CHRONIQUE
Commentaires
Comme vous l'avez compris, la lecture inopinée des 85èmes pages de mon livre de LH m'ont donné envie de continuer la lecture. Je voudrais tout d'abord noter les transformations apportées au texte original.
J'en ai par endroits amélioré le style. J'ai acquis depuis 1962 une certaine habitude rédactionnelle n'est venu altérer forme et fond. , autant en profiter ! Mais rien qui ait déformé le sens ni même la forme de l'original. Par exemple j'ai évité les mots redoublés tout en gardant un langage vernaculaire.
Je n'ai pu non plus éviter de m'impregner de ce qui depuis a apporté de profondes résonances dans la suite de l'entretien.
Je commencerai par rapprocher le personnage de Lars Hall de ceux qui se transformèrent en contes et légendes, puis en ceux qui m'entourent aujourd'hui, tout en évitant de déflorer l'anonymat de ceux qui aujourd'hui me sont aussi chers que lui.
L'HISTOIRE
Un jeune homme malingre et en butte à la dérision de ses deux ainés. Le démon, en échange d'une vierge déflorée et au coeur arraché, tous les ans, accomplit lepacte de Faust. Le garçon (ici Hellewijn) montre sa cruauté et la chrysalide devient papillon. un splendide jeune homme, proche de Lars. Comme lui, il tuera ou asservira ses frères et captera leur fortune.
Aujourd'hui, le prototype N°1 (vivant et bien réel dans les limites de l'anonymat du blog) a sacrifié son aïné, comme on arrache les ailes et les pattes d'un papillon. Il ressemble à s'y méprendre à LH.
Le jeune Lars réussit à la cour, mais pas plus que Hellewijn il n'est capable de s'humaniser, contrairement à Faust. Il faut comparer aussi Lasse et ses frères aux deux frères de Das Klagende Lied ( par Boulez) de Gustav Mahler. Pas de rédemption.
La description des forêts et des bois, la nostalgie de celui qui a tué le père sous l'influence de la mère, forme la trame des 4 Balades de Brahms déjà étudiées dans ce blog. Le héros, Edward, ressemble à L.H. comme un jumeau.
Lasse est cruel et a des instincts sadiques, jeu du chat et de la souris. Mais il peut aussi être plein d'amour et de compassion pour l'auteur. Il en est de même pour le proto 1. Cruel, joueur, inhumain, il finit par se révéler capable de sentiment très profonds. La clé en est l'amour sans fond. Lasse a beaucoup aimé le jeune J. Aimé à l'infini. Ce sentiment se transfère en sens de la protection pour l'auteur (Prototype A).
Mais le prototype 1 n'a pas connu de Jurgen. Ce qui le transforme est la claire conscience d'être aimé au delà de toute expression. Il éprouve ce qu'est une dévotion exclusive sans compromission et résistant à toutes les rébuffades. Il change alors et devient capable de la plus émouvantes des tendresses. Aujourd'hui pour l'auteur, demain pour une femme digne de lui.
Il est à la fois fort et vulnérable, dur et séduisant.
L'auteur a vécu l'expérience évoquée par celui décrit dans le livre de LH. Sous l'influence décisive de son professeur, il s'est puissament musclé et doté d'une résistance à toute épreuve. Mais le mauvais sort a ruiné sa vie sans entamer sa volonté aux moments de répit.
QUARANTE ANS PLUS TARD
L'auteur est entouré de trois prototypes. vivants et qui l'entourent de leur affection. Le Prototype 1 ressemble à physiquement à LH. Le prototype 2 est aussi protecteur avec l'auteur que LH dans ses moments de solliicitude. Les deux prototypes parlent à voix basse. Leurs yeux sont fascinants et peuvent vous fixer pendant un temps considérable. De même que l'auteur donnerait sa vie à LH et se sent indigne de son amitié, il éprouve les mêmes sentiments auprès du prototype vivant N°2. Exactement les mêmes sentiments de familiarité, d'admiration, d'émerveillement.
Le prototype 3 est voisin de L.H dont il se rapproche par la chaude intimité.
Il manque dans le livre de LH un rôle de femme. Celle-ci, ne parut dans sa vie que voici quelques années, quarante ans trop tard pour un mariage qui eüt été idéal. Quarante ans ! Le temps de la préface de Faust
Nous en arrivons à présent à la fameuse dédicace. Lorsque je rédigeai, en 1972 le livre de LH, je créai, moi l'auteur, la micro-informatique. Je commençai une carrière solitaire et dépourvue de lecteurs et d'amis. LH je le rencontrai physiquement : c'était le jeune allemand blond, splendide et nazi qui nous menaçait pendant la guerre et qui me souriait avec tant d'affectueuse sympathie. Il m'eût aussi bien torturé et envoyé aux fours crématoires. Il chantait aussi bien que LH et que les jeunes nazis qui défilaient en chantant dans les rues de Tunis terrorisée par leur voix magnifique et scandée.
En y pensant, je m'aperçois que les quarante ans ont laissé des sillages opposés à celui du vieux Goethe. Celui-ci déplore et regrette ses amis de jeunesse et apprehende une foule étrangère qui ne comprendra pas son chant, à tel point qu'il scellera son manuscrit pour le soustraire au public de son temps.. L'auteur (moi) a vécu au contraire dans l'incognito, nulle foule ne lut l'Entretien. Scellé dans une armoire, nul n'en prit connaissance. Aujourd'hui, depuis quelques années, l'auteur est fêté, entouré d'amis chers et nouveaux, son manuscrit a été découvert et entre au département des manuscrits anciens à la Bibliothèque Nationale. Les honneurs ne font pas défaut même de la part du sommet de l'Etat, Que manque-t-il aujourd'hui à l'auteur?
La santé certes, sous l'effet d'une malédiction qui a frappé avec les pires souffrances le sort des prophètes. Car l'auteur a reçu en héritage l'esprit du cabbaliste Moshé Luzzatto. L'Apocalypse qui a déjà marqué les ouvrages de Thomas Mann, de Pierre Henry, de Dürer, l'a guidé. Il n'est contrairement à Goethe, sût de sa lente distillation de Faust II, que l'esprit soufflant spontanément, sans élaboration, sans aucune certitude quant à la valeur de son oeuvre. Goethe a fini Faust, Luzzatto n'achèvera pas la sienne, interrompue par la mort. Voici donc les liens entre les trois prototypes, et le projet Luzzattien.
Bruno Lussato