Sunday, 22 February 2009
CHRONIQUE
Réductionnismes
Je ne sais si je vous l'ai dit,mes chers internautes, mais je suis en train de compléter le plan de la seconde fondation, dont on m'a promis que s'il était "logique", elle existerait. Malheureusement comme il n'est jamais assez "logique" pour mon sponsor, l'avènement de cette merveilleuse aventure culturelle risque de finir dans le pays défini par Thomas More: Utopia.
Neanmoins, ce qui doit être fait doit s'accomplir et je tente une dernière esquisse "logique" de la deuxième fondation. Fort heureusement la Première Fondation : Le Centre Culturel d'Uccle, Bruxelles, est en voie d'édification : le site, magnifique, existe, les bâtiments sont modern style et classés (1933), et surtout le sponsor, homme d'entreprise et d'imagination, s'y intéresse.
Un des passages de la Deuxième Fondation, traite de l'opposition humanisme/réductionnisme. Autant j'ai eu plaisir à relater l'aventure du grand bibliophile et numismate Jean Grolier, homme d'affaire intègre, conseiller avisé du Vatican et de la Cour de France, protecteur des relieurs, des imprimeurs et des poètes, autant citer les esprits étroits et bornés qui pullulent ces temps-ci : les réductionnistes, me répugne. Et il y en a tant!
Je les ai donc traités collectivement, en signalant que le béhaviorisme, la plus célèbre de ces doctrines, est passé de branche obligatoire d'approche de la psychologie à celle de variété psychiatrique !
J'ai défini le réductionnisme comme la tendance de ravaler l'homme à une de ses lectures. On pourrait la synthétiser par l'expression : L'homme n'est que...
Les Américains épris de quantification et de technolatrie, les Français, anticléricaux détestant tout ce qui essayerait de donner une place privilégiée à la personne humaine dans ce qu'elle a d'irreductible, de spirituel, ont fait bon accueil aux déviations réductionnistes. A présent qu'elles sont reconnues comme telles par les esprits sérieux comme l'épistémologue Karl Popper, elles survivent encore sous la plume d'esprits compétents dans toutes les matières du "comment" et ignare dans celles du "pourquoi". Bridgman s'exclamait ainsi : The how is the why of modern man! "
Mais là où les réductionnisme fait florès, c'est dans les romans de futurologie de kiosque de gare, les films de Science Fiction, les tournures de phrases populaires telles que : il a un cerveau puissant.
Notamment une belle brochette de best sellers plus ou moins futurologiques et pseudoscientifique, constitue un palmarès qui donnerait à sourire, n'était sa diffusion dans les mlieux académiques. Je vais en reproduire quelques couvertures.
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Thursday, 19 February 2009
CHRONIQUE
Qualité,simplicité,durabilité
A PROPOS DE LA CHAÎNE MARK LEVINSON HQD.
Ce fut une longue histoire de convoitise et d'admiration entre un système de Haute fidélité et moi.
Lorsque je mis au point l'auditorium des Mesnuls, ma première fondation, je me mis en quête du meilleur système de reproduction possible. Je fis tous les salons, rendis visite à tous les spécialistes, et je tombai d'un coup sur la perfection : la chaîne Hartley-Quad-Decca conçue et fabriquée par un fou de Jazz nommé Mark Levinson. Il imagina un système échappant aux lois de l'esthétique, de l'efficacité, de l'économie, n'obéissant qu'à un but ultime : reproduire à l'identique une formation de jazz de la plus haute qualité. Enthousiasmé par cet ensemble, je dus hélas abandonner tout espoir de l'acheter. Tout d'abord son volume était monstrueux et ne pouvait entrer nulle part, qu'on imagine six systèmes monophoniques indédépendants, l'un servant de gigantesques caissons de basses (les Hartley) et d'impressionnants haut-parleurs tels qu'il n'existent plus qu'à l'état de souvenir, de lourds et minuscules haut-paleurs à ruban Decca pour les extrêmes basses, et pour la plus grande partie du spectre audible, ce que Levinson jugeait comme les meilleurs hauts-parleurs : les QUAD, qui ressemblaient à d'affreux radiateurs de grande taille et de faible puissance sonore mais d'une fidélité et d'une finesse sonore hors pair. Pour les rendre audibles il fallut les doubler puis les flanquer à l'extrême basse et à l'extrême aigu par des HP très spécialisés. L'ensemble ne pouvait délivrer plus de 120 watts de puissance musicale, à une époque où le grand chic était de disposer de milliers de watts. Des transducteurs toujours allumés, des préamplis sous tension perpétuelle, harmonisaient la puissance de chaque groupe monophonique avec l'ensemble. Non seulement le prix était prohibitif, mais l'amplitude sonore limitée ne permettait pas d'animer de grands espaces, et de ce fait la chaîne occupait facilement le quart de l'espace total. En fait la puissance réelle était infiniment plus élevée que les 120 watts, mais transformée en chaleur évacuée par les ailerons des ventilateurs. Au bout de deux heures les amplis étaient devenus de véritables fournaises c'est alors qu'ils étaient en état de produire le son optimum! . Fasciné je dus abandonner l'idée de posséder le monstre et demandai à David Blecher, le marchand, de me donner quelque chose d'un peu apporchant. On essaya des dizaines de chaînes de haute technicité, herissées de voyants, de manettes, de boutons, de potentiomètres et autres contrôles. Mais aucun n'approchait de la qualité du HQD.Le préampli de contrôle de ce dernier était muni des réglages minimum: par d'aiguës ni de basses, tout juste l'arrêt-marche, le volume toujours arrêté à 12h, une fois pour toutes, et c'est tout! Le son qui sortait était celui de la source, sans réglage, sans artifice, sans distortion.
Une des caractéristiques de ce miracle acoustique est sa tolérance aux anciens enregistrements monophoniques, c'est ainsi que le Chant de la Terre que je viens d'écouter hier avec mon amie T*** sonnait aussi bien dans l'enregistrement de 1951 de Kathleen Ferrier,- Bruno Walter, que dans celui de Klemperer avec Christa Ludwig. Les moindres nuances, les moindres différences entre les conceptions étaient mises en évidence avec la plus impressionnante clarté.
Je finis par me décider pour une chaîne Technics de 1000 watts, et d'un ensemble de 6 énormes paravens Magneplanar, si ma mémoire est bonne. Merci à Poil à Gratter de m'avoir signaler la perte d'une bonne partie du billet. J'ajouterai, que je n'étais pas satisfait. Le son était agressif, peu naturel, avec un accent japonais prononcé!
Sunday, 15 February 2009
CHRONIQUE
Le classicisme meurtrier
Á PROPOS DE L'EXPOSITION DE CHIRICO au Musée de la Ville de Paris.
Le parcours de Chirico n'est que trop connu des historiens de l'Art. Plusieurs phases se suivent et ne se valent pas. La première, glorieuse, explose inopinément comme une révélation venue d'ailleurs. La novation à l'état pur. C'est la peinture métaphysique. La tête encombrée d'images étranges qui vont de pair avec une poésie d'association d'idées poétiques et étranges (Hebdomeros) mais énonçant un réseau corellé et stable d'évocations. On est à mi-chemin entre le symbole et le rêve. L'imagerie est simple -en apparence - y dominent les thèmes suivants: Une place de Ferrare connue pour ses arcades et au coucher de soleil, lumière de quatre heures, la plus chaude. Au milieu de la place une statue généralement allongée (Ariadne) ou un régime de bananes, ou des personnages masqués. Les ombres sont extraordinairement denses, autant que les palais ou que les statues, sinon plus. Elles sont d'un noir angoissant comme la lumière du crépuscule aux ombres naissantes. La perspective est plongeante, vue d'en haut, ce qui permet de discerner tout au fond un train qui passe en émettant un nuage de fumée blanche. Le train qui passe, souvent des horloges dans des gares désaffectées, signalent l'énigme de l'heure. Une gare aux quais vides, à l'horloge sans doute arrêtée, deux silhouettes enveloppées d'ombre attendent immobiles. Quoi? Nous avons peut être tous ressenti la nostalgie due au contraste entre la beauté ordonnée des arcades et ce train qui inlassablement n'arrête pas de passer. On croit entendre en un écho infini le sifflet émis par la fumée. J'ai personnellement toujour été angoissé et fasciné par les crépuscules. Le Chant de la Terre de Gustav Mahler est impregné de cette "sehnsucht", spleen,mais pas cafard bien au contraire un sentiment d'intense et de poignante beauté nous étreint le coeur. Apparaissent aussi d'étranges mannequins à la tête ovoide traçant des architectures mathématiques dans des tableaux mis en abîme, à l'infini, comme deux miroirs qui se répondent.
Le plus impressionnant et le plus célèbre de ces tableaux est sans conteste le Portrait de Guillaume Apollinaire, acquisition magistrale des Musées Nationaux. On y discerne un buste de marbre, affublé de lunettes noires et représentant prophétiquement le sort du poète gazé.
Le moment de stupeur créatrice est passé, les places s'encombrent de mannequins, d'objets issus de la période géniale. On tend vers un clacissisme d'intentions. A la fin de cette période, on se rapproche de plus en plus de modèles classiques. De Chirico visite beaucoup de musées et en tire des leçon de "belle peinture", une nostalgie des époques bénies des grands peintres.
Dans une troisième partie de son oeuvre, Chirico est parvenu à copier les oeuvres de peintres anciens, il crée ainsi un musée de faux Rubens, Fragonard, etc. Qui sont un clou impressionnant et décevant de l'exposition. Car la copie se rapproche dangereusement du pastiche. Il excelle cependant dans l'autoportrait.
Dans la dernière partie de son oeuvre, Chirico finit par se copier lui-même. En voulant reconstituer la période métaphysique, il ne fait qu'accentuer son manque d'inspiration. Ces "faux Chirico" reprennent tous les thèmes passés, souvent servilement, mais le mystère de l'heure ne fonctionne plus. Le nuage de fumée est devenu un petit nuage drôle comme un chou-fleur. La matière est tellement légère qu'elle risque d'être prise pour une gouache. L'explication il la donne lui-même : tout cela n'a aucune importance et la peinture métaphysique n'est qu'un passage dans sa vie. Mais les dernières années, quel désastre! Des chevaux faits de palais grecs, des personnages figés mais sang poésie. Chirico a retiré de son expérience des anciens du mal peindre. C'est mauvais et répétitif.
Cette triste régression (ou rétrogression) nous conduit à nous poser des questions, qui seront traîtées dans le corps de ce billet.
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CHRONIQUE
Du jardin enchanté
C'est du petit musée Mingei dont il s'agit, évidemment. On se souvient que le Mingei est l'art populaire japonais, peu sophistiqué par opposition à l'Art de cour. A ce que j'ai compris, ce musée, dont j'espère faire le deuxième en Europe, et peut-être dans le monde, avec l'aide de Philippe Boudin, en me passant de reconstituer ou d'acheter en vrac la collection Montgomery, la deuxième mondiale, ce musée donc, vivra à UCCLE d'ici un an, le temps d'obtenir les autorisations de construction nécessaires pour le pavillon japonais. Voici quelques dernières propositions.
Saturday, 14 February 2009
CHRONIQUE
Lectures anglaises
Mes chers internautes,
Ce matin, en me réveillant, un oiseau tout guillet, pas un moineau déplumé, m'a chanté : cou-cou! Tu es guéri ! La vie est devant toi, profites-en!
J'ouvre un oeil, avec précaution, puis l'autre, et mon corps me dit : Du bist gesund!, mon âme à l'unisson est remplie d'allégresse. Je constate avec surprise que j'ai pu dormir, en dépit de la douleur, et sans plus de 200 mg d'antidouleurs légers. Me voici autonome malgré quelques nausées qui flottent autour de moi, comme des traînées brumeuses non encore dissipées.
Et je suis sorti dans le soleil.
Au bras encore indispensable de mon fidèle Michel, je suis allé retirer chez Smith, rue de Rivoli, Steps de Jerzy Kosinski mais je ne me suis point arrété en si bon chemin. Lire Steps et en rester là, repu, quelle paresse d'esprit! J'ai donc commandé tout ce qui est encore disponible, acheté ce restait en magasin : "Being here" qui était en magasin, immortalisé, dit la couverture, par Peter Sellers, et , selon l'inspiration The Daughter of time de Josephine Tey (Heinemann, London 1951). C'est le plus formidable thriller historique sur l'intex, jamais écrit, où Shakespeare a le mauvais rôle ! Il fallait bien qu'il mange, tout génie qu'il était ! Je l'avais lu dans les années cinquante, et j'ai eu l'idée de le retrouver. Mais en suivant ma pente toute nouvelle, j'achetai un autre thriller disponible de Tey : The Franchise Affair ( Random House, London, 1949). Enfin, je trouvai deux DVD de La Nuit des Rois.
Je voulus compléter mes achats par un somptueux manteau de vigogne doublé de vison, que je vis voici deux ans chez Hermès, en rêvant de le posséder quand je gagnerais au loto (pas de chance, car je ne joue pas au loto!) Mais traitreusement, Hermès baissa les prix et la fantaisie, ne vendant plus que de simples manteaux non doublés et me dépossédant de mes rêves!
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Wednesday, 11 February 2009
CHRONIQUE
D'entre les souffrants
Mes chers internautes,
une foule d'éloges ont accompagné le blog sous la plume talentueuse de S***. Imagination, correction du mot juste, rêve, ont frappé mes internautes, que des tonnes de barbarismes ont laissé une vague nostalgie de cette belle langue que nous ont léguée nos aïeux. Que de super-mecs, super-bons sont systématiquement gavés par les médias, systématiquement entraînés au moche, au médiocre, sous la déferlante américaine. Et si l'attraction souterraine et un peu honteuse du "parler bourgeois" s'obstinait à nous vriller le goût et les sens? En ce moment on passe un admirable téléfilm sur le Cardinal Mazarin. Certes, aujourd'hui, comme jadis, le peuple a faim et les nantis se gavent. Mais au moins ces nantis édifiaient de splendides monuments de civilité tels que précisément la bibliothèque Mazarine, qui profitent à tous et font de Paris la plus belle ville du monde. Est-ce si négligeable? Aujourd'hui les nantis sont plus arriérés que des bouviers, sourds et aveugles à la beauté. Allez voir leurs pitoyables et gigantesques hôtels, le kitsch et les horreurs architecturales.
Mazarin est un téléfilm riche en exemples d'une civilité qui se constituait, sous la houlette peut-être snob de Mlle de Scudéry et de sa carte du tendre, qui épura ce qu'il y avait de grossier dans La Jalousie du Barbouillé destinée aux planches et aux trétaux itinérants. Il en sortit un style si pur, qu'on songea à l'attribuer à l'influence de Thomas Corneille. Pareillement, à l'époque élisabéthaine se fit le partage des eaux entre grossièreté drue et verve licencieuse et extrême sensibilité de la langue.
Et pourtant... Tous n'assistaient pas au téléfilm Ils pensaient les pauvres qu'un débat sur la peine de mort, éculé s'il en fût, était plus de saison. Alors que le problème de la peine capitale ne peut se réduire à aucune raison, à aucune argumentation logique, sinon à un débat faussé dès le début, miné par la rhétorique et la mauvaise foi de part et de l'autre. Indigence de la pensée, ignorance des fondements du sens, chers aux sémanticiens. Les anges sont-ils mâles ou femelles? On a tué et on tuerait encore pour de telles insanités de l'esprit.
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