CHRONIQUE
En relisant Shakespeare
La nuit des rois
Le titre anglais est "La douzième nuit" ou "comme vous voudrez" et on peut se demander d'où vient le titre français.
J'ai relu la fortune critique et les commentaires de cette comédie romanesque qui est la dernière et la plus aboutie de la série (qui comprend aussi "peines d'amour perdues". J'avoue que j'ai trouvé les analyses de l'édition du Club du Livre, par ailleurs excellente, assommantes. On nous expose avec une rare secheresse l'intrigue principale en la réduisant au contexte de l'époque et à ses sources, et en détaillant ad nauseam les rapports entre les personnages. L'intrigue secondaire est présentée comme un procédé conventionnel destiné à équilibrer par une autre déraison la déraison sentimentale et romanesque.
Il est à mon sens une autre vision plus intuitive, qui ajoute un peu de chair autour du squelette analytique. Il s'agit davantage de heurts de sentiments que de procédés rhétoriques. J'essaie de m'expliquer.
L'intrigue principale - si on peut la nommer ainsi - suscite chez le lecteur intuitif, des sentiments troubles, souvent insoutenables et proches de l'atmosphère décrite par Stefan Zweig dans La confusion des sentiments. Il est nécessaire de dissiper cette impression trop ...gênante, celle de la confusion des sexes par un éclat de rire, de la grosse farce, quelque chose de si mauvais goût que le lecteur raffiné- surtout français et rationnel, ne peut que s'en offusquer. Il ne s'agit donc pas d'une simple intrigue secondaire destinée à équilibrer l'intrigue principale, mais d'un véritable entrechoc, d'une collusion de sentiments. Pour atteindre cet état d'empathie avec la pièce, il est nécessaire de prendre les personnages secondaires au sérieux, de ne point les considérer comme des caricatures ni des marionnettes, conception érudite et courante.
Ces remarques sont évidemment subjectives et n'engagent que moi. Plus qu'une opinion autorisée, elles représentent plutôt mes réactions personnelles à une oeuvre qui a ému mon adolescence.
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