Postface au premier état de Virus.
J'accorde une importance particulière à ce texte, accessible, je pense, au non-spécialiste car il plaide pour la diffusion de la haute culture, la démocratisation du savoir humaniste, et lutte contre la banalisation et la déculturation ambiante. Matrix et Medusa, la droite consumériste et aliénante contribue à achever, par d'autres moyens, plus doux, le travail de nihilsme entrepris par l'extrême gauche et les "intellectuels" branchés. Dans les deux cas nous assistons à un travail de sape : optimiste et utopique d'une part, pessimiste et tout aussi irréel d'autre part. Deux faces d'une même conception du monde : le négatif et le négatif du négatif, qui n'est pas forcément du positif.
POSTFACE à Virus de Kevin Bronstein
Tache aveugle
Généralement ce n'est qu'une fois son essai achevé, que l'auteur voit à peu près clair dans son propos. Il est prêt à tout jeter aux orties pour rebâtir sur le structural, jusqu'ici enfoui sous les considérations conjoncturelles qui encombraient son écrit. Picasso se plaisait à le rappeler : tout son oeuvre de création est le résultat d'une somme de destructions. C'est encore plus vrai pour la tentative de clarification visée par ces huit leçons. Clarification, densification, distillation.
Oublions tout ce que j'ai pu nous apprendre dans ces leçons touffues et libérons notre esprit. En faisant le vide, apparaît l'essentiel caché, celui qui était escamoté par les mots, les notions et les concepts, non seulement dans ces leçons, mais dans tous les textes dont il s'inspire. La tache aveugle. Le tabou universel de l'intelligentsia qui frappe de cécité sélective, encyclopédies savantes et tabloïds, traités de sociologie et libelles intégristes, publicités télévisées et films engagés, ici et là, partout où la pensée s'insinue, partout où le verbe se glisse. Une tâche aveugle, pareille à celle qui se tapit invisible et ignorée au centre même de la vision, m'est apparue une fois que j'ai fermé les yeux sur la clarté qui m'aveuglé, que j'ai fermé mon manuscrit et que j'ai imposé le silence à mon monologue intérieur.
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