CHRONIQUE
BASSES EAUX
Il y a longtemps que les chiffres de fréquentation n'ont été aussi bas que maintenant. Alors que le nombre de visites ne descendait jamais au dessous de 600, on atteint des creux de 250 visiteurs. Certes le taux de fréquentation n'a jamais été un objectif, même secondaire, de ce blog, sinon il n'eût pas existé, mais une telle désaffection ne peut être due au hasard. A mon avis, une des raisons est que pour qui ne prend que les derniers billets, il semble ne rien se passer. Mais la réalité est toute autre, j'ai consacré beaucoup de temps et d'efforts à développer les billets de ce dernier mois. En particulier, l'album de famille a été complété par de très nombreuses photos, mais on ne peut le consulter que dans le billet du 26 mai 2009. Qui va penser à regarder le billet du 26 mai? On peut on dire autant de toutes les images intercalées dans les billets, elles avaient été inaccessibles en temps utile à cause d'erreurs de manoeuvre de ma part et elles ont affecté toutes les images envoyées par e-mail, ou provenant du cool-pix. Michel m'a aidé avec son talent coutumier à déceler l'origine de la fausse manoeuvre et on a rectifié les erreurs mais pour les internautes c'était déjà trop tard. Enfin, bien des textes qui avaient été avalés par les pannes du serveur orange, ont été refaits sur Bouygues et sont à nouveaux accessibles.
Un travail colossal a été accompli par Michel à ses moments perdus : l'impression de tout le blog en fascicules mensuels. Une fois reliés il me permettront à tête reposée, crayon rouge à la main de nettoyer et de corriger les billets. Les fascicules ainsi revus serviront à re-contrôler billet par billet la mise en page, l'orthographe, les lacunes, et les erreurs diverses qui émaillent ma prose. On réimprimera alors dans une version définitive et sur un disque la version numérisée, pour la BNF et les quelques amis intéressés, la totalité du blog.
SOIRÉE D'EXCEPTION
Je me suis quelque peu plaint de la solitude glacée qui m'a toujours suivi, sans que nul ne s'en aperçoive. Meis elle a disparu depuis que je suis tombé gravement malade. Mon cher ami et complice Arnaud Gobet est notamment venu me rendre une visite amicale avant d'entreprendre un important voyage.
Une convention tacite lui destine tous les manuscrits de mes ouvrages. J'ai ainsi déniché un fascicule illustré sur la psychologie de l'art qui m'a séduit par une profusion d'illustrations en couleur. Je les ai ajoutés au lot qui lui revient mais l'ai prié de m'en faire parvenir une photocopie aussitôt que possible. Je me suis permis de lui donner quelques conseils dont certains impraticables compte tenu de la culture française fondée sur l'opposition patron ouvriers, et dont les deux mamelles sont la jalousie(pour ceux d'en haut), le mépris (pour ceux d'en bas) à quoi il faut ajouter (des peaux de banane pour ceux du même niveau que vous).// Néanmoins ce qui marche partout et toujours, est la présence fréquente et ALÉATOIRE du patron auprès les travailleurs de la base, en court-circuitant toute la hiérarchie. En feuilletant les deux "journal de Printemps" j'ai découvert deux poèmes chinois antinomiques qui ont pesé beaucoup sur mon développement.
Sacha Genco m'a emmené au Tze Yang où j'ai dégusté un canard laqué exquis. Sacha, comme à l'accoutumée, a été passionnant et sa carrière d'avocat de haut vol, l'alimente continuellement en histoires qui dépassent la fiction. J'ai lu son billet HOME, mais je serais bien en peine d'ajouter d'autres commentaires que mon adhésion sur le fond du message, et l'admiration que je porte à la concision de son style, bien plus élégant que le mien.
POÈMES CHINOIS
Voici le texte des poèmes qui m'ont tant impressionné et que j'ai retrouvé respectivement dans le deuxième et le premier "journal de Printemps"
PRINTEMPS
Le vent jette dans ma chambre, des fleurs de pêcher qui ressemblent à des papillons roses, ivres d’avoir trop butiné. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Comme ces fleurs,, mes pensées, lourdes de tristesse, jonchent le papier où je voulais écrire un poème à la gloire du printemps. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Je respire sans joie le parfum des pruniers. Arrive ô douce nuit, ô douce amie, et que ma peine s’endorme dans tes bras légers ! ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
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Tchou-Jo-Su (1408-1459).
DANS UNE HOTELLERIE
Qui me connaît ici ? Personne. Une lampe est ma seule compagne. Un grincement de porte est la seule voix que j’entends. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
L’année se termine. J’ai parcouru mille lieues et je suis encore loin de mon pays. Accourez me soucis ! Accourez mes peines ! Je vais passer en revue toute ma vie.¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
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Mes cheveux grisonnent, mon visage est ridé. Comme il va me trouver beau, le Printemps qui commence demain ! ¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Les années écoulées n’ont pas cessé de me meurtrir le cœur. Quels tourments lui réserve l’année nouvelle ? ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
J’ai laissé en route maints compagnons de ma jeunesse. Ceux-là du moins, ne souffrent plus. Ceux-là ont trouvé le repos.¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Mais, debout lâche voyageur ! Le printemps revient pour toi, les roses vont s’épanouir pour toi, et tu voudrais mourir ? Sors dans la plus suave nuit de l’année… Il pleut des fleurs de pruniers qui sècheront tes larmes d’enfant. ¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤¤
Tai-Chou-Louen (942-981)
Les deux poèmes illustrent à mon avis le balancement diastole-systole des grands solitaires repliés sur eux mêmes ou qui le cachent. Le premier correspond au mode mineur, celui des lilas et des glycines, ce violet délicat et musical, bien différent du mauve violent du lilas d'été. Le second poème commence en violet mineur, mais module à la fin en un radieux orangé majeur, tonique et volontariste.
C'est pour moi une occasion de vous faire sentir la différence avec les Haï Kaï japonais, impassibles dans leur concision :
Là avec une femme
j'ai nagé
dans l'onde nulle trace
Ce qui frappe dans la traduction de Franz Toussaint de La Flüte de Jade (Piazza 1920, ed. sur japon impérial) est le côté intensément subjectif, presque post romantiques de tous les poèmes. On comprend dès lors que Mahler ait été tenté d'en faire le scénario du Chant de la Terre .
Lire ma journée dans le corps du blog (continuer à lire).
MA JOURNÉE
Pour la première fois depuis des années, j'avoue avoir cédé plus qu'à du découragement. Un véritable effondrement. Heureusement, comme s'il ressentait mon état, Olaf m'a longuement téléphoné de Vancouver (ou de quelque part dans le monde) pour me remonter le moral. Une telle sollicitude, un tel attachement, me touchent jusqu'au larmes et c'est chez lui, dans sa famille, que je veux avoir ma dernière demeure. Socrate Papadopoulos m'a également téléphoné comme il le fait chaque jour. Je lui dois également beaucoup. Mais je suis toujours meurtri, écoeuré au delà de toute expression par la trahison du jeune homme dont j'ai voulu taire le nom par égard envers sa famille dont je suis un membre rapporté et un peu auxiliaire.
Avant-hier nuit j'ai voulu à l'audition testé mes propositions sur Beethoven et sur Thomas Mann.
La version de référence de la fugue de l'Op.106 est l'enregistrement d'Arthur Schnabel, auteur de l'édition de travail. Il prend l'oeuvre à une vitesse démente, ce qui est nécessaire, et le résultat est que l'on n'entend qu'une impression d'ensemble, un mouvement giratoire, des hurlements de damnés, une explosion physiquement ressentie par tout le corps beaucoup plus que par les oreilles. C'est une expérience inouïe, terrifiante, digne des visions décrites par le bon Serenus Zeitblom, dans le Dr. Faustus de Thomas Mann. J'ai alors écouté la version la plus prestigieuse, celle d'un maître absolu au mieux de sa forme et dont la froideur coutumioère a fondu sous les ondes d'enthousiasme du public new yorkais. Il s'agit du concert donné en public, en 1055, au Carnegie Hall par Wilhelm Backhaus.
Hier, j'ai eu envie de jouer l'op 111, que je pratique depuis cinquante ans. La version de référence est celle de Backhaus qu'il faut absolument avoir dans sa discothèque.
Mais une cruelle déception m'attendait. J'eus l'impression que mes doigts ne reconnaissaient pas cette oeuvre familière. Ils tâtonnaient, peinait à retrouver les enchaînements, je reprenais en vain cent fois les accords brisés du Maestoso. Je finis par abandonner découragé.
Mais aujourd'hui, moulu, terrassé après la crise de désespoir qiui a marqué la journée d'aujourd'hui, ponctuée par des visites dans des laboratoires, hantée par l'humiliation subie par le jeune homme en qui j'avais placé tous mes espoirs, je me mis en guerre lasse au piano.
Et miracle,toute l'exposition coula de mes doigts touts naturellement, sans faute, mais ce n'était plus la même sonate. Pour oser une comparaison, jusqu'ici je nageais à la surface de l'eau relativement agitée, et j'entendais de magnifiques mélodies, de la musique, telle que je la reconnaissais dans toutes les versions. mais à présent je pratiquai la chasse sous-marine, je me trouvais pris entre deux eaux. Mais contrairement à ce que l'on peut maginer, ces profondeurs étaient le siège de tempêtes infiniment plus violentes qu'à la surface. Je me trouvais pris non pas les oreillesn assourdies par le fracas, mais tout mon corps, dans le maëlstrom. Brisé contre des récifs, luttant contre de la matière dense et mauvaise je finis par être rejeté sur le rivage comme une méduse échouée.
Fort de cette sensation nouvelle, je jouai ma sonate préférée de Mozart, celle en la mineur. Et le jeu avait changé aussi. J'utilisai toutes les ressources des deux pédales, afin de rendre l'expression sous-jacente. Le résultat me pârut exaltant. Les immenses chefs d'oeuvre, ont toujours quelque chose de nouveau et d'important à délivrer, ce sont des puits sans fond.
Après cela, je m'occupai de mon blog, fort bien imprimé pour le corriger. Comment voulez-vous après cela continuer à vous apitoyer sur vous-même? Debout, lâche voyaageur, le printemps s'épanouira pour toi, les pétales de prunier sècheront tes larmes d'enfant., et tu voudrais mourir?
Par jeu, je me glissai dans la tête du jeune homme.
"Il m'embête ce type bon il l'a appris des choses pas très utiles il atété avec moi au musée mais ce n'est pas du travail ça il s'est plu comme moi c'est ce que font tous les profs et les guides de musée et il en profite pour me persuader que je lui dois quelque chose il fax pourtant je le lui ai dit que je ne l'aimais pas qu'au mieux j'aimais bien l'avoir comme guide et puis il a beaucoup insisté pour que j'achète à prix d'or un appart qui ne valait pas la moitié de ce qu'il me poussait a payer que c'est à croire qu'avec sa soeur qui se donne soi disant un mal qu'on ne lui demande pas y touche une commission et tout ça c'est pas digne pour un vieillard decati qui a fini son temps et qu'y s'accroche à la vie pour enquiquiner les autres avec des crises sentimentales comme une jeune fille jalouse lui un vieux décrépi qui va mourir bientot et a quoi ça sert un mort en puissance ce n'est ni utile nidangereux a son âge il faut qu'il se range des voitures et qu'il laisse respirer et travailler les jeunes qui travaillent eux.Comme je suis poli et que je le ménage, je lui ai pas dit ça mais j'ai essayé de lui faire comprendre. L'autre jour, comme s'il avait un droit sur moi, il a été m'espionner et il m'attendait debout devant l'ascenseur pour me coincer. Il m'a posé des conditions et il a osé me demander de le retrouver à Deauville et que c'est son droit de me demander des explications pour l'en debarrasser j'ai dit oui je viendrai,et j'en ai déja marre. Il croit me faire un cadeau formidable en me donnant tous ses manuscrits comme s'il était un grand artiste, mais c'est un inconnu et ses manuscrits ça ne faut pas cent euros. La biblio nationale les accepte, forcément ça ne leur coûte rien. Je n'ai plus téléphoné et j'ai demandé à Caroline de ne pas répondre à ses appels, à mon père aussi."
Philippe Boudin m'a apporté un vêtement nô. très cher. Un motif en feuilles d'or sur soie au pattern d'écailles. Il doit être porté par une sorcière envieuse et jalouse. J'ai photocoopié un cataloque belge d'une superbe exposition sise en Balgique.
Bruno Lussato. 5h32 Jeudi 11 Juin 2009