Thursday, 11 June 2009
CHRONIQUE
RECTO-VERSO
L’approche spécialisée ne montre que le petit bout de la lorgnette, elle donne une fausse sécurité au spécialiste, et à ceux qui s’y fient bien naïvement. Or la nature – ou disons plutôt le réel – sont un, un indivisible. Le dermatologue qui va me prescrire une crème pour mes démangeaisons, ignore qu’elles sont dues à une dégénérescence des neurones à l’extrémité de la peau La cause en est neurologique, mais elle-même est liée à son tour à une défaillance hépatique…
Edgar Morin, avait une jolie formule, bien dans sa manière : le tout est supérieur aux parties et les parties sont supérieures au tout. Un bon exemple en est la tapisserie. On ne peut la réduire à son carton, d’une pureté louable, ce serait passer sous silence le travail est le choix des fils de couleur et de la laine.
J’ai réfléchi à ce problème lancinant de l’abandon du jeune homme. En vain à cause de ses paradoxes : tantôt semblant affectionné, tantôt totalement indifférent à mon sort.
En suivant mon raisonnement, je compris qu’aux deux faces du comportement du jeune homme correspondent deux niveaux de perception.
Le premier, RECTO, est immédiat et blessant, révoltant même. Le second, VERSO est antinomique et met à jour des rassorts beaucoup plus vastes assortis d’accidents imprévisibles et cumulés.
RECTO
Tous mes amis à l’unisson, mon fils en tête, me dissuadent fermement de re cela m’a semblé évident. Je ne fais qu’aggraver mon humiliation en essayant de le contacter. Je dois faire un lâcher prise.
Et puis, on ne se refait pas lorsqu’on n’a pas envie de se refaire ! . Je ne suis pas homme à quitter le champ de bataille. Je veux savoir pourquoi il se conduit de cette façon. Hier matin j’ai donc envoyé un dernier SMS. A ma grande surprise, il répondit aussitôt et le voici chez moi, une heure plus tard ! . Je me suis alors aperçu qu’il n’avait reçu aucun de SMS jusqu’à aujourd’hui. Je compris que j’avais mal lancé mes SMS, à l’exception d’aujourd’hui, où j’ai pris conscience que ce n’est pas parce que mon portable affichait « envoyé » alors qu’il avait à peine commencé. J’ai alors envoyé correctement le SMS. Il eut réponse à tout avec le plus grand calme.
Il me dit qu’il me croyait à Deauville et qu’ayant contracté une grippe il avait scrupule à me la passer. Son attitude était d’un sang froid total, bien que tendu.
Lorsque je lui demandai « que dois-je dire en haut lieu ? »il me répondit
« -la vérité .
-Mais quelle est la vérité ?
- C’est ce que vous ressentez «
A la fin nous nous expliquâmes et il me sembla heureux que je ne lui tienne pas rigueur. Car je lui déclarai que lorsqu’on aime à ce point, on ne pense pas à son ego, à sa dignité, au qu’on dira-t-on. On redevient humble comme le moineau déplumé qui m’habite.
Il eut alors une réaction qui me stupéfia : lui l’orgueilleux, l’inatteignable, l’intraitable, au moment de me quitter, me saisit affectueusement par les épaules et me fit un hug. Son visage était radieux et souriant et il paraissait content de m’avoir revu, et de la manière dont je réagis.
VERSO
Ce fut une série de coïncidences qui nous conduisit à un tel éloignement. Bien. Il est sûr qu’il aurait dû me donner de ses nouvelles, et prendre des miennes ; et j’essaie de lui trouver des excuses. Je donne ainsi raison aux sceptiques qui me disent que ce jeu durera toujours. Les montagnes russes : tantôt il est odieux, tantôt le voici changé… Et je tombe à chaque fois dans le panneau !
CHRONIQUE
LE RAT ET LE NAVIRE
On ne peut faire crédit au capitaine dont le vaisseau est en train de sombrer.
Hier ce fut une journée noire pour moi, je connus, ce qui ne m'est pas coutumier, un effondrement total. Les digues ayant cédé, les larmes succédèrent aux larmes, pour adopter la frappante expression de Goethe dans son admirable dédicace de Faust II.
Nul doute que la trahison du jeune homme provoqua en moi un tel effondrement. Tous mes amis - qui connaissent son identité - ont été indignés et m'ont pressé de lâcher prise. De l'ignorer dorénavant. Il ne mérite pas, disent-il et ils ont raison, que je souffre ainsi à cause de lui. J'avoue que mon estime pour lui, qui jusqu'ici était dissociée de son comportement envers moi, s'est évaporée et qu'il m'apparaît actuellement comme un gamin égoïste, sans classe ni manières, un fils à papa qui se fait la grosse tête, ce que son propre père dit avec élégance : " il vous aime beaucoup, mais il est jeune. Il a besoin de mûrir"
Mais on ne se refait pas ! De ma vie, je n'ai jamais lâché prise. Comme un chien accroché à son os, je n'ai jamais abandonné une lutte, je me suis toujours battu jusqu'à l'extrême limite de mes forces, et quelques fois ... au delà !
Je viens d'apprendre que le jeune homme se trouvait hier à Paris, et qu'il est encore présent aujourd'hui dans la capitale. Je lui ai adressé un SMS d'urgence où je fais allusion aux désagréments divers qu'entraîne son hostilité; à la fois pour lui et pour sa famille. Certes, je lutterai aussi pour les atténuer, par égard pour son père et de sa famille qui est aussi la mienne.
Mais mon sang n'a fait qu'un tour devant tant d'affronts. Puis je me suis souvenu des propos que j'ai mis dans sa bouche, hier, par jeu.
Ils contiennent hélas une bonne part de réalité. Je me sens, je me vois, je me considère comme vivant encore jusqu'à cent ans ce qui eût été le cas sans la fatalité qui me poussa à me faire opérer le jour de la grève du sang. la chance, nous la rencontrons bien souvent dans nos échecs. Echec d'obtenir une place de retour dans l'Airbus fatal, échec bienvenu si j'avais attendu la fin de la grève pour me faire opérer. Or, les dés étant jetés, il faut me voir avec les yeux des autres. Si j'excepte ceux qui m'aiment : les gens de Lille, Sandrine, Tatiana, Olaf et Socrate, sans compter évidemment ma propre soeur, pour le reste il n'y a que des rapports d'intérêt. et quel intérêt que peut présenter un vieillard malade, condamné à brève échéance, un mort en puissance?
C'est un tigre édenté aux griffes émoussées. Il ne saurait faire de mal à personne, donc on peut le bafouer, l'ignorer, le moquer sans complexe. Lorsque j'étais jeune et férocement ambitieux, je disais cyniquement d'un vieil ennemi : patientes, tu as un avantage sur lui : dans quelques temps il cessera de te faire de l'ombre car le temps est ton allié : tu auras gagné parce que tu lui survivras ! Un corps en faillite c'est irrattrapable. Non. N'investissez pas sur moi. Antonio a pu retrouver une partie de ses bateaux, Olaf peut connaître à nouveau la fortune si la conjoncture s'oriente autrement...
Mais debout, lâche voyageur, tu es environné d'amour et de respect de ceux qui comptent en ce monde, tu ès en pleine forme physique, entouré et choyé, le printemps a fleuri pour toi, les pivoines de Bagatelle ont enchanté ton coeur, et tu voudrais abandonner la lutte? Sors dans la plus douce nuit de l'année, puise l'énergie vitale dans les esprits qui entrent en toi par le truchement de ton Steinway de concert, splendide cygne noir dont tu as tant rêvé pendant ta jeunesse. Ne permets à personne de douter de ta survie pendant des nombreuses années encore. Ce n'est pas mentir car pour toi une heure vaut une demi-journée de vivant.
Un de mes clients a tout pour être heureux, mais il m'a avoué que plutôt que le Paradis, ce sont les grises limbes du purgatoire qui l'habitent. Oui. Continue de te battre, de t'indigner, de souffrir par ceux que tu aimes, car c'est cela qu'être vivant.
Tuesday, 9 June 2009
CHRONIQUE
BASSES EAUX
Il y a longtemps que les chiffres de fréquentation n'ont été aussi bas que maintenant. Alors que le nombre de visites ne descendait jamais au dessous de 600, on atteint des creux de 250 visiteurs. Certes le taux de fréquentation n'a jamais été un objectif, même secondaire, de ce blog, sinon il n'eût pas existé, mais une telle désaffection ne peut être due au hasard. A mon avis, une des raisons est que pour qui ne prend que les derniers billets, il semble ne rien se passer. Mais la réalité est toute autre, j'ai consacré beaucoup de temps et d'efforts à développer les billets de ce dernier mois. En particulier, l'album de famille a été complété par de très nombreuses photos, mais on ne peut le consulter que dans le billet du 26 mai 2009. Qui va penser à regarder le billet du 26 mai? On peut on dire autant de toutes les images intercalées dans les billets, elles avaient été inaccessibles en temps utile à cause d'erreurs de manoeuvre de ma part et elles ont affecté toutes les images envoyées par e-mail, ou provenant du cool-pix. Michel m'a aidé avec son talent coutumier à déceler l'origine de la fausse manoeuvre et on a rectifié les erreurs mais pour les internautes c'était déjà trop tard. Enfin, bien des textes qui avaient été avalés par les pannes du serveur orange, ont été refaits sur Bouygues et sont à nouveaux accessibles.
Un travail colossal a été accompli par Michel à ses moments perdus : l'impression de tout le blog en fascicules mensuels. Une fois reliés il me permettront à tête reposée, crayon rouge à la main de nettoyer et de corriger les billets. Les fascicules ainsi revus serviront à re-contrôler billet par billet la mise en page, l'orthographe, les lacunes, et les erreurs diverses qui émaillent ma prose. On réimprimera alors dans une version définitive et sur un disque la version numérisée, pour la BNF et les quelques amis intéressés, la totalité du blog.
SOIRÉE D'EXCEPTION
Je me suis quelque peu plaint de la solitude glacée qui m'a toujours suivi, sans que nul ne s'en aperçoive. Meis elle a disparu depuis que je suis tombé gravement malade. Mon cher ami et complice Arnaud Gobet est notamment venu me rendre une visite amicale avant d'entreprendre un important voyage.
Une convention tacite lui destine tous les manuscrits de mes ouvrages. J'ai ainsi déniché un fascicule illustré sur la psychologie de l'art qui m'a séduit par une profusion d'illustrations en couleur. Je les ai ajoutés au lot qui lui revient mais l'ai prié de m'en faire parvenir une photocopie aussitôt que possible. Je me suis permis de lui donner quelques conseils dont certains impraticables compte tenu de la culture française fondée sur l'opposition patron ouvriers, et dont les deux mamelles sont la jalousie(pour ceux d'en haut), le mépris (pour ceux d'en bas) à quoi il faut ajouter (des peaux de banane pour ceux du même niveau que vous).// Néanmoins ce qui marche partout et toujours, est la présence fréquente et ALÉATOIRE du patron auprès les travailleurs de la base, en court-circuitant toute la hiérarchie. En feuilletant les deux "journal de Printemps" j'ai découvert deux poèmes chinois antinomiques qui ont pesé beaucoup sur mon développement.
Sacha Genco m'a emmené au Tze Yang où j'ai dégusté un canard laqué exquis. Sacha, comme à l'accoutumée, a été passionnant et sa carrière d'avocat de haut vol, l'alimente continuellement en histoires qui dépassent la fiction. J'ai lu son billet HOME, mais je serais bien en peine d'ajouter d'autres commentaires que mon adhésion sur le fond du message, et l'admiration que je porte à la concision de son style, bien plus élégant que le mien.
POÈMES CHINOIS
Voici le texte des poèmes qui m'ont tant impressionné et que j'ai retrouvé respectivement dans le deuxième et le premier "journal de Printemps"
PRINTEMPS
Le vent jette dans ma chambre, des fleurs de pêcher qui ressemblent à des papillons roses, ivres d’avoir trop butiné. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Comme ces fleurs,, mes pensées, lourdes de tristesse, jonchent le papier où je voulais écrire un poème à la gloire du printemps. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Je respire sans joie le parfum des pruniers. Arrive ô douce nuit, ô douce amie, et que ma peine s’endorme dans tes bras légers ! ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
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Tchou-Jo-Su (1408-1459).
DANS UNE HOTELLERIE
Qui me connaît ici ? Personne. Une lampe est ma seule compagne. Un grincement de porte est la seule voix que j’entends. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
L’année se termine. J’ai parcouru mille lieues et je suis encore loin de mon pays. Accourez me soucis ! Accourez mes peines ! Je vais passer en revue toute ma vie.¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
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Mes cheveux grisonnent, mon visage est ridé. Comme il va me trouver beau, le Printemps qui commence demain ! ¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Les années écoulées n’ont pas cessé de me meurtrir le cœur. Quels tourments lui réserve l’année nouvelle ? ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
J’ai laissé en route maints compagnons de ma jeunesse. Ceux-là du moins, ne souffrent plus. Ceux-là ont trouvé le repos.¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Mais, debout lâche voyageur ! Le printemps revient pour toi, les roses vont s’épanouir pour toi, et tu voudrais mourir ? Sors dans la plus suave nuit de l’année… Il pleut des fleurs de pruniers qui sècheront tes larmes d’enfant. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Tai-Chou-Louen (942-981)
Les deux poèmes illustrent à mon avis le balancement diastole-systole des grands solitaires repliés sur eux mêmes ou qui le cachent. Le premier correspond au mode mineur, celui des lilas et des glycines, ce violet délicat et musical, bien différent du mauve violent du lilas d'été. Le second poème commence en violet mineur, mais module à la fin en un radieux orangé majeur, tonique et volontariste.
C'est pour moi une occasion de vous faire sentir la différence avec les Haï Kaï japonais, impassibles dans leur concision :
Là avec une femme
j'ai nagé
dans l'onde nulle trace
Ce qui frappe dans la traduction de Franz Toussaint de La Flüte de Jade (Piazza 1920, ed. sur japon impérial) est le côté intensément subjectif, presque post romantiques de tous les poèmes. On comprend dès lors que Mahler ait été tenté d'en faire le scénario du Chant de la Terre .
Lire ma journée dans le corps du blog (continuer à lire).
Continuer à lire "Le journal du 10 juin 2009"
Monday, 8 June 2009
CHRONIQUE
NOUVEAU REGARD SUR BEETHOVEN
Je viens d'arriver à Paris sous une pluie battante. Il était temps de quitter Deauville, le temps que cela se remette au beau. J'ai téléphoné au Professeur Pol qui ne répond pas. Cela me donne au moins un sursis mental, j'ai tellement l'illusion d'être en parfaite santé, que cela en est troublant, oeil du cyclone. Socrate m'a appelé comme chaque jour. Kimyasu Tatsuno, le conservateur de l'ex-musée du stylo, me poursuit avec les détails des transactions. C'est un compliqué, un tatillon sans précision et je n'ai pas besoin de cela en ce moment.
Je me suis précipité sur ma chaîne et j'ai écouté l'op 127, (le XIIème quatuor) et j'ai été rassuré sur l'état de mes oreilles. C'était mon coucou de Deauville qui trahissait la musique, et je ne crois pas que le quatuor Végh améliorât la clarté de l'audition. J'ai trouvé à Paris, traînant dans ma discothèque, une excellente édition des derniers quatuors, que je vous recommande. Elle est prise live par le quatuor Berg, l'héritier de la tradition allemande fondée par Schuppanzig qui créa la majeure partie des quatuors de Beethoven.
Il faut cependant avouer, que l'extrême complexité de la tessiture polyphonique, rend bien difficile l'écoute du thème du dernier mouvement, celui qui rappelle la IXème Symphonie. Cette troisième manière de Beethoven, d'où toute prise en compte des possibilités des instrumentistes et des choeurs est absente, le compositeur, muré dans sa solitude, est obligé de concevoir mentalement ses structures et de les projeter dans le futur; La logique l'emporte sur la qualité sonore, et les artistes subissent sa loi cruelle de laquelle ils sont étrangers. Des œuvres inhumaines verront le jour, dont la dernière sonate. Dans celle-ci on trouve des passages incompréhensibles, même pour Arthur Schnabel qui se contente pour toute remarque de répondre par un point d'exclamation, pour tout commentaire. Je pense notamment à des accents non compris au premier mouvement, mais surtout au battement oscillant à période variable. Les octaves vibrantes sont regroupées en cellules d'une longueur qui semble arbitraire et dont nul ne connnaît la signification.
Toutes ces considérations m'ont donné envie de rejouer la Sonate op.111, que j'ai interprété pendant deux décennies. Je me suis trouvé engagé dans un combat de titans. Il faut en dépit de de la rage qui déferle, garder le contrôle de la polyphonie à trois voix. Je ne m'étais jamais senti partie prenante, comme lors de cette dernière approche. J'enrage cependant car mes doigts peinent à se souvenir de tous les détails, et c'est la pulpe des doigts, et non la vue de la partition, ni l'oreille, qui détiennent le souvenir.
Sunday, 7 June 2009
CHRONIQUE
DU LOINTAIN
Ce Dimanche a été bien solitaire : pas de visites à cause des défections dont j'ai parlé, deux coups de téléphones du lointain : Tatiana appelle du Japon, où elle va visiter sur mes suggestions les musées du Mingei, Alexandre (un autre!) Mulliez, fils d'Arnaud et petit-fils de Gérard, le fondateur appelle d'Argentine. Je le considère un peu comme mon petit fils adoptif, mais cela n'a rien à voir avec le sentiment qui me lie à l'autre Alexandre, fils de Sergei Pugachev. Avec Alexandre Mulliez, considérablement plus juvénile, plus spontané, plus transparent, le coeur sur la main, je suis à l'aise. Je le vois fort bien devenir plus tard le patron d'Auchan, et le successeur de son grand-père car il a du caractère, et une pulsion intérieure puissante. Et pour lui qui un pur-sang, de la race de ceux qui ont du feu dans les veines., de pourrait être une vocation familiale. Il pourrait ainsi comme d'autres membres de la tribu lilloise, explorer de nouvelles pistes et fonder sa propre entreprise au sein de la galaxie. Mais que de discipline, que de ténacité, faudra-t-il pour en faire un homme. digne de ce nom, possédant la dose nécessaire d'humilié et d'acceptation des critiques.
Quelques années seulement séparent les deux Alexandre, mais des décennies en ce qui concerne la maturité. N'oublions pas que ce dernier est déjà père de deux petites filles, a mené à bien en Russie un très important programme immobilier et par son travail acharné s'est rendu indispensable à son père. Mais son ego monstrueux est placé tout autrement. Il ne supporte pas de devoir quoi que ce soit à qui que ce soit, et veut toujours agir seul, sans pressions, quitte à nier l'aide qu'on a pu lui apporter. Cet ego le rend inhumain, glacial, et la capacité de séduction et de transformation caméléonesque dont il est capable, couvrent les glaces de l'enfer d'un glacis de naïveté charmante. Par ailleurs il est très respectueux de ceux qui à la base, travaillent dans l'ombre et entretient la plus grande méfiance à l'égard des diplômés prétentieux. Cette qualité en fait un grand entrepreneur moderne.
Sandrine nous a téléphoné à Marina et à moi, de l'île de Paros en Grèce. Elle occupe une suite dans le meilleur hôtel de l'endroit et elle est ravie. J'aimerai tant visiter les îles Grecques avant de mourir, mais c'est un rêve qui ne sera jamais exaucé.
Musée du stylo et de l'écriture
Vous savez que j'ai très envie d'acquérir une magnifique collection de stylos Waterman, les plus rares et les plus précieux. Je pourrai ainsi faire revivre le musée du Stylo sur une base thématique simple: tous les ans présenter le parcours complet de la production d'un grand constructeur, mais Schaeffer est moribond, Wahl-Eversharp, Conklin, ont disparu, Montblanc inaccessible, Parker dispersé, il ne reste que deux figures historiques dont on peut acquérir la production totale : Omas et Waterman.
Mon fils et mon entourage sont radicalement opposés à cette acquisition en temps de récession, alors qu'il vaut mieux se réserver pour des achats plus culturels. Ils ont sûrement raison. La seule possibilité envisageable est un doublement de la subvention versée au musée du stylo par Waterman et par Pilot. Subvention qui n'a jamais été réactualisée depuis dix ans, ce qui se justifiait étant donné le vol des principales pièces. Voici un cas que je puis d'autant moins résoudre, que je suis dans l'incertitude de mon sort. Il est évident qu'une telle revanche sur cette perte n'aurait de sens que si je suis vivant dans des conditions acceptables pendant une bonne année.
Photo de famille
J'ai eu la joie de recevoir une magnifique photo de la famille d'Henri Mathias et de sa chère épouse Anita, une fan de notre blog.. Elle représente pour moi le modèle de la famille idéale, telle qu'on n'en trouve que dans la province des villes du Nord. Il suffit de jeter un coup d'oeil sur cette photo, pour se trouver moral remonté, après la description des fausses familles américaines basées sur le pouvoir, l'argent et le sexe.
Deux quatuors de Beethoven
Ce soir je me trouvais bien seul, alors j'ai écouté le splendide quatuor N°12, op.127. Beethoven l'écrivit dans le prolongement de la IXème Symphonie, et ce premier quatuor de la dernière période, est de proportions monumentales. Malheureusement j'ai beaucoup peiné à entendre toutes les notes. Trois hypothèses :
1. l'enregistrement et l' exécution sont confus,
2. mon installation vieille de décennies est morte
.3. Ma grand-mère était sourde comme un pot, mon père, comme Beethoven, il était normal que mon ouïe soit affectée par cette tare.
Et effectivement J'ai perdu une bonne partie de mes fréquences aiguës, ce qui est très gênant, car ce sont elles qui colorent la sonorité, donnent vie aux cordes et font entendre les sons cristallins du triangle et du carillon, ce qui me manque terriblement. Demain en arrivant à Paris, je mettrai sur ma chaîne les quatuors que je viens d'écouter, par le quatuor Amadeus ou tout autre bonne version.
CHRONIQUE
COULEUVRES ET LAPINS
Ce Dimanche, je devais recevoir trois visites :
Alexandre Del Valle, un courageux et talentueux spécialiste de l'Islam passionné par l'équilibre des forces et des idéologies qui broient les populations,
Pierre Seznek un ambitieux qui cherche frénétiquement à étendre son réseau de relations en Russie et son amie. Sezneck chante magnifiquement et a le don rare d'attirer à lui les plus somptueuses - et admirables - créatures. Sa dernière amie allie une beauté éblouissante à une vive intelligence et un charme irrésistible. En définitive, elle s'est décommandée, puis hier au dernier moment cela a été le tour de Pierre lui-même. Des lapins...
Cette semaine, le jeune homme dont il a été beaucoup question, dans ces derniers billets, m'a posé, lui, des lapins téléphoniques. Cela va plus loin, d'ailleurs car il s'est froidement assuré que je ne pourrai me dégager de son emprise, en me tendant un piège, puis en me faisant avaler des couleuvres. J'en ai beaucoup souffert, et il le sait.
C'est la même attitude méprisante qui, par mimétisme sans doute, affecte mes relations avec une de ses employées les plus efficaces, que j'ai pourtant aidé de mon mieux auprès de son patron. J'avouerai que je n'en fais pas grand cas, car cela dissipe les illusions que je pouvais nourrir sur cette femme intelligente qui s'est révélée une arriviste au petit pied.
DERNIERE MINUTE
Alexandre del Valle n'est pas venu! L'erreur ne vient pas de lui, le pauvre, mais de Pierre Seznek, qui a omis de l'avertir qu'il ne pourrait pas le véhiculer dans sa voiture, et n'a pas non plus jugé bon de m'avertir. Enfin, il faut de tout pour faire un monde, et il faut se fier à l'infiabilité de certains individus. Comme le dit Brecht,
comme on fait son lit on se couche, si quelqu'un doit crever, c'est toi !
Marina et Jean-Marie, avaient préparé un succulent repas pour Del Valle et nous devrons le consommer demain, si nous sommes toujours à Deauville, car il est possible que je parte à Paris. C'est demain en effet que je saurai à quelle sauce je serai mangé et quand je serai opéré, si l'opération est possible. Ils se sont tous donné beaucoup de mal. Socrate voulait m'emmener en Israël où il connaît les meilleurs chirurgiens, mais ici, j'ai des attaches, je ne suis pas un numéro pour le Professeur Paul. Je me souviens que Sergei Pugatchev ne jurait que par un procédé censé vous guérir instantanément. Il suffisait d'appliquer le principe selon lequel une très forte fièvre tuait les virus. On vous portait le sang pendant quelques instants à une température non pas de 40° mais de 60°. Certes on avait de fortes chances d'y laisser la peau, mais avec la satisfaction de tuer cette saloperie de virus!
J'en serai quitte pour aller au cinéma, ce qui m'arrive une fois par an ! Dans le corps du billet j'ai l'intention de transférer mes impressions sur Stefan Zweig, dont je viens de lire "Les vingt quatre heures de la vie d'une femme".
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