Sunday, 8 July 2007
Le Départ, d'après le tryptique de Max Beckmann
Séquence XV de L'Entretien
La séparation fut déchirante.
Je fus comme dépouillé de ma propre peau, de ma propre chair, de mes propres yeux. Ces yeux qui ne surent pas déceler la menace mortelle sous la trompeuse familiarité des apparences.
N'est-ce donc pas cette familiarité qui polissait le piston broyeur, lubrifiant sa pénétration néfaste, trois temps en avant, deux temps en arrière? Familiarité complice du viol des masses.
Et mes oreilles donc?
Anesthésiée était ma volonté par les paroles atrophiantes, les chuchotements flatteurs, les mots de compréhension et d'espoir. Leur ronronnement hypnotique neutralisait les vociférations des démagogues.
Adieu donc mes oreilles, vous serez remplacées.Bientôt les sons aigres de l'étranger me blesseront le coeur.
Mon coeur!
Ne devrais-je pas le laisser derrière moi, avec ceux qu'il me faut quitter, objets intenses de ma douleur?
Je les revois, les yeux secs, incompréhensifs et hostiles. Ils me regardèrent m'éloigner, mendiant de la peur, refusant les richesses de leur enracinement. Ils s'enfonçaient voluptueusement dans les sables mouvants. Ils savaient, mais incapables de résister à l'aspiration, ils restaient, amarrés au continent déchu par le cordon ombilical de l'habitude.
Je pleure ma belle maison, mon jardin d'horloger, mes alliés en esprit, ces compagnons sans coeur. En me séparant d'eux, c'est mon âme que j'abandonne.
Ô le sourire de ceux qui nous sont chers, leurs drames minuscules, leurs querelles fragiles et tenaces, leurs haines pugnaces armées de bonne conscience !
Continuer à lire "Le départ"
Pyjamas
Mon email a été surchargé de réactions sinistres au sujet de mes quatre cavaliers. C'était un concert de lamentations : la violence, l'invasion de populations à forte natalité qui feront la loi dans les pays hôtes, les baleines qui maigrissent, le plancton qui vient à manquer; les conditionneurs d'air glacé qui rejettent leur flux d'air bouillante dans des rues déjà surchauffées. Les américains vivent dans leurs buildings refroidis à 17° en été, réchauffés à 40° en hiver. Les retraites sont menacées, la population active commençant leur carrière à 25 ans et la terminant à 56. La population proteste, mais elle impuissante.
Continuer à lire "Le journal du 9 juillet 2007"
La dame à la mule et deux autres histoires
Rectification. Nous avons relaté le scandale qui a frappé madame Marina F* qui avait détourné de la trésorerie de Thomson, une paire de mules en éponge d'une valeur de 10 euros. Rensignements pris, la valeur de ces précieux accessoires a été évaluée à 6 euros 45 centimes d'euros. N'empêche. Qui détourne un oeuf, détourne un boeuf !
Le directeur consciencieux
Au retour d'un voyage effectué avec monsieur de R***, dirigeant d'une grande firme de cosmétiques, Marina F* assista à un psychodrame qui a failli avoir une conclusion tragique. L'Oréal a toujours été très libéral avec ses collaborateurs et nos deux personnages sont descendus dans les meilleurs hôtels de New York et de San Francisco, dans les restaurants les plus huppés et dans des conditions tout à fait luxueuses. F* craignant une attaque d'apoplexie, proposa de payer de sa poche les dix dollars. Il refusa mais tout au long du trajet qui menait à l'aéroport il se mura dans un silence torturé. Et voici que soudain, dans la salle d'attente du Concorde, le visage de monsieur de R*** s'éclaira. Il s'exclama, tranfiguré : ça y est, je sais d'où vient le trou, j'avais oublié les pourboires aux bagagistes !
Les huitres présidentielles
Quel est le président de la république française, qui se trouvant à déjeuner dans une république bananière, eut soudain des envies de belons, et en fit venir de Bretagne par avion présidentiel et aux frais de l'état? Devinez pourquoi le canard enchaîné n'a pas publié ce frais divers croustillant.
Saturday, 7 July 2007
Chronique italienne N°13
Suicides doux
Je pensais y avoir été un peu fort avec mes sinistres quatre cavaliers d'hier. Je me suis dit que cela tournait à l'obsession apocalyptique. Et puis... aujourd'hui les journaux italiens en rajoutent. A en croire certains gourous, il y a 50% de chances que l'espèce humaine ne franchisse pas la barrière du siècle. Elle aura accompli toute seule une autodestruction aussi efficace, que les siècles de glaciation qui ont eu raison des dinosaures. Alleluiah ! L'apocalypse, celle de Jean, est moins sinistre. Tout d'abord la fin du monde met bien plus de temps à s'accomplir, et puis pour nous consoler, il y a la grande prostituée de Babylone, de la porno à grande échelle. Evidemment la pollution des eaux, le bombardement venu des sauterelles d'acier larguant leur charge bactériologique, la secheresse et les inondations, la désinformation pénétrant dans chaque foyer sur des murs-écran, et puis la carte à puce renfermant les données obligatoires pour pouvoir commercer, circuler, respirer et même mourir, tous ces malheurs, ont leur contrepartie contemporaine, mais au moins ils étaient localisés à certaines régions (un tiers de la surface de la terre) alors grâce à la globalisation c'est toute la planète qui est touchée. Et puis l'Apocalypse finit sur un happy end, exclu même dans les hypothèses les plus optimistes des écologistes. Non, décidément mon article sur les cavaliers de l'apocalypse, je ne le désavouerai pas. A ceux qui nourriraient encore un doute, je les renvoie à quelques articles de journaux.
Continuer à lire "Le journal du 8 juillet 2007"
Chroniques italiennes N°12
JOKE
Un médecin reçoit un ami en consultation. "J'ai une mauvaise et une bonne nouvelle à t'annoncer. La mauvaise : tu n'en as que pour trois mois à vivre. La bonne : je viens de coucher avec ma secrétaire".
Ce n'est ni très original, ni de très bon goût, vous direz-vous. C'est pourquoi un des artistes les plus célèbres de notre temps, Richard Prince, a transcrit cette plaisanterie (joke) sur une toile et l'a vendue à prix d'or, comme toutes celles de la série des "jokes". En voici une autre, un peu plus longue.
Après avoir participé à une rixe dans un bar, un ivrogne prend sa voiture, parcourt le trottoir à contre-courant et tu quatre jeunes gens de vingt ans. Légèrement blessé il est soigné à l'Hôpital. Après quelques jours, étant guéri, il s'ôte le pyjama, salue les infirmières et s'en va.
Certes, on aurait pu profiter de son immobilité forcée de quelques jours pour lui adresser un mandat d'arrêt, mais la loi stipule qu'il est inutile d'arrêter un imputé en pyjama, le risque de fugue n'existant pas. Et en effet, le prévenu ne s'est pas sauvé, on lui a appelé un taxi et il est sorti par la porte principale.
L'homme est un immigré albanais nommé Ashim Tola et l'histoire est relatée en première page de La Stampa.
Friday, 6 July 2007
Chroniques italiennes N°11
Les quatre cavaliers de l'Apocalypse
Ci dessous la page de garde d'un des volumes du manuscrit "éléphant," ( L'Entretien)
Le premier, monté sur un cheval blanc, promettait la victoire. Il partit sous les acclamations de la multitude. Il annonçait un monde meilleur, où la globalisation, le libre-échange, la technologie informatique, la découverte de nouvelles ressources, suspendraient le cours de l'histoire. Il partit pour combattre l'obscurantisme, et ne revint jamais.
Le second, monté sur un cheval rouge, sûr de sa force et de sa virilité, combattit les mécréants, les esclaves et les corrompus. Il les domina, massacra hommes femmes et vieillards, et les survivants, il les réduisit en esclavage.
Le troisième, monté sur un cheval noir, expliqua qu'il fallait économiser les ressources, que la planète n'était pas un pourvoyeur éternel ni sans fin. On mesura ainsi l'énergie, l'eau, le pain et l'huile, et le temps. Il fut secondé par une armée de bureaucrates zélés qui, comme des sauterelles, firent main basse sur toutes les denrées épargnées par le second.
Le quatrième, monté sur un cheval jaune, assécha les océans, noya les terres fertiles, et fit de la planète verte, une terre jaune où des ossements pourrissaient.
Continuer à lire "Le journal du 7 juillet 2007"
|
Commentaires