Chroniques italiennes N°10
La Fiat 500 a été inaugurée hier. Un triple symbole : de l'ingéniosité industrielle de l'Italie, de la dynastie des Agnelli, de ce que peut faire un patron génial.
A gauche Lavinia et John Elkann.
Voici environ trois ans, on parlait beaucoup de John Elkann, que son grand-père L'avoccato avait adoubé comme son successeur. Après mûre réflexion il avait jugé que ce jeune homme prudent et réservé était digne de prendre la tête de la famille et de la défendre. Il l'avait formé dans ce but. Notamment il bénéficia des conseils des deux hommes que j'estime les plus efficaces dans le domaine du management : Jack Welch et - à l'occasion d'un déjeuner - Thierry Breton.
Le jeune homme était très aimé par le public, surtout à cause de la Juventus et de Ferrari, qui étaient partie intégrante de Fiat. Mais surtout, Fiat c'est l'Italie, et quand Fiat va mal, c'est le pays qui en pâtit. Les gens de condition populaire, faisaient instinctivement confiance à "Jacky" et pensaient "si quelqu'un peut sortir Fiat de là, c'est lui". En fait le mérite de John Elkann et de Gabetti, son mentor, fut de recruter et de soutenir dans une période catastrophique, un manager de la trempe de ceux que je viens de nommer : Sergio Marchionne. J'ai eu l'occasion de lire son crédo managérial, et il est parfaitement en phase avec Welsh et Breton.
Il est de bon ton de déplorer la différence de salaire entre un patron et un employé de base, notamment à l'occasion des révélations sur l'enrichissement du président de Vinci. Certes, il est particulièrement scandaleux de ménager des parapluies dorés pour des parachutés de l'Ena, de l'administration et du lobby politico-bureaucratique. C'est une des tares de notre pays, infesté par les connivences entre grands corps et milieu industriel et bancaire. Mais c'est une exception française, car dans la plupart des pays touchés par Matrix (la globalisation) le milieu rémunère bien contre des résultats et fait jouer la concurrence sans états d'âme lorsqu'il s'agit de se disputer des leaders. L'exemple de Marchionne montre l'extraordinaire impact que peut avoir le talent, le charisme et la vision d'un seul homme de conviction sur le sort d'une firme, qui naguère frôlant la faillite, voit sa valeur multipliée par 5 en trois ans.
Ceci n'aurait pas été possible sans le sang-froid dont ont fait preuve les dirigeants du groupe, dans l'oeil du cyclone. Il est facile après coup à des bureaucrates de ciller sur l'orthodoxie de certaines mesures, et de se montrer tatillons. Qu'ils aillent expliquer cela à des ouvriers menacés par des restructurations massives!
Généralement dans les sociétés d'une certaine ancienneté, gérées par des héritiers viellissants avides de pouvoir, et ne voulant pas en abdiquer une parcelle au profit d'étrangers au clan, ou à la famille, les managers de génie ne font pas long feu. C'est la raison d'être notamment des fameux parachutes dorés. Au début, on les traite comme des sauveurs, puis quand les résultats commencent à être au rendez-vous, les avanies commencent avec les intrigues, et bien souvent les actionnaires se mêlent de tout, croyant que la propriété des actions leur donne compétence et talent.
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