Project est sans doute le chef d'oeuvre de l'artiste. Cinq heures de création plastique ininterrompue, est une performance dépassant les cadres du genre. C'est donc en amateur de l'Art plastique de notre époque que j'ai accueilli l'oeuvre et non en tant que wagnérien ou amateur d'opéras. Le Tristan de Viola est une oeuvre d'un genre nouveau, issue de la conjonction d'une installation grandiose et émouvante et d'un accompagnement musical qui lui donne vie et qui l'a inspirée. La relation entre image vidéo et drame wagnerien, n'est pas de l'ordre de la dénotation explicite, mais de la connotation, de la réverbération. Autant les critiques musicaux peuvent critiquer le Tristan de Wagner accompagné des images de Viola, autant les amateurs d'Art Contemporain sont fondés à adhérer sans réserve à l'installation de Viola accompagnée par la musique de Wagner et commentant librement ses résonances les plus précieuses.
C'est dans cette optique qu'il faut à mon sens apprécier le Ring de Wilson, accompagné par la musique de Wagner, avec la différence que les images wilsoniennes sont abstraites et plus proches du minimalisme abstrait que de l'imagerie ésotérique de Viola.
Continuer à lire "Le Ring de Wagner vu par Wilson. L'enregistrement privé."
François Bayrou, : La France de toutes nos forces.
Le consensuel dans toute sa gloire
Vous trouverez dans cet article l'analyse du programme figurant sur la lettre du 20 janvier 2007 que m'a envoyé personnellement le candidat avec toute son amitié et qui m'est parvenue hier. Je la lui rends en analysant le message qu'elle contient, et dont une version inversée a été proposée dans le journal du 23 mars 2007.
Evaluez vous-même les propositions originales, celles qui le démarquent des autres candidats.
1. La France doit prendre un autre chemin (faut que ça change!).
2. La France souffre du mal français : chomage, dette publique, violence dans les banlieues, projet européen abandonné.
3. Mes concurrents n'ont pas su régler ces problèmes (moi oui)
4. Il faut rassembler toutes les bonnes volontés et je dois être le président de tous les Français.
5. Il faut choisir les meilleurs pour gouverner, rassembler et reconcilier. J'incarne de projet de rassemblement.
6. La République est affaiblie, il faut la reconstruire.
7. Il faut que l'Etat intervienne où ça va mal.
8. Il faut équilibrer les finances publiques.
9. Il faut soutenir l'esprit d'entreprise, de création, de recherche.
10. Faut sortir de l'exclusion les plus faibles.
11. Faire respecter et progresser l'école publique.
12. Mieux armer la justice et la faire respecter.
13. Venir en aide aux femmes.
14. Combattre la solitude et la violence.
15. Reprendre à la base l'idéal européen.
16. J'ai besoin d'argent. Donnez moi des sous.
Décodage
En première lecture vous serez sans doute parvenus à la conclusion qu'aucun des candidats (à l'exception de Le Pen, qui ne pratique pas la langue de bois) ne pourrait désavouer ces sages propositions. Il y en a pour tous les goûts.
En seconde lecture, il y a les non-dits. Les inférences qui découlent de la formulation.
Tout d'abord, voici un candidat dont on loue la culture et la connaissance de la langue Française, qualités que l'on dénie à Ségolène Royal. Et pourtant, voici un échantillon de son style : "Cela nécessite des moyens financiers conséquents".
Si "nécessiter" (pour exiger) est admis dans le petit Larousse et le Robert comme une locution courante en revanche "conséquent" est familier. (emploi socialement marqué écrit le Robert). Un chef d'Etat respectueux de la langue, comme l'étaient De Gaulle ou Mitterrand, auraient sans doute écrit " Cela exige des moyens considérables". Je suppose que comme les rédacteurs de prospectus publicitaires, Monsieur Bayrou veut faire "peuple". Mais ce n'est qu'une remarque, moins innocente qu'elle n'a l'air, car s'attaquer à la langue en haut lieu n'est pas anodin.
1. M.Bayrou constate qu'aucun des partis "habitués à se partager le pouvoir depuis vingt cinq ans n'a résolu ces problèmes". Mais les partis valent ce que valent les hommes qui les représentent, et M.Bayrou en fait partie. Il suffit de lire son cursus honorem politique! Et puis, il dit qu'il faut choisir les meilleurs pour gouverner. Il devrait donc exclure tous ceux qui ont été au pouvoir depuis vingt cinq ans. Qui y croit?
2. Lorsque M.Bayrou laisse entendre qu'il pourrait avoir un premier ministre socialiste, sans déclarer de qui il s'agit, il s'agit donc d'un souci de rééquilibrage politique, ce qui contredit son affirmation que l'on ne tiendra pas compte de l'appartenance politique dans le choix des meilleurs.
3. Réimplanter l'Etat où ça va mal implique deux conséquences: comme ça va mal partout, l'Etat doit intervenir et bien plus vigoureusement qu'auparavant ("se réimplanter"). Cela signifie un supplément de dirigisme et de centralisation.
4. Cela est cohérent avec la volonté affichée de réduire l'action des écoles privées, qui échappent dans une grande mesure à l'idéologie. Bayrou a d'ailleurs annoncé que ce sont les syndicats qui auraient la haute main sur les contenus.
5. Tous savent que la Justice est de gauche et qu'elle prend parti généralement pour les criminels contre les victimes. La faire respecter, laisse supposer qu'elle ne l'est pas, ce qui est vrai, la mieux armer, c'est accroître ses effectifs, ce qui est urgent et nécessaire, mais il n'y a pas un mot pour énoncer la contrepartie, c'est à dire le contrôle de la neutralité des juges.
6. Sortir de l'exclusion les plus faibles est un euphémisme pour dire que l'on consentira un effort financier pour les sans papiers, les chômeurs professionnels, au détriment des classes travailleuses, non exclues, mais paupérisées.
7. Reprendre l'idéal européen signifie mettre fin à l'exception française. Or toutes les mesures préconisées vont à l'encontre de l'harmonisation européenne, et qu'on ne nous cite pas l'exemple de l'Allemagne qui est résolument orientée vers le travail et le libéralisme en dépit d'une fausse cohabitation.
8. Rééquilibrer les finances publiques. Mais pas un mot sur les réductions drastiques de fonctionnaires. Où prendre l'argent, si ce n'est en économisant, en luttant contre les privilèges des serviteurs de l'Etat, et en permettant ceux qui le veulent de travailler davantage pour gagner plus, comme on le fait partout en Europe?
J'aimerais bien avoir un débat autour de ces points précis. Un ami qui vote Bayrou, me disait: "je ne veux pas de Sarko, il a une sale gueule, et Segolène, elle est vide". Il fait partie de l'élite, ou qui se croit telle. J'en viens à penser que le peuple de base sera peut-être plus avisé, à condition qu'il ne tombe pas tête baissée dans les pièges de la langue de bois.
Thursday, 22 March 2007
Statistiques
Ce blog a été lancé au début du mois de février 2007 et en dépit de l'absence presque totale de liens, a reçu 1712 visites. Aujourd'hui nous venons de franchir la barre des 5000, depuis le mois de mars, 3364 visites ont honoré le blog. Certes ces chiffres sont ridicules lorsqu'on les compare avec les milliers, les dizaines de milliers, les centaines de milliers de visiteurs que reçoivent les grands blogs professionnels, qui font souvent vivre leurs créateurs.
Le notre, n'a pas cette ambition : small is beautiful. Il s'adresse à un nombre forcément limité d'internautes, curieux de la chose culturelle et passionné par les processus mystérieux de la désinformation et de la création. C'est pour eux que j'ai écrit VIRUS qui est déjà en vente et fera l'objet d'une chronique dans un magazine très branché et d'un point de vue dans une autre publication très grand public.
Les premiers commentaires des professionnels ont été encourageants. Certes on peut faire bien mieux, mais au moins on a évité l'écueil de la vulgarité et de l'autoglorification qui contaminent bien des blogs. La densité culturelle du blog a été appréciée comme un élément différenciant. D'autres se demandent si je pourrai continuer le rythme d'un nouvel article par jour (ou par nuit). C'est possible, car à mon âge, on dort moins. Que de temps gagné§ Il me permet à côté d'une vie professionnelle très active, de rejoindre aux petites heures du matin mes amis inconnus. (De minuit à quatre heures, on compte souvent une cinquantaine de visiteurs). Merci de votre appui et surtout n'hésitez par à entrer dans mon petit cercle.
Langue de bois
Claude Shannon, le fondateur de la Théorie de l'information eut le génie de relier la quantité d'information d'un message à son improbabilité. Ainsi que le disait Lazareff, qui était expert en la matière, un chien qui mord un homme, c'est un fait divers, un homme qui mord un chien, c'est une nouvelle.
Essayons par jeu, d'imaginer un programme électoral commençant ainsi :
Monsieur ou madame,
Dans trois mois les Français se verront imposer un choix parmi les candidats survivants au test des cinq cent signatures, pour élire le prochain locataire de l'Elysée. Devant les légèrs désagréments qui énervent notre pays, je me demande s'il ne faut pas que la France reste dans le chemin qui ont mené à une situation dont le président sortant est légitimement fier.
etc...
Suivrait la volonté de diviser les Français, de continuer d'affaiblir le pays en renforçant le rôle de l'Etat, combattre l'esprit d'entreprise au profit du fonctionnariat et de la bureaucratie d'Etat, de combattre l'école républicaine, de favoriser la violence et la solitude, exclure les plus faibles, dévoyer la justice, démolir dans ses fondements l'idéal européens, ça c'est un scoop!
Cerise sur le gâteau : le candidat convaincu que ce programme n'a pas besoin de fonds pour le propager de bouche à oreille (la Révolution de 89 n'a pas été financée que je sache), renonce à faire appel à la bourse des citoyens, prouvant ainsi son désinteressement et dans la puissance de son verbe.
(si vous voulez prendre connaissance de ce programme in extenso, continuez la lecture).
Bien entendu, il n'y a aucun danger de se voir proposer un programme aussi original. En revanche, la plupart des candidats, dans leur discours, noient le peu d'information (par exemple la réquisition des locaux d'habitation libres, la retraite obligatoire à soixante ans, ou la possibilité de travailler plus pour gagner plus) sous un flot de propositions infiniment probables, telles que la promesse de redresser la France, de venir en aide aux exclus, de favoriser la création et la recherche, de réduire la fracture sociale etc... Ces propositions ont une valeur informationnelle nulle, comme on dit que le chewing gum a une valeur nutritionnelle nulle. Elles servent d'excipient neutre, hypoallergique, aux propositions spécifiques, édulcorées de surcroît pour ne pas heurter les sensibilités.
Si les discours de deux des candidats favoris ont une faible valeur spécifique, noyant le purgatif sous un flot d'excipient, un seul (devinez lequel) réussit le tour de force de ne proposer que de l'excipient. C'est dire, que non seulement ses propositions sont communes aux deux autres, mais que de surcroît, il serait très difficile de les contester, tant elles sont vertueuses. Si vous voulez connaître in extenso le programme électoral que je viens de recevoir, passez à la suite de ce journal : vous trouverez inversées les propositions audacieuses et courageuses qu'il propose. Il suffira dès lors de prendre le contrepied des mesures que contient le manifeste de La France de toutes nos faiblesses (un autre beau titre serait, tous seuls tout est possible), pour découvrir le secret de l'étoile montante. Qui pourrait ne pas être d'accord avec lui?
Mais méfiez-vous, si derrière l'information authentique se montre la désinformation, il faut tenir compte de l'information qui se cache derrière la désinformation. (Voir l'affaire Angoulème). C'est à ce décodage que je vous convie dans un nouvel article : Le champion du consensuel. (en préparation) .Une mise en garde cependant. Ce journal ne se soucie guère de prendre parti pour l'un ou l'autre candidat. Son but, comme celui du blog, est de montrer les mécanismes techniques de la désinformation.
Continuer à lire "Le journal du 23 mars 2007"
Aimez-vous Brahms?
En ce moment je joue deux oeuvres antinomiques: la Sonate K330 de Mozart, dont j'ai esquissé une analyse et un décodage, dans un des articles, les Quatre Ballades Op.10 de Brahms. Je ne connais pas de pièces plus différentes par leur esprit, par leur conception, mais surtout par la nature de l'empathie qu'elles exigent de l'auditeur ... à condition que le pianiste le permette. Car si j'ai insisté sur les distorsions qui affectent la sonate de Mozart; elles ne sont rien en comparaison de celles dont souffrent les ballades.
Si je fais figurer dans le journal ces considérations plutôt destinées au musicien, c'est qu'elles vont à mon sens bien plus loin que la musique, mais qu'elles explorent des régions du psychisme que l'on aborde assez rarement. On y décrit deux attitudes également antinomiques : l'amour du net, chez Mozart, celui du flou chez Brahms. Le Français a toujours aimé la clarté, la retenue, même dans le drame, l'Allemand du XIXe siècle, a été attiré par ce qu'il nomme la Sehnsucht, sentiment qui aujourd'hui a disparu, comme une fleur fragile tuée par la pollution.
Les deux pièces ont pourtant en commun une tristesse insondable, exprimée comme à l'étouffée, et saisissant l'âme de deux jeunes hommes plongés dans des circonstances tragiques. Lorsque Mozart composa la plus dramatique de ses sonates (avec la fantaisie et sonate en do mineur) il se trouvait dans un milieu hostile, à Paris, désemparé et abandonné alors que sa mère se mourait. Cette douleur s'exprima par une oeuvre feutrée, avec de longues plages de fausse légèreté et des irruptions soudaines contrastant par leur violence et leur dureté. Dans ce contraste violent, réside le drame latent, étouffé par les pianistes, qui jouent les deux mouvement extrêmes; soit uniformément clairs et légers (mozartien!), soit
tout aussi uniment fort et brutal comme Emil Guilels.
Les circonstances qui virent naître les Ballades Op.10 ne sont pas moins perturbantes pour le jeune homme d'une vingtaine d'années qui avait été accueilli par le couple Schumann. Des sentiments violents s'affrontaient : un amour plus ou moins platonique, une sensualité et un désir passionné, exacerbés par la folie qui s'emparait du pauvre Robert, la nécessité de refouler ces passions. On n'est pas très loin de cette sourde ambiguïté, si bien décrite par Stefan Zweig dans La Confusion des sentiments. On y retrouve le trio : la femme respectée et adorée, le mari admirable initiateur, cachant une homosexualité qui le taraude, le jeune étudiant sensible et passionné hébergé par le couple. Certes Schumann n'était pas affecté par ce qui alors était considéré comme une tare, il sombrait dans la démence, mais il reste que le triangle fatal sera le même. L'épilogue aussi. Dans le roman de Zweig, le jeune homme part pour ne jamais revenir. Au contraire, la liaison entre Johannes et Clara, durera toute une vie. Mais en réalité le jeune Brahms, après la mort de Schumann, dont il exprimera le deuil dans son premier concerto pour piano et orchestre, cet ange blond, beau comme un ange qu'admirait Robert, partira à jamais. Il sera remplacé par un barbu ventripotent, bougon, renfermé, qui jamais ne se mariera, et qui essayera d'étouffer définitivement l'esprit des Ballades sous un classicisme impitoyable qui fera de lui l'héritier de Beethoven. Ce n'est que vers la fin de sa vie, que les sentiments réprimés surgiront comme des effusions intolérables dans ce mélange de douceur et d'amertume, le zart-bitter, cette nostalgie pour ce qui ne peut exister, propre au post romantisme allemand.
Je viens de voir un film admirable qui a obtenu quatre Oscar mérités, dont celui de la meilleure interprétation féminine à Marina Hands, : Lady Chatterley. On y rencontre le même trio : un couple qu'une passion muette rapproche, un mari infirme. Mais dans le premier roman érotique et sensible, ce qui chez Brahms relève du non-dit, est libéré dans l'effusion d'une épiphanie charnelle. Aujourd'hui, dans notre XXIe siècle, où tous les transports sexuels sont étalés, non seulement permis mais naturels, il est difficile d'imaginer ce qui pouvait troubler le jeune Brahms, le pousser à composer, ce qui restera unique dans son oeuvre, et qui ne reviendra jamais. De même que la sonate de Mozart, la K330, restera également une confidence exceptionnelle dans son oeuvre.
En préparation, une analyse des Quatre Ballades Op 10 de Brahms, à propos du "Chant de Hellewijn" (Contes et légendes).
Tuesday, 20 March 2007
Le troisième homme, L'immobilisme en marche?
On m'a reproché de ne pas avoir donné mon avis sur François Bayrou. C'est que ses caractéristiques sont moins marquées que celles du "père Sarko" et de "la mère Ségo". 'Et puis, il est difficile d'ajouter quoi que ce soit après les commentaires des experts en politique et des gens comme vous et moi, que j'ai pu interroger. Les opinions se patagent en deux catégories bien tranchées. Les uns parlent de paralysie, de démagogie, de stratégie fourre-tout etc. Leur argument principal repose sur la croyance que l'on ne peut rassembler en un même gouvernement des hommes non seulement de convictions antagonistes, mais pis encore, d'une conception opposée sur la manière de les exprimer.
Les autres, se fondent sur la conviction que les Français en ont assez de l'affrontement gauche droite, plus fantasmatique que réel, Chirac ayant fait une politique point radicalement différente qu'un Mitterrand, si l'on en juge par les résultats. S'ajoute la peur du changement, de gauche ou de droite, et la tentation du balancier. Après tout les Français n'étaient pas si mécontents de la cohabitation forcée Chirac-Jospin.
A cela il faut ajouter des échos très favorables à Bayrou. Partout où il a parlé, il a fait un tabac, que ce soit chez les "petites gens" de Force de la Terre ou l'élite prétentieuse de Médusa. Il a parlé devant des jeunes des écoles de commerce, pourtant théoriquement proches de Sarkozy, et a emporté leur conviction. On a trouvé son discours pondéré, pragmatique, proche du terrain d'où il sort (le Bearn, symbole de la France profonde). Il apparaît comme indemne des intrigues et des appareils partisans, un homme nouveau. Enfin, c'est un homme de culture et de taille (physique) présidentielle, d'apparence rassurante, paternelle et quasi paysanne, un bon représentant de la France profonde, comme du milieu des instituteurs. Il incarne donc un espoir pour bon nombre de Français.
Ce dont tous sont convaincus, moi compris, c'est que s'il parvient au deuxième tour, il sera président.
L'issue du premier tour sera donc très instructive sur l'état d'esprit et les tendances profondes des Français.
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