Wagner
Wednesday, 16 May 2007
**** L'opéra de la désinformation
Lohengrin à l'Opéra Bastille
Hier soir, je suis allé à la première de Lohengrin, dirigée par un des plus grands chefs d'orchestre, Valery Gergiev. Autre star mondiale : la célèbre Waltraud Meier dans le rôle d'Ortrud.
Pour comprendre cet article, il vaut mieux, évidemment, connaître l'opéra romantique de Wagner, ou au moins avoir lu le résumé de l'intrigue. Pour ceux qui ne connaissent pas plus Lohengrin que Wagner, que l'Opéra, ou tout simplement nuls en musique classique, je vais néanmoins dégager les grandes lignes du sujet en me consacrant sur un aspect original de celui-ci : autant et plus que Otello de Verdi et Shakespeare, le dernier opéra romantique de Wagner, est une étude saisissante et pénétrante des mécanismes de désinformation.
Ceux qui me connaissent, savent à quel point je déteste les mises-en-scène à la mode, consistant à transporter l'action de Don Giovanni dans une entreprise de nettoyage de la Défense, ou les ors et les fastes napoléoniens des Contes d'Hoffmann, dans un asile de fous. Je craignais le pire pour cette mise en scène de Robert Carsen lorsqu'on me rapporta que la scène censée se passer devant une église médiévale flamande, évoquait plutôt les tranchées de la première guerre mondiale et les caveaux où Hitler et Eva Brown se donnèrent ma mort. J'en fus d'autant plus agréablement surpris.
Dans ce journal je me bornerai à décrire une des intrigues cachées, information derrière l'information. Celle précisément la plus proche de nos préoccupations actuelles : l'infiltration subtile du doute devastateur, la propagation des rumeurs, les prophéties instrumentalisées en vue de leur accomplissement. Mais aussi l'opposition viscérale contre les pays de l'Est, considérés comme barbares par rapport à l'empire allemand. Enfin, le contraste entre l'hypocrisie des discours politiques, dissimulant des intérêts territoriaux, et la pureté desespérée de l'utopie transcendante, cette nostalgie douce-amère propre au romantisme allemand, et dont les gauches ont hérité.
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Saturday, 24 March 2007
Le Ring de Richard Wagner raconté par Robert Wilson
et par Cristoph Eischenbach
La Tétralogie de l'anneau du Nibelung, (Der Ring des Nibelungen) appelée communément Le Ring, est certainement l'oeuvre dramatique la plus complexe qui ait été créée, non seulement par ses dimensions, supérieures à la plus ambitieuse production de Hollywood qui s'en inspire (Starwars) mais par une complexité jusqu'ici inconnue et qui se manifeste à tous les niveaux de lecture de la partition : le microcosme aussi fin et détaillé qu'un livre d'heures médiéval, le macrocosme, digne par son ampleur de la Chapelle Sixtine. Ce qui frappe dans cet immense édifice, est la cohérence non seulement de chaque niveau mais aussi des niveaux entre eux qui forment un contrepoint de sons, d'images, et de mots, d'une extrême subtilité.
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Friday, 23 March 2007
Histoire d'un sauvetage : l'enregistrement du Ring par Bob Wilson et Christoph Eschenbach.
Je viens de recevoir l'enregistrement du dernier Ring représenté au Theâtre du Châtelet à Paris. 11 DVD tirés à quatre exemplaires, donc rigoureusement confidentiels, fixent pour la postérité une des visions les plus originales de ce drame musical, impossible à monter conformément aux intentions du compositeur.
Cette production offre matière à réflexion, sur la désinformation dont est victime l'oeuvre dramatique la plus ambitieuse de tous les temps : quinze heures de spectacle d'une densité inouïe et faisant appel à toutes les ressources multimédia disponibles... et à celles encore à inventer.
Parmi l'immense majorité des mises en scène contemporaines du chef d'oeuvre de Richard Wagner, celle de Bob Wilson est l'une des plus audacieuses, déroutant même les spectateurs habitués aux outrances de Lenhoff à Munich ou de Kupfer à Bayreuth. C'est que la conception de Wilson semble - est -aux antipodes de la logique interne de l'oeuvre. Elle est statique, s'inspirant du Nô japonais, réduisant les personnage à des figures stéréotypées de tarot.
Ceux qui connaissent ma répugnance pour la déformation des oeuvres d'art, que j'apparente à la désinformation du public lorsqu'elle devient le culturellement correct, se sont étonnés de l'enthousiasme dont j'ai fait preuve pendant les répétitions et les représentations. J'espère que mes explications dissiperont ce paradoxe. Je me réfèrerai pour l'illustrer à une création presque contemporaine, le Tristan de Bill Viola, donné à l'Opéra Bastille, et accueilli avec le même scepticisme de la part des wagnériens.
L'attention du public est constamment attirée par l'écran géant qui occupe la plus grande partie de l'écran. La scène "réelle" mise en scène par le plus iconoclaste des metteurs en scène : Peter Sellars, est aussi statique et japonisante que celle de Wilson, laissant libre champ à la fantasmagorie virtuelle.
Or les images de Viola forment un contrepoint parfois dissonant avec le texte et les indications scéniques. Pendant le duo d'amour, Isolde allume des bougies dans une sorte d'oratoire. On assiste à des rites initiatiques étrangers à l'esprit apparent de l'oeuvre.
Pourtant, cette représentation, dirigée avec ferveur par Valery Gergiev, a été l'expérience la plus bouleversante que j'ai jamais vécue à l'Opéra, avec le Ring du centenaire. Pourquoi un tel enthousiasme pour une interprétation "désinformée"? C'est tout
simplement que les "bruits" introduits pas le plus grand des vidéastes, sont de la qualité plastique la plus élevée. Le Tristan Project est sans doute le chef d'oeuvre de l'artiste. Cinq heures de création plastique ininterrompue, est une performance dépassant les cadres du genre. C'est donc en amateur de l'Art plastique de notre époque que j'ai accueilli l'oeuvre et non en tant que wagnérien ou amateur d'opéras. Le Tristan de Viola est une oeuvre d'un genre nouveau, issue de la conjonction d'une installation grandiose et émouvante et d'un accompagnement musical qui lui donne vie et qui l'a inspirée. La relation entre image vidéo et drame wagnerien, n'est pas de l'ordre de la dénotation explicite, mais de la connotation, de la réverbération. Autant les critiques musicaux peuvent critiquer le Tristan de Wagner accompagné des images de Viola, autant les amateurs d'Art Contemporain sont fondés à adhérer sans réserve à l'installation de Viola accompagnée par la musique de Wagner et commentant librement ses résonances les plus précieuses.
C'est dans cette optique qu'il faut à mon sens apprécier le Ring de Wilson, accompagné par la musique de Wagner, avec la différence que les images wilsoniennes sont abstraites et plus proches du minimalisme abstrait que de l'imagerie ésotérique de Viola.
Continuer à lire "Le Ring de Wagner vu par Wilson. L'enregistrement privé."
Saturday, 24 February 2007
Une encyclopédie de l'Anneau du Nibelung
J’ai publié chez Fayard un ouvrage sur le Ring qui peut être considéré comme la plus importante des monographies, par sa variété et par son volume (plus de 1600 pages). Le professionnel ne sera pas surpris d'apprendre, qu'en dépit de son importance, cette "encyclopédie du Ring", n'est qu'un condensé d'un travail beaucoup plus important, et de ce fait impubliable. On notera l'impasse volontaire sur les interprétations des chanteurs et des chefs d'orchestre. Plus grave est l'absence de toute iconographie. Certaines analyses ont été simplifiées car inaccessibles au grand public, enfin je me suis gardé de toute appréciation subjective. Notamment en ce qui concerne la question scabreuse de la présence de l'antisémitisme sur le Ring, j'ai exposé les points de vue antagonistes. Pour les mises en scène dites engagées, j'ai déclaré ouvertement ma désapprobation devant les pires falsifications, tout en citant les critiques favorables. En dépit de ces précautions, on me reprocha d'être tendancieux (sans dire de quelle tendance il s'agit), d'être passéiste, ou encore de ne pas oser afficher mes opinions en me contentant de donner la parole aux critiques les plus variés.
Friday, 23 February 2007
Le Ring au cinéma. (suite II)
Brünnhilde, un autre personnage "impossible". Difficultés posées par la caractérisation du personnage : toute jeune fille aux lèvres enfantines, sybille portant le message final du Ring à l'humanté. Notes sur l'adaptation cinématographique du Crépuscule des Dieux, sur le Play-back, le son, les lieux,etc.
Continuer à lire "Le "Ring" au cinéma. (Suite II) Caractérisation de Brünnhilde"
Pour une réalisation cinématographique du Ring", suite.
Le caractérisation des personnages.
SIEGFRIED
Laissons la parole à P.Flinois.
"On l'a dit en ouvrant la vidéographie de l'Or du Rhin, le prototype idéal, le modèle incomparable pour une "vision" de Siegfried reste impérativement Die Nibelungen de Fritz Lang. Et plus précisément, dans le cas présent, cette Mort de Siegfried qui en compose la première entité, la plus diffusée aussi. Là Wagner a trouvé dans un noir et blanc de rêve où la brume est brume, où les Nains difformes sont nains et difformes, où Siegfried est héroïque et beau, et Brünnhilde est belle, son illustration la plus mythique, et sans doute la plus parfaite.: jamais visages, tuniques, forêt hercynienne ou palais wormsien n'auront ainsi resitué la légende dans sa pureté, sa nudité irréelle, et quelque part aussi dans ce silence de la parole qui permet d'imaginer tous les chants. Héros radieux, maladroit et fatal, Paul Richter disqualifie tous les protagonistes à venir sur la scène, comme à l'écran, où l'on s'en veut de citer comme seul témoin récent l'indigne Fantaisies amoureuses de Siegfried, banal film érotique en costumes. Maintenant qu'au chef-d'oeuvre de Fritz Lang on a restitué sa partition originale (qui cite seulement Wagner, mais ne l'exploite pas, pour de sordides raisons de droits d'auteur), on ne peut qu'es**pérer vivement une mise à disposition en CDV, pour avoir cette référence absolue comme modèle permanent. "
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