II. Message à X***
Il y a bien longtemps, vint me trouver celui dont je craignais la présence tout en la recherchant. Je savais que je devrais beaucoup accepter de lui et ne voulus pas le peiner en m'écartant. Il se montra détendu et auprès de lui, mon inquiétude s'évanouit. Il était tard, et c'est ainsi que tout commença.
Il me disait combien les oiseaux lui paraissaient bizarres, montés sur deux baguettes fragiles et animés par de petits mouvements saccadés. Tête en bas, pattes en l'air, ils se meuvent à l'air dans l'élément abstrait, tandis que les mammifères traînent à terre leur chair et leurs tripes.
Regardant son torse nu, je compris que nos rapports seraient d'un volatile à un animal aux lourds désirs charnels. Il semblait heureux, ce qui ne lui était pas habituel. Comme je lui en demandais la raison, " j'ai déposé les armes, répondit-il, et aussi le bouclier. Je ne lutte pas avec toi".
Je l'avais donc apprivoisé, ou l'étais-je? Je me sentis aveugle, fixant le corps sans en percevoir les intentions, et je m'enhardis jusqu'à lui effleurer les épaules et la poitrine. Il en fut étonné et se mit à rire lorsque je lui expliquai maladroitement mon désarroi.
Ses muscles jouaient derrière les murailles roses et charnues comme d'une bête; obstacles à toute communication intime. Tout ce calme m'apaisait et me désolait.
Il me promit en me quittant, qu'on se verrait plus souvent. " Nous nous retrouverons dans un coin perdu, en pleine nature, et le soir je serai auprès de toi. J'y ai songé à maintes reprises et je veillerai à ce que cela se réalise.
Néanmoins, je sentis que j'étais encore un oiseau pour lui et le serais toujours.
III. Message à Y *** Je tombe du sommeil des narcotiques mais l'insomnie veille. Se donner tant de mal pour m'en faire!
Je t'aime, et pourtant nous voici séparés. Si jeune et si perverse! Comment pardonner, car comment reconstruire le patient travail d'une vie, anéanti par jeu?
Le feu de la douleur modèle la matrice des décisions premières, l'humiliation rabote les pics de l'orgueil, des mers déferlantes noient le souvenir et envahissent la pensée.
Honte sur toi.
Je souffre dans mon corps et j'ai du sang dans les yeux.
ÉCRIVAIN
J'ai cru comprendre que les messages qui encadrent le passage de l'oiseleur sont adressés à une même femme. La pièce centrale fait allusion à une amitié entre le poète et son protecteur.
GALINA ZOUBOV
Les allusions homosexuelles me semblent évidentes.
ZOUBOV
Je n'y vois, pour ma part, que l'attirance de l'intellectuel romantique pour une brute musclée. Songeons à la surprise du garçon devant le geste bien anodin de son ami, ce timide effleurement. Tout le passage admet d'ailleurs une interprétation bien différente.
SOCIOLOGUE
Je la devine, Zoubov. Héros et poète ne font qu'un. Le jeune homme est l'animus et la muse, l'anima du scripteur. Voyons si la suite confirmera cette hypothèse.
JOHN ABELL
IV. Le départ Je ne puis évaluer le temps qui nous sépare, ô mon ami, toi à qui ces lettres parviendront peut-être un jour, toi que j'ai tant aimé, que le fil du ressentiment qui encore nous lie, n'a pu être coupé.
Je compris lors de notre dernière rencontre, que ma place n'était plus à tes côtés. Me sachant en danger, je fuis ta cruauté entreprenante, t'abandonnant à ceux qui te détournèrent de moi et qui aujourd'hui, se repaissent de mon infortune.
La haine de mes illusions défuntes, quelque argent économisé par inadvertance, me soutiendront jusqu'au but.
J'appareille vers les rives voilées des pays interdits. Tu ne pourras m'y atteindre. Le frêle esquif qui y mène ne porte que ceux, libres de toute espérance et de tout orgueil viril.
GALINA
Que vous disais-je? "Ô mon ami, que j'ai tant aimé!". Que vous faut-il de plus?
ZOUBOV
Pourquoi chercher du vice partout. "J'ai tant aimé" n'est-il pas antinomique de "J'ai aimé?"
GALINA
Tu prends bien à coeur la défense du pauvre Oscar, son destin me donne raison. Quel futur!
SOCIOLOGUE
Futur antérieur, Madame.
GALINA
Antérieur ou postérieur, qu'importe, ses moeurs contre nature transparaissent dans ces poèmes épistolaires.
LITTÉRATEUR
Il ne s'agit madame, que d'une transposition fidèle des Sonnets. Les déclarations d'amour ne sont que des figures de style courantes à l'époque élisabéthaine et simplement réactivées par le génie de Wilde. Et vous oubliez un peu vite sa rupture avec la femme aimée.
JOHN ABELL
V. Du Grand Nord Je me souviens plus du départ, qui fut précipité. Immergé dans d'épaisses ténèbres, des nappes désolées défilaient devant le hublot de ma conscience, images sitôt fixées, sitôt effacées.
J'ai souvenance de ce port du Grand Nord. Ses maisons et ses rochers luttaient contre la nuit permanente en émettant une phosphorescence qui enveloppait la surface de toute chose.
Je fus convié dans le plus grand restaurant de la ville, au sommet d'un bâtiment élevé d'où l'on discernait la lueur violette d'un crépuscule lointain.
Les bateaux sillonnent la nuit, les marins hantent les rues de velours noir en quête de chaleur vaginale. Le vent apporte les odeurs du large et tout au bout de la baie, des falaises déchiquetées plongent dans les ondes menaçantes. Les grèves sont parsemées de galets de nacre.
J'ai achevé mon festin de raies et de lamproies, et je pleure sur mon assiette vide sous le regard étonné de mon hôte. - Vous avez, me dit-il, le mal du pays. Nul ne se plait chez nous, tous aspirent aux couleurs éclatantes du midi. Et pourtant nous sommes accoutumés à cette nuit si longue et la trouvons douce. Quelle intimité dans nos demeures et que nos épouses sont accueillantes! Nos fils sont beaux et robustes. Ils nous secondent de leur jeune vaillance dans la chasse au gros gibier de mer. Leurs yeux clairs n'ont jamais connu la lumière cruelle de la vie et le souci des riches leur est étranger.
VI. Le lac Au centre du pays s'étend une région de lacs et de vallées profondes. Je me suis perdu dans le labyrinthe des colonnes de cuivre qui bordent les miroirs gris. Passent des nuages et de grands oiseaux couleur d'eau traînent dans le ciel. La forêt semble inhabitée, mais à la tombée de la nuit, las des membres et du coeur, je découvre une maison de rondins. Non sans appréhension je frappe et demande asile. Deux vieillards de haute taille m'accueillent froidement et me ménagent une place à leur table. Ils m'offrent du potage couleur de mousse. Je ne puis leur parler mais de les observe. La femme est dure et sans âge. Ses cheveux forment un chignon inflexible. Son mari est si ridé que les plis tombent sur ses lèvres minces et décolorées. Ils m'interrogent mais je ne réponds pas, ce qui m'attire leur sympathie.
La porte s'ouvre brutalement et deux jeunes gars, fils ou petits fils, s'attablent bruyamment, parlant un idiome que je ne comprends pas. Leurs visages aux traits réguliers sont lisses et rougis par la chaleur de la flamme et leurs grands yeux limpides me fixent sans expression mais quand ils se croisent, s'animent et s'adoucissent tour à tour.
Les parents qui tantôt me considéraient avec une certaine bienveillance, me font signe de partir. J'essaie de retarder leur résolution sous un flot de paroles mais un des garçons arbore un sourire moqueur et se lève, menaçant. Sans attendre mon dû, je sors dans la nuit.
ECRIVAIN Je trouve poignant ce choc des cultures, la récurrence du thème de l'incommunicabilité est le fil rouge commun aux Sonnets et à ces petites pièces. L'image du jeune homme aux yeux de glace se reproduit inlassablement, désir d'un amour déçu, expression d'un manque affectif profond.
SOCIOLOGUE
Comme je vous l'ai suggéré, ces personnages nordiques sont la projection de l'animus refoulé du poète envahi par son anima. C’est ce qui explique la résonance nostalgique et féminine de ces lettres.
JOHN ABELL
Après l'animus et l'anima, voici l'ombre!
VII. L'ami Un homme paraissait m'attendre. Je ne puis distinguer ses traits mais sa voix m'est familière. - Viens, me dit-il en me saisissant par la manche, ils ne sont pas pour toi. Vois, je t'ai rejoint, tu n'es pas seul. Aussi sèche le sang de tes paupières, les larmes de ta poitrine et suis moi. – Je ne sais si je dois me réjouir de nos retrouvailles, répondis-je. Je t'ai peu connu et toujours dans les moments d'affliction. Aussi te revois-je sans plaisir. – N’est-ce pas une marque de fidélité que de coller aux nuits de détresse ? Ne me le reproche donc pas et utilise plutôt mes talents qui sont multiples. Loin du Grand Nord, je te conduirai aux palais mathématiques et aux prairies chantantes. Ton coeur en sera raffermi, et réconforté, tu puiseras à l'eau d'argent oubli et espérance. - J'ai de la peine, dis-je, car mon ami s'est retourné contre moi, et n'osant soutenir le combat, j'ai pris la fuite. Bien qu'il soit attaché à me perdre, il est toujours de mon sang. Loin de ceux qui m'ont trahi, je suis exilé de l'eau vive des torrents, de l'eau joyeuse de l'amour, de l'eau grondante des averses perlées. Elle avait des yeux d'eau profonde, celle qui est perdue pour moi, des yeux d'eau sauvage qui réfléchissaient mes pensées intimes.
SOCIOLOGUE
N’est-ce pas limpide ? Lui : de mon sang, elle, le miroir d'eau vive, l'homme mystérieux : notre part d'ombre.
ZOUBOV
On ne peut en effet manquer de relever l'opposition entre le rationalisme abstrait de l'homme noir et la sensualité des amants criminels. Assez curieusement, la tendresse est l'apanage de l'Autre!
JOHN ABELL
VIII. Le philosophe A mi-chemin, entre lac et montagne et non loin de la route du sud, voici le kiosque du sage musicien-poète-calligraphe et amateur de pierres dures que j'aurais bien voulu devenir. Ayant atteint les cimes austères de la maîtrise, son pinceau fait jaillir d'un rocher de sépia une vive cascade d'où me parvient un grondement lointain. Un frôlement de ses doigts boudinés, tire de l'orgue de cristal tous les délices d'un sentiment honteux. La même main manie avec une égale dextérité le thym et la marjolaine, la graine de moutarde et le bois de santal. La maîtrise, il l'a oubliée, il est très vieux et il sourit.
Lui ayant confié mon secret, je lui demande conseil. Il me montre alors un écran de fines lames de métal poli. "Tourne le miroir contre le mur sans le regarder, attends et oublie". Malgré moi j'enfreins l'interdit et me surprends à jeter un coup d'œil sur le rouleau de lames miroitantes. La vue se trouble en le fixant. Des formes émergent à sa surface comme des bulles de savon, de lignes fuient poursuivies par des taches rougeoyantes.
Une image me transperce. Au bord d'une plage, des hommes nagent sous le disque zénithal. Ils caressent des filles d'une blondeur amoureuse, sous le tintement argentin des vagues. Ils plongent et émergent de l'écume, se dressent les yeux brillants pour offrir à leurs compagnes des coquillages et des galets irisés. Tandis qu'ils s'enlacent, leurs corps harmonieux sont animés par la plus parfaite des danses, celle des spirales agiles courant sous la chair. Soleil brûlant, le vent souffle en force et plie les mancenilliers dociles. J'entends un cri de détresse : trop tard, trop tard!, renvoyé en écho par le miroir.
Voici la réponse, dit le philosophe souriant, en rangeant ce qui n'est qu'un rouleau de lames d'acier. L'important c'est la lanterne. Rien ne paraît plus souhaitable aux hommes que le néant, murmure-t-il. Seule la sagesse est fuie. Sa conquête paisible est considérée comme un affreux renoncement par ceux qui saisis par l'ivresse de la vie en oublient de vivre.
CRITIQUE
Dialectique classique et sans fin ! Opposition entre l'aspiration à une sagesse désincarnée et le regret d'une jeunesse animale qu'on a oublié de vivre alors qu'il en était encore temps.
SOCIOLOGUE
Le poète éprouve certainement une immense frustration; le désir inassouvi d'un enracinement voluptueux dans la splendeur charnelle. Sublimation trop tôt venue, tardif réveil à la vie des sens, perçue dès lors comme le seul bien enviable.
ARTISTE
Il n'y a qu'Eros de vrai : baiser, baiser et encore baiser. Tout le reste n'est que littérature.
ECRIVAIN
Ne la sous-estimez pas. Elle nourrit bien des espérances, elle fait vivre et ... elle me fait vivre!
JOHN ABOTT
IX. Le gardien
La région de la forêt où passe l'ancienne route du sud, est aujourd'hui évitée par les promeneurs et les villageois. Je m'y aventure néanmoins pour découvrir le secret de l'interdiction. La tendresse du printemps est proche, blanche est la forêt, chantent les oiseaux.
Au bas du vallon des bouleaux mauves succèdent aux pins torturés. Au pied du premier arbre en fleurs sommeille un jeune homme au soleil matinal. Ses cheveux épais brillent comme de l'or mat, ses lèvres pales sont pleines et bien dessinées, son corps est lisse et puissant, ses membres couverts d'une étrange toison métallique. Ce sont les yeux qui me terrifient : grands ouverts, d'un vert inhumain, ils me fixent d'un regard aveugle. Le silence est total et, pour ne pas réveiller le génie, je pénètre dans la forêt violette. Je suis sauvé.
CINEASTE
Encore l'oiseleur.
SOCIOLOGUE
Archétype fondamental
JOHN ABELL
X. Crépuscule Je me trouve au sommet de la colline dans le précieux jardin japonais d’un amateur d’art. Les pins fléchissent gracieusement vers le couchant et les cyprès esquissent une danse orchestrée par les nuages de soufre vert.
L'océan au sud, la lagune au nord, tissent une toile de cristal sous le chant du ciel. La terre accélérant sa rotation, le firmament bascule inexorablement dans le proche horizon. Pareille à un bienfaisant démon, la nuit percée d'étoiles se lève, précédée de la faucille d'argent. Mon âme vibre à la caresse tendre du souffle qui du sol monte en moi.
L'ami qui se tient auprès de moi m'interroge avec douceur: - pourquoi pleures-tu? N'est-ce pas une soirée magnifique? - Je lui réponds fermement, car je ne pleurais point bien que des larmes voilassent mon regard ébloui.
- Je laisse derrière moi les massifs du Nord, devant moi l'air ardent secrète les mirages du midi. Mon coeur gonfle comme une boule de flammes et pourtant le froid de la nuit engourdit mes jambes. Le chant des vagues me berce et j'en lis les harmonies dans les nappes du ciel.
J'épouse la forme aimée pour mieux la posséder. Mes pupilles agrandies brûlent comme des papillons au feu du crépuscule. Des flammèches dansent dans la solitude et mes oreilles épient les sifflements de la brise. Tous les poils de mon corps se dressent dans l'air fraîchissant. Thym, pin et basilic mêlent leurs effluves désenchantés.
Arrive ô douce nuit
ô douce amie
et que ma peine s'endorme
dans tes bras légers !
ÉCRIVAIN
Je trouve ces derniers vers émouvants.
JOHN ABELL
Ils sont de Tchou-so-Su, in poète chinois mort en 1459 à l’âge de cinquante et un ans..
CRITIQUE
Encore des chinoiseries ! Vous le saviez, Zoubov et vous nous avez mystifié. Tout cela n'était donc qu'une paraphrase supplémentaire de L'Histoire d'un Fleuve.
ZOUBOV
Pure coïncidence, croyez-moi, c’est l'air du temps qui l’a voulu... Voyage d'Hiver et Flûte de Jade, sont contemporains de la Maison des Grenades et du Chant de la Terre. Même thème, même atmosphère. C'est la raison pour laquelle j'ai réuni ces pièces pour vous en donner lecture.
MUSE
La similitude avec L'adieu est frappante. L'ami (est-ce encore l'ombre?), les pins fraîchissants au crépuscule, la sublime beauté douce-amère de la terre assoupie...
CINÉASTE
Un mien ami me confiait que L'adieu lui rappelle l'Orient.
ZOUBOV
La villa de l’amateur d’art ressemble étrangement à celle d'un certain docteur Lévy. Elle est perchée au sommet de la colline rouge de Sidi-Bou-Saïd, auprès du phare. On peut y contempler Carthage, et les ombres violettes de Bou Cornin et de Saint Germain tant chantées par Paul Klee.
ARTISTE
Le plus magique des peintres aurait pu illustrer ce cycle avec bonheur. Le Dieu de la Forêt Nordique, Feux dans la forêt, le Jardin Botanique..
ZOUBOV
Vous avez ma foi raison. Les oiseaux tête en bas, pattes vers le ciel, c'est du Klee de la meilleure veine! Lisez-nous à présent la dernière pièce du cycle John-John.
JOHN ABELL
XI. Le Palais de l'Océan Une touffeur oppressante règne dans les stalles de mosaïque bleue et verte du rez-de-chaussée surbaissé, autrefois bain de vapeur pour courtisanes et pour mignons. Aujourd'hui, les frondaisons oscillantes projettent des ombres inquiètes sur les parois brillantes. Un silence pesant étouffe les cris d'un souvenir encore proche. C'est un rez-de-chaussée au sol luisant d'humidité; aux fenêtres hautes et grillagées, hanté par des fantômes indécents.
On accède par les créneaux à la grand-salle du premier. Des tapisseries exaltent les tueries des conquérants. Le salon portugais aux hautes et étroites ouvertures d'où l'on admire la mer violette et le ciel cru traversé de mouettes, domine les buissons qui étouffent le rez-de-chaussée.
Le salon portugais conduit à la bibliothèque par un escalier en colimaçon. Ah! Que de choses curieuses y découvre-t-on ! Rien de ce qui touche à l'Océan ne paraît manquer : mappemondes, compas et portulans, maquettes de voiliers, épais in-folios ... et les bannières des pays dont les flottes ont été vaincues. Des lucarnes on ne voit que les étendards animés par le vent du large.
Assez loin de là, se trouve le Palais de l'Océan. On y arrive par l'avenue de Barcelone, aux hôtels baroques habités par des femmes d'amour, aux salons de thé équivoques. Ce soir l'avenue est pleine de promeneurs nonchalants, de voitures d'enfants, de gardiens en uniforme. Le soleil, énorme boule d'émeraude, descend majestueusement dans la mer toute proche.
Le Palais de l'Océan y plonge par un double escalier en spirale, aux balustrades incrustées de moules et d'astéries. Au premier l'immense salle de bal est réservée aux magnifiques réceptions solennelles, auxquelles nul n'a jamais été convié.
Au pied du palais, une longue galerie couverte longe la plage. Bordée de terrasses, côté océan et de boutiques désertes, côté lagune, elle mène à la gare souterraine des adieux.
ECRIVAIN
C'est franchement onirique!
ARTISTE
Il y règne une atmosphère de bordel.
GALINA (choquée) De bordel?
CINÉASTE
De maison close, si vous préférez. Touffeur de hammams, courtisanes et éphèbes; femmes d'amour... Et pour finir, la gare des adieux.
ARTISTE
Hebdoméros aprés Maldoror. Chirico succède à Lautréamont et à Paul Klee.
ZOUBOV
Vous avez la fibre picturale, mon cher.
ARTISTE
C'est mon destin.
ZOUBOV
Voulez-vous John-John nous frayer la voie au delà de la gare des adieux?
JOHN ABELL parle, mais les voix s'évanouissent et la scène s'obscurcit.