L'Entretien
Wednesday, 11 March 2009
CHRONIQUE
Mélanges
Mon serveur consentant à obéir, je vais regrouper ci dessous les photos qu'il avait rejétées.
Voir notamment le billet du 5 mars sur le Mingei.
Il est 17h 37. Depuis 13 heures mon serveur n'accepte plus de transferer quelque image que ce soit sur mon blog!
Emmanuel Dyan brille par son absence ! Ce mouvement d'humeur ne tient pas compte du fait que l'univers ne tourne pas autour de moi, ni de mon blog, et que le pauvre a des obligations professionnelles qui assurent après tout son gagne-pain, tout comme moi d'ailleurs. Mais alors que j'ai la chance de disposer de mon temps comme je l'entends, l'immense majorité des gens compétents sont surchargés. Ils sont si rares! Cette impatience est d'ailleurs teintée d'un soupçon d'ingratitude,défaut que je déteste,que car si ce blog existe et qui a le succès qu'on sait, c'est entièrement grâce à lui. Donc, un grand merci à Emmanuel, et je sais ue je parle au nom detous les internautes!
Autour de L'Entretien
Dans l'attente hypothétique d'une remise en marche prochaine de mon serveur, je voudrais vous entretenir d'une de mes préoccupations de ce 11 mars. Il s'agit de la version définitive, au propre, des volumes 35 x 35 sur papier éléphant destinés au département des munscrits anciens de la BNF. Deux considérations motivent cette décision : les peintures et la calligraphie, souvent innovantes qui ont inspiré la décision de la BNF de m'accueillir dans son sanctuaire le plus précieux, mais d'une facture très inégale ; des parties du texte ininteressantes ou d'une crudité insoutenable, atroce, pis encore que les passages les plus affreux de STEPS de Jerzy Kosinski. D'après Coetzee qui parle par la bouche d'une de ses créatures : Elisabeth Costello, en livrant impunément au public de pareilles ignominies, on ressuscite l'esprit du mal. Pour Coetzee, le mal a une existence en soi. Il est lové au plus profond de nous mêmes. Si en théorie nous devrions subir une répulsion indicible à son contact, émotionnellement il risque d'exciter les zones les plus troubles de notre inconscient. l'esprit dumalserait un archétype, ou si l'on préfère, un esprit qu'il faut bien se garder de réveiller.
Malheureusement le graphisme le plus réussi est précisément celui consacré au mal. On sait que la partie la plus populaire et sans doute la plus forte de la Commedia, la Divine Comédie de Dante, est précisément l'enfer. En sacrifiant l'horreur je prive L'Entretien de l'essentiel de son originalité, de sa force et de son accessibilité. Jusqu'ici cela ne me gênait guère car la consultation de l'oeuvre à la BNF est assortie de tant d'entraves, que seuls quelques privilégiés pourront y avoir accès. Mais si je mets au propre le texte, c'est en vue de le diffuser et les choses deviennent différentes. Jusqu'à présent les "moreceaux choisis" que j'ai imprimé moi-même, ont résolu le problème. Il suffisait de modifier les images et d'éliminer les séquences mal pensantes. Mais si je décide de mettre au propre l'ensemble de l'oeuvre, le problème ressurgira à nouveau. Cette mise au net devra donc être assortie de difficiles modifications afin de conserver la forme innovative de la calligraphie et des images, et la dureté du texte.
Hermann B*** un ami de longue date, a connu le mal en tant que spécialiste de la sécurité délégué par Bruxelles en Yougoslavie. Il a assisté à toutes les horreurs de la guerre ethnique entre musulmans et chrétiens, à toute la perversité de l'intoxication dont ont été victimes et complices les bons intellectuels occidentaux. Ajoutons à cela un vif penchant pour l'ésotérisme et on comprendra que non seulement il pouvait admettre lespassages les plus durs,mais il voulait posséder avec avidité, les brouillons et la genèse de ce travail, livres manuscrits à ne pas laisser traîner. Il lui seront donc destinés.
Hermann a apprécié mon projet, et bien qu'il aime le format "jésus", il préfère évidemment que je continue le manuscrit "Pepys". Je rappelle ci-dessous l'apparence du "Jesus" et du "Pepys".
Ci-dessus le format Jesus.
Ci-dessus le format original sur papier "éléphant" 35 X 35 cm
Ci-dessus, manuscrit "Pepys" vol. II
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Saturday, 7 March 2009
CHRONIQUE
L'héritage de Lasse Hall
A dire vrai ce n'est pas Lasse Hall que je fais allusion, mais à son sosie qui lui resemble aussi bien physiquement que moralement. Appelons-le Brutus. Même adoration pour son père, contrastant avec son attitude glaciale envers les autres. Même pouvoir de séduction, lorsque cela lui convient. Se sentant à l'aise parmi les travailleurs de la base, n'hésitant pas à couper la tête des vizirs quand ils deviennent paresseux et prétentieux. Même laconisme dans l'expression, même élégance naturelle due à une ascendance illustre.
Mais il est une exception près et de taille. Elle a trait à nos relations, inversée chez Brutus par rapport à Lasse. Lasse me surprotégeait, il m'aimait infiniment, trop même et voulait m'améliorer, changer mon caractère, faire de moi un homme. Ce profond engagement, pensé-je, menaçait mon indépendance. Je fus changeant, méfiant, hostile envers lui tout en étant fasciné. je finis par le fuir. Combien regretté-je cette décision ! J'en traîne encore remords et regrets.
Ce rapport fut inversé entre Brutus et moi. Je le surprotégais (alors qu'il n'en avait pas toujours besoin), je fus son mentor et voulais l'améliorer et faire de lui un humaniste dans tous les sens du terme. Je dois reconnaître qu'il est était heureux d'apprendre, avide de culture et de connaissance. Mais humain, certes pas avec moi. Il jouait au chat et à la souris, un jour humble et respectueux, un autre me fuyant pour des semaines. Il finit par m'avouer qu'il n'éprouvait aucune affection pour moi, qu'il n'y pouvait rien, mais me considérait comme un bon professeur, rien de plus. Il m'annonça cela froidement après avoir réfléchi pendant une nuit et sans se demander l'effet que cela pouvait produire sur l'être affaibli que j'étais. Pourtant, l'année dernière il fit le voyage d'Athènes pour me voir à l'hopital. J'étais en train de mourir et je ne le savais pas. Des témoins de la rencontre me racontèrent qu'il resta tout la journée à mon chevet en me tenant la main, comme il le fait avec son père. Il pleurait, lui, l'homme d'acier, de me voir ainsi inanimé, ayant perdu l'usage de ma mémoire et incapable d'une pensée cohérente. Les semaines qui suivirent il replongea dans l'indifférence et disparut. Cette alternance de tendresse et de mépris me perturba profondément. Et bien souvent, la nuit venue, je pleurai toute les larmes de mon corps. En écrivant ces mots, je me rends compte de l'effet exagéré et surrané qu'elles peuvent produire sur monlecteur. Mais c'est dû à mes lectures d'enfance pétries de ce sentiment qu'on trouve dans Shakespeare ou chez Goethe: tränen fogen die tränen : les larmes succèdent aux larmes, écrit le poète dans sa dédicace au deuxième Faust. Envahi par la solitude, incompris, il se rappelait avec nostalgie du passé alors qu'il était entouré d'amis, d'admirateurs, et d'amoureuses, tous morts ou dispersés par le temps et l'adversité.
Il vint me voir récemment et pour la première fois il comprit que son père adoré m'avait admis dans la famille, et combien il souhaitait qu'il me rende un peu de l'affection que je lui portais. Lorsque lors de nos entretiens je lui parlai de mes amis de coeur, ceux qui par leur amour me soutinrent dans les épreuves, je ne le mentionnai pas. - Et moi dit-il je ne compte pas? - Je lui rappelai alors de son refus de me considerer autrement que comme un bon professeur. Mais je n'étais pas sérieux !
Tout bascula à cause de l'héritage que je lui destinais. Dans mon esprit,et c'est toujours vrai, je consacrai au département des manuscrits anciens, à la BNF Richelieu, tout ce qui a trait à l'Entretien. C'est un honneur insigne auquel je suis sensible de trouver l'oeuvre de ma vie dans la même salle que les manuscrits de Victo-Hugo ou les plus beaux manuscrits à peintures du Moyen Âge
La collection de manuscrits musicaux viendra enrichir la Première Fondation à UCCLE. Mes documents intimes et mes papiers personnels notamment biographique ou autobiographiques reviendront à ma muse-ange gardien. À qui léguer mes livres préférés comme les oeuvres de Sahakespeare du Club du livre, et surtout de mes manuscrits à peintures autres que L'Entretien?
Je rappelle que dans l'impossibilité faute de moyens, d'acquérir de grands livres de peintres illustres comme le Picasso et le Chagall de Tériade ou la Théogonie d'Hésiode illustrée de gravures de Braque, je décidai d'en fabriquer des substituts, mais avec des textes personnels : poésies chinoises apocryphes comme L'Histoire d'un fleuve d'après Wang Wei, notes de voyages, (dans le Périgord noir et à Vironvay entre Seine et Eure), poèmes divers.
Ci-dessus la première page du Journal d'automne sur papier Richard de Bas
St.Cyprien, vu de ma fenêtre.
Et les emboîtages s'inspiraient des tableaux de Tàpies qui rappelaient les murs couverts de cicatrices que je retrouvais à Saint Cyprien près de Sarlat.
Ci-dessus deux pages de Hors des sentiers battus couverture en parchemin, caractères Europe au rapidographe, d'après Iliazd.
Couverture en bas-relief de L'Entretien en pâte à sel.
Le livre qui me donna le plus de mal fut une imitation de L'Apocalypse de Joseph Foret qui conçut le projet de faire le livre illustré le plus beau (et le plus cher! ) du monde. L'original était doté d'une couverture-bas-relief de Salvador Dali, mais Foret en dépit de ses dons de persuasion ne put se procurer l'appui des grands peintres et dût se rabattre sur des Trémois et d'autres troisièmes couteaux, indignes du projet.Le plus admirable à mon sens fut la calligraphie sur parchemin de Micheline Nicolas, une handicapée pleine de talent. Elle accomplit le tour de force de réaliser plus d'une centaine de pages en une humaniste droite, si je ne me trompe, à moins que ce soit une semi-onciale, à l'encre de chine, à l'or à la coquille, sur basane ou cuir de chevreau découpé (digne du manuscrit de 1384 de Padoue, tout en lettres d'or à la coquille, unique au monde et réservé pour la Seconde Fondation). Les exemplaires de luxe qui en furent tirés, contenaient outre une aquarelle originale de Dali, un fac-simile de la calligraphie de Micheline Nicolas, imprimé sur Japon nacré (dont je découvris à cette occasion la somptuosité). L'ensemble était protégé par un étui en satin blanc frappé de lettres d'or. Je révais des nuits entières à ces exemplaires de tête, et je brûlais de convoitise, frustré de n'avoir pas les moyens de m'en payer un. Il faut cependant reconnaître que la passion qui m'animait ne visait ni le texte que je connaissais déjà, ni les aquarelles de peintres sans génie qui l'illustrait. Non, ce qui me fasciné était le support : étui de satin au dos frappé à l'or fin, impression sur japon nacré, superbe calligraphie exaltée par l'impression sur le papier nacré.
Ci-dessus écrin en satin et calligraphies originales sur japon nacré, imitation des exemplaires de tête du livre de Joseph Foret.
C'est ainsi que naquit mon manuscrit sur les poèmes de la Flûte de Jade mon livre de chevet édité aux éditions Piazza sur une traduction de Franz Toussaint. Je rappelle que plusieurs pièces de ce livre, dans la version allemande de Hans Bethge, servirent de support au Chant de la Terre de Mahler.
Ci-dessus la première édition, exemplaire tête sur japon impérial, de La Flûte de Jade de Franz Toussaint, éditions Piazza.
Ci-dessus, couverture sur papier Richard de Bas travaillé pour imiter un tableau de Tàpies qui était en ma possession. Evoquant également de vieux murs, comme j'en trouvais àSt. Cyprien.
Brutus adorait ces manuscrits à peinture et tout particulièrement le premier journal de Printemps, réalisé à Vironvay et peuplé de vaches rapidement croquées sur le vif et aussi le plan de mes randonnées pédestres entre Louviers et au delà et St.Pierre de Vouvray, au bord de la Seine.
J'adorais tout particulièrement les environs de Louviers où résidait Lady Patachou et quelques autres célébrités. Je me promenais dans les collines avoisinantes de l'autre côté de l'Eure et je contemplais, plein de nostalgie les coquettes maisons normandes habitées par des familles heureuses et équilibrées, moi le juif errant.
Brutus manifesta une telle joie à l'idée d'hériter un jour de ces manuscrits, que ma décision fut prise instantanément. Ils seraient siens, sans conditions, sans réserve, sans période probatoire. Nulle part ils ne seraient plus aimés, plus regardés, s'intégrant dans la bibliothèque familiale et portant mon souvenir quand je ne serais plus là.
L'attitude de Brutus envers moi changea brusquement. Même dans ses périodes de tendresse, il y avait quelque chose de contraint de sa part. Ce soir là, il rayonnait de bonheur, il souriait comme lorsqu'il était en présence de son cher père. Je crois que ces manuscrits en tant que manifestation concrête de mon engagement sans faille pour lui, a fait beaucoup plus pour nous rapprocher que tous les services et les enseignements que j'ai pu lui apporter. Certes, je ne le sais que trop, il peut encore changer, rentrer dans sa coquille et manifester la plus cruelle indifférence à mon égard. Mais qu'importe, j'ai décidé de thésauriser les heures heureuses et de passer sur les petites hostilités et les petites jalousies qu'inspirent ceux qui trouve dans la malveillance un moyen de se venger de ce qu'ils prennent pour une supériorité sur eux. Je crois que c'est Moshe Luzzatto, mon ancêtre cabaliste qui disait qu'on doit payer le don de vision par de terribles souffrances physiques. C'est la resistance à de tels supplices que se forge le caractère des hommes ordinaires et le porte au dessus d'eux mêmes. Mais il y a aussi les souffrances morales, bien plus supportables mais laissant dans leur sillage découragement et amertume. Celles-là on peut les éviter en conjurant l'esprit du mal. Sinon elles vous rongent l'âme et vous affaiblissent irrémédiablement. Du temps où j'étais complètement amnésique j'étais heureux d'une certaine manière. Aucune apprehension ne me troublait puisque j'oubliais le futur, aucun préjugé puisque j'oubliais le passé. Je pus ainsi goûter la richesse des belles demeures hausmanniennes en pierre de taille qui font la gloire de notre capitale.Rien ne vint troubler mon empathie pour le pauvre moineau déplumé, qui en boitillant fouillait dans les poubelles de chez Hédiart. Au point que je finis par m'identifier à ce modeste et attendrissant volatile.
Mes pensées sont, pendant la nuit, tournées vers la réalisation de L'Entretien sur les livres blancs Pepys. J'ai pu retrouver les instruments et les couleurs naturelles (outremer, vermillon) et précieuses (or, argent) nécessaires à la poursuite de mon laborieux projet. Mais j'essayai un graphoplex à plume tubulaire capable de tracer des traits d'un cheveu. Mais je m'aperçus que c'est avant tout la main qui guide l'instrument, le cerveau qui guide la main qui est devenue comme une extension naturelle de celle-ci. J'essayé de reconstituer la gravure qui orne la devanture de boucherie, mais ma main était mal assurée, et je compris que pour obtenir des traits d'une finesse comparable, le cerveau doit les visualiser. Et ce n'est point chose facile !
Pour ceux qui veulent avoir des images de quelques manuscrits convoités par Brutus, voir le corps du billet (mention " continuer").
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Saturday, 28 February 2009
Chronique
Photos de la vente du siècle
Je devrais recevoir prochainement les photos officielles de la vente avec autorisation de les diffuser sur le blog. En attendant, je vous communique quelques images prises à la fin de la dernière session. Auparavant vous voyez la version Jésus de L'Entretien dont je vous entretiendrai plus bas.
Me voici avec l'équipe impressionnante et hyper efficace des téléphonistes de la
vente du siècle.
.Me voici à la fin de la vente, auprès du podium, tout content d'avoir acquis un lot, qui s'est révélé apocryphe;
Potins de la vente
On dit qu'une grande partie des tableaux achetés chez Alain Tarica, ne se sont pas vendus. J'avous pour ma part que Tarica ait vendu des Gericault au couple, lui dont le père dédaignait mes Tàpies.
Lorsque je visitai l'exposition de Koons à Versailles, la foule était indescriptible. J'attribuai cet engouement à la la curiosité,, par la provocation de l'artiste. Mais point du tout! Nul n'avait entendu parler de Koons. On était là uniquement pour voir Versailles!
De même l'enthousiasme pour la vente du siècle ne toucha que peu nos couches populaires. France-Soir n'en a fait aucune mention, ni mon employée de maison. Cette dernière qui sait mieux manier un ordinateur qu'un grille-pain, n'avait que vaguement entendu parler de l'évènement. Mon avocat et ami Me Daninos, me fit don d'un livre extraordinaire de Leo Perutz : Le Judas de Léonard, datant de 1959 et traduit de l'allemand en 1987, éditions Phébus. Saisi d'un soupçon, j'interrogeai mon employée : savez-vous qui est Léonard de Vinci? - Oui, ça me dit quelqie chose,ce n'est pas un roi? Réponse digne de "Le Homard de Vinci". Est-ce l'effet de la télévision, de l'Education Nationale, de l'environement? Le fait est là. Pourtant la télévision française couvrit remarquablement bien l'évènement.
La mise au net de L'Entretien
Vous vous souvenez peut^etre de ce manuscrit à peintures, sélectionné par la BNF pour figurer, honneur suprême, dans la salle des manuscrits anciens à Richelieu. L'ouvrage original comprend plus de vingt volumes de grand format, mais la première mise au net était calligraphiée avec des couleurs précieuses: or à la coquille, vermillon naturel, Lapis-Lazuli etc. Les petits volumes in-8 qui servent de support à ce travail monastique, sont une interprétation moderne de la reliure du journal de Samuel Pepys, célèbre chroniqueur, volumes vendus voici 30 ans chez Rizzoli 5 th Avenue à NewYork. Cette merveilleuse libraire en acajou et bois précieux vendait des fac-similés culturels : posters, livres d'heures, et des livres de pages blanches dont le Pepys. L'emboitage annonçait : "tout ce qui manque à ce livre de faire un chef-d'oeuvre, c'est vous. " Ne pouvant me payer un original, je relevai le défi en réalisant mon propre "chef d'oeuvre" (Au sens d'oeuvre de compagnonnage". Ce fut le célèbre calligraphe Claude Mediavilla qui m'initia et traça l'alphabet du "chef d'oeuvre". Je remplis ainsi un volume et un autre qui resta en suspens. Une des raisons à cela, est que je perdis mon acuité visuelle et je fus obligé de porter des lunettes. Une autre était le temps pris par la réalisation d'une page : plus de trois heures et demie. Ce temps était trop lent pour suivre ma pensée qui était bien adaptée à la spontanéité et la tolérance à l'erreur des livres carrés, aujourd'hui les originaux. Depuis j'en tirai un grand nombre de moutures imitant les livres de J.M.Ricci ou encore des innovations numériques,sur photoshop.
Aujourd'hui je décidai de faire le ménage dans ce texte foisonnant et choquant dans bien des pages. A ne pas mettre entre toutes les mains! C'est un grand travail de re-création et j'avais le choix entre deux solutions : de grands volumes format Jésus, très majestueux et permettant une exécution rapide. Vous en avez un exemple en tête de ce billet. Les matières employées, sont de qualité moyenne : gouaches Uni Posca, Or et argent Pentel, grands titres au feutre calligraphique etc....
L'autre possibiliité fut de continuer le manuscrit Pepys, abandonné voici trente ans pour les raisons que j'ai mentionnées. Il y en avait une autre. Dans un souci de variété, j'adoptai une caroline (du temps de Charlemagne) mais je m'aperçus que ni cette écriture, ni la gothique, ne me convenaient. Elles étaient pour ma main, contre-nature. Mon écriture normale, prevenant sans doute de mes ascendances florentines, est l'humaniste: droite ou cursive, dite de Chancellerie (Cancelleresca).
Je me procurai chez Sennelier les matières précieuses nécessaires : poudre d'or et d'argent, gouaches à l'oeuf, aquarelles Rowney etc. (voir ci-dessous) sans compter les précieuses plumes calligraphiques Brause, de 2mm et de 5 mm. Hélas des déconvenues m'attendaient, dues à la perte d'un savoir-faire des grands fournisseurs de ces produits nobles. Si c)ela vous interesse, continuez la lecture sur le corps du billet..
De bas en haut : petits pains d'or (pur) et d'argent à la coquille. Mortier pour broyer les couleurs, pierre à encre et son bâton, brunissoir en agathe, boite de voyage Rowney contenant un réservoir d'eau et un godet, couleurs Rowney et Windsor et Newton, tempera à l'oeuf Sennelier.
Ce matériel est de qualité bien inférieure, de son équivalent d'il y a trente ans. Par exemple la boite portative d'aquarelles Rowney est d'une finition grossière à la peinture, alors qu'elle était jadis cuite au four. Les temperas de Musii à l'oeuf et au miel, utilisées pour retoucher et retoucher les tableaux anciens, ont disparu, il est impossible de s'en procurer et la liste est illimitée.
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Tuesday, 10 February 2009
CHRONIQUE
Rêves
1
Le jet s'ébranle en direction de G***. L'hôtesse distraite ne s'en est pas aperçue. Cris effarouchés, l'avion parcourt lentement la piste, pourra-t-on faire demi-tour? Toutes ses affaires sont restées au sol!
2
La Place Vandôme est envahie par des guerilleros manifestant pour faire libérer des prisonniers. Brouhaha, les forces de l'ordre ont bloqué la place, bruit, clameurs, bombes fumigènes. Je me trouve bloqué dans le charivari et ne puis me dégager. Mon fils, inquiet, m'attend chez nous. Comment le prévenir? Je décide de rentrer à pied mais aux approches de la maison je n'ose pas l'appeler à cette heure-ci. Ce n'est pas convenable et sa femme pourrait me le reprocher. Paris sent la révolution, comme un avant-goût de violences imminentes.
3
Invitation formelle chez les G***. Ambiance mortellement ennuyeuse, tous parlent allemand ou seulement allemand. On distribue les chocolats et, horreur! il en manque dans mon paquet-cadeau! Ma femme sera furieuse et j'apprehende de me retrouver seul avec elle : pourquoi manque-t-il des chocolats? Et justement alors qu'elle invite ses amis et sa famille? Je rève d'une montagne de chocolats, qu'alors j'adorais et qui me font aujourd'hui horreur.
4
Une ère indéterminée, bien après la notre. Je suis introduit dans un centre hospitalier ultra-moderne. Longs couloirs moulurés crème, vastes baies teintées sombres donnant sur un parc magnifique très ombragé par d'immenses arbres feuillus. Je cherche en vain le nom inscrit sur ma convocation: Dr. W**** et j'ouvre au hasard des portes donnant sur des espèces de scanners. Une vision d'horreur me saisit. Dans une des pièces se tordent des corps hybrides, que l'on croirait tirés des Chapman. (Artistes anglais spécialisés dans des visions d'horreur composés de membres humains assemblés n'importe comment).
Jake and Dinos Chapman. Piggy Back , 1997. Sotheby's London 22 Juin 2006, Lot 339..
Dans une autre pièce, dans un lit aux hauts grillages des couples bien formés, harmonieux et enlacés, pleurent en me fixant d'un regard suppliant, comme quémandant je ne sais quelle aide. J'avoue ne pas être rassuré en suivant le médecin-chercheur qui me conduit sous une machine. Mais en fin de compte je sors de là guéri.
A la sortie du centre médical je me dirige vers la ville, la vie quotidienne, banale, et en regardant les affiches, je découvre que je viens de sortir d'un film à succès que j'ai pris pour la réalité. La Ville est étonamment propre, ombragée des mêmes arbres touffus et majestueux que l'ensemble hospitalier. Ils dominent les bâtiments de verre et d'acier, aux allées luisantes et désertes.
5
La place des trois tilleuls. Elle est située sur un promontoire rocheux et se termine chez le voisin dont la demeure forme un éperon rocheux en forme de proue de nef. Ma maison est plus vaste mais la vue y est barrée par la muraille du voisin, percée par une porte espagnole.
Une Société de séminaires y a organisé une visite, car la maison a appartenu à un des grands peintres de l'école de Barbizon. Ils ont tous été convoqués pour égrener leurs souvenirs. Les voici : Corot, Manet, Monet, Van Gogh qui a donné ses couleurs éclatantes à la décoration de la demeure. Celle-ci est vraiment minuscule, plus encore que celle de Ravel à Montfort L'Amaury mais non pas de ce gris triste mais celui des corbaux de Kurosawa, luminescent. phosphorescent,
Non seulement elle est minuscule la maison, mais bien que pitttoresque elle est tapissée de toiles d'araignée. Je me demande comment l'habitant a pu transporter toutes ses huiles, même de taille moyenne, de l'entrée au séjour. Je contemple la chambre à coucher-living-room pauvrement meublée. Sur la chaise de Van Gogh un journal est plié en quatre et au chevet, quelques livres defraîchis. On me dit que le maître des lieux vit seul.
La terrasse pavée contient une table de cuisine prolongée par une petite vigne et donnant sur une vue Est, Sud et Ouest. Au loin des collines distantes verdoient et à gauche la lisière du village. On ne se lasserait pas de contempler vignes et bocages aux formes douces. On se presse dans la terrasse, on disserte sur les dialogues qui s'y sont tenus entre tant de grands peintres, les premiers de l'école de Fontainebleau et les suivants venus évoquer leur souvenir : Derain, Dufy, Marquet et Bonnard.
6
Ma soeur n'aime pas la sonorité de ma chaîne de haute fidélité, elle a entendu mieux et plus agréable, moins bruyant surtout et plus évocateur d'un vrai concert. Je suis vexé car j'ai beaucoup investi dans mon installation et j'appelle mon technicien.
7
P***, mon premier ami d'enfance tant admiré vient de faire son apparition. Il s'est souvenu de moi. Il est toujours aussi beau, aussi solide, il n'a guère vieilli au cours de ces années d'absence. Je lui propose de prendre une douche avec moi, rapidement, car ma soeur viendra dans une dizaine de minutes. Il accepte. J'ôte mon maillot de corps souillé de sang, je contemple mon corps et je pleure sur ce que je suis devenu : un amas difforme de chairs atrophiées et boursouflées, sac dolent fait pour la souffrance.
Cet appel à la compassion est bien fait pour conjurer tout sous-entendu gênant. J'ai peur des cancans. Lui , il est aussi naturel que d'habitude comme du temps de nos années d'étudiant. School days, sunnydays.
Il s'est séché et rhabillé, ma soeur le fait passer au salon d'où le grand piano de concert a disparu car on repeint tout l'appartement du Vème étage et on refait le plancher. Il n'en subsiste que des traces.
L'immeuble est luxueusement bordé de terrasses de travertin et de glace soutenues par des ferronneries de style directoire. Il donne directement sur la plage : bande de grève calliouteuse et , à l'infini, l'horizon de nacre moirée.
8
Dekkeroff le Président de Philips me reçoit pour examiner ma candidature; j'essaie de faire bonne figure. Savez-vous jeune homme que nous produisons 90% des rasoirs électriques dans le monde? Son visage poupin couleur roast beef ressemble à un Testut, ni drole ni sympa. Je finis par lui dire qu'il m'est sympathique et que c'est la raison pour laquelle
j'aimerais travailler aveclui. Je l'accompagne au marché d'Eindhoven et je lui demande s'il a mon adresse. Il me répond oui ! à deux reprises. Marina s'esclaffe c'est cet antipathique de Boulakia qui me l'a présenté. Il veut marier sa nièce avec Dekkeroff.
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Wednesday, 28 May 2008
CHRONIQUE
L'Océan
L'océan, ce mot est on ne peut plus évocateur pour moi. Tout d'abord parce que ma convalescence s'est déroulée à Houlgate dans une pension de famille, verslafinde l'hiver. Jai passé mes journées à parcourir la grève déserte, traversée par des vents hurlants répondant à une mer démontée et un à ciel bouleversé et menaçant.
Et voilà que j'entends la voix des puristes : Houlgate; c'est la Manche, ce minable bras de mer qui sépare l'ïle du continent. Quelle exagération.Où est-ce un embellissement de la réalité?
Voilà ce que je leur réponds, à ces esprits plats.
J'ai passé du temps au bord de la mer d'Acapulco, ou celle d'Estoril et de Madère. On ne voyait qu'étendue grisâtre ou d'un noir opaque, calme comme une surface huileuse. Elle ressemblait à tout sauf à un bord d'océan, tel que le poète, ou le promeneur doté du sens du concret l'imaginent. Hé oui. Ce bord de Manche ressemblait davantage à l'image qu'on se fait de l'Océan qu'à celui des géographes.
L'Océan est également précieux pour moi, car c'est la matrice de L'Entretien. Que ceux qui s'interessent à sa genèse continuent à parcourir ce billet.
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Tuesday, 25 December 2007
I cannot touch it
I may not see it
I do not know it
Oscar Wilde Texte révisé 2ème correction
HORS DES SENTIERS BATTUS
1. Le Labyrinthe
Un soir,
étourdi par le vacarme de la solitude, échauffé par la canicule d'un feu intérieur, je résolus de fuir rmon pays natal, ma maison, le foyer où s'entassaient tant de néfastes souvenirs, parasites vénimeux qui rongent l'âme et étouffent l'espoir.
J'errai d'abord dans les rues mortes. Sur le pas des formes se montraient des silhouettes familières. Plus loin je vis un riche édifice que l'on eût pris tout d'abord pour un temple. C'était un marché, le plus vaste et le mieux achalandé du monde. Je crois que tout ce que l'on peut y concevoir y était exposé. Les échanges les plus disparates s'y tenaient, on y troquait la richesse contre l'honneur,
la santé contre la richesse, la puissance contre la santé; le génie contre la puissance; mais l'on y vendait surtout des mots.
Il y en avait de gracieux, de consolants, de nobles, de puissants. Et par leur propre force, ces mots agissaient, influençaient les puissants et la plèbe.
Cependant ces traficants me paraissant d'un naturel ennuyeux, je m'aventurai dans d'autres régions. Là, point de mots à vendre mais des caresses, des jouissances. Des homme de toute condition et de tous âges s'y pressaient. On achetait de l'affection poour solitaire; de mets pour rassasier, de la vanité pour humiliés.
Je n'avais pour tout bien, que mon corps et mon âme. Mais l'on me fit remarquer que le premier était peu exercé à remplir sa fonction auprès d'amateurs éventuels. J'étais inconsommable. Quant à la seconde, était-elle bien cultivée? Auquel cas elle trouverait un acquéreur qui viendraient recueillir les mots quelle pourrait produire.
Hélas, dis-je; mon âme s'est dépouillée de tous mots et souvenirs utiles, elle les a abandonnés dans un foyer en ruines et ce qui en reste est peu de chose
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