*** *** Séquence X, 2ème partie
Le salon de Mrs. Reubenstein Dans la réserve
Satire à peine exagérée du modernisme snob. Au moment d’écrire ces lignes, voici trente ans, j’étais loin de me douter que ces canulars se réaliseraient. Aujourd’hui un mouvement très prisé par les spécialistes promeut l’art corporel : mutilation, déjections, entrailles béantes, crucifix baignant dans l’urine etc. Le reste est à l’avenant, y compris le kitsch que vient de découvrir la mécène. Les peintres cités et les discours sur leur art, sont en majeure partie authentiques et il est difficile de démêler le vrai du faux. Cette séquence fait diversion à l’atmosphère angoissante de la précédente.
Mme REUBENSTEIN
Je vais vous montrer en vitesse mes dernières acquisitions, après quoi, au dodo!
Mme AMAURY
Nous ne voulons pas vous empêcher de vous reposer après cette...
Mme REUBENSTEIN
Précisément, la vue de ces merveilles artistiques nous distraira de cette ennuyeuse expérience d'universitaires. Le beau, l'art authentique, c'est la meilleure des panacées. J'y trouve une élévation, une sérénité, qui manquent à vos diableries scientifiques. Je vais vous présenter un jeune homme très compétent. Il me conseille dans mes achats et je viens de réveiller le pauvre garçon pour qu'il vous serve de mentor, car aujourd'hui, il n'est plus question d'aimer, il faut être coachés pour pénétrer les arcanes de l'Art contemporain.
Entre Alonzo Vacca della Strambugia. Jeune homme à l'expression vieillie, long, maigre, jaunâtre, aux yeux gris délavés. Voix monocorde de commissaire priseur.
ALONZO
Les derniers spécimens que vient d'acquérir Madame Reubenstein, s'inscrivent dans le prolongement des recherches de ces dernières années dont je vais vous montrer quelques jalons non négligeables.
Voici tout d'abord un immatériel d'Yves Klein. (Il montre l'air ambiant). Le reçu de 5250$ de cette oeuvre invisible mais non inexistante, qui en fonde la valeur et la réalité, se trouve à la banque. On vient de nous en proposer, pas plus tard qu'hier, 50.000 $, ce qui témoigne d'une belle vitalité pour une oeuvre aussi peu encombrante.
Yves Klein a effectivement vendu des immatériels, mais Madame Reubenstein a enfreint les règles du jeu. Elle devait payer Klein en feuilles d’or, dont la moitié devait être jetée dans la Seine par le peintre, et le reçu devait être détruit, effaçant toute trace de la transaction.
Klein est un peintre français célèbre pour avoir inventé des monochromes de couleur uniformément or, rose ou bleu, les couleurs de la rose-croix. Notamment son bleu très lumineux (l'IKB) a été breveté. Avant lui le peintre soviétique Rodchenko avait vers 1918 peint des monochromes jaune, bleu , et rouge, métaphores de la fin de la peinture.
Max FUCHS
Toute la pureté est dans le concept, distillation ultime de l'Occident.
Lorsque ces lignes ont été calligraphiées, le mouvement conceptuel venait de gagner ses lettres de noblesse avec Kosuth.
Kosuth a produit des oeuvres composées d'un objet, de la photo de l'objet et de sa définition dans un dictionnaire pour illustrer l'idée de signifié unique pouvant être représenté par plusieurs signifiants, par exemple l'idée de chaise ou d'horloge. C'est un des initiateurs de l'art conceptuel.
ALONZO
Ceci est une œuvre document, point de départ des tendances dominantes de demain. (Il montre la photographie d'un champ). Voici un terrain situé à 12 miles 524 au nord de Chipeedwick. Il est recouvert de neige et noyé de brouillard. La flèche rouge indique l'endroit précis où l'artiste a fait une chute. Elle est préméditée, mais non l'entorse qui ajoute l'élément aléatoire indispensable aux happenings. Et ça… (Il tire d'un carton divers chiffons douteux) ce sont les bandages qui ont servi à panser l'entorse et le reçu de l'hôpital de 225 $ 45 cents, joint à la note du médecin et à un extrait du procès- verbal passé devant huissier et relatant les circonstances de l'accident.
Ce n’est pas une plaisanterie, c’est du Land Art !
Parodie du Land Art, dans lequel on montre un terrain quelconque, où un objet ou un évènement sont mis en situation et assorti de photos et de cartes. Mme. FUCHS (glapissant) C'est passionnant!
Mme REUBENSTEIN (fière) J'ai même pris le thermomètre sur la table de chevet. Brutosk, l'artiste, a trouvé que ça introduisait une composante, une composan-te...comment dites-vous Alonzo?
ALONZO.
Une composante mécénologique, madame.
Mme. REUBENSTEIN
Cela vient de mécène, (elle se montre).Moi.
Madame Reubenstein est une parvenue, enrichie par trois divorces successifs. Son inculture serait aujourd’hui incompréhensible par les élites qui fréquentent les salles de vente. ALONZO
Une coutume séculaire montre le donateur accompagnant le peintre dans le tableau. En acceptant de céder le thermomètre, Brutosk a révélé par là son attachement à un passé qu'il vénère.
Mme REUBENSTEIN
Betty Fitzgibbons m'en a offert le double de ce que j'ai payé, rien que pour la composante mécéno…logique. C'est la première fois qu'on la rencontre dans du Land Art.
Max FUCHS
Ce qui en fait une pièce historiquement comparable aux peintures sur bois des primitifs flamands.
ALONZO
Mieux encore, Monsieur, car cette oeuvre est unique dans son genre : sitôt conçue elle a récusé à perpétuité toute descendance.
Mme REUBENSTEIN
Il veut dire qu'elle démode toutes celles à venir. Elle est protégée comme par un brevet ou un dépôt de marque. La Fitzgibbons ne pourra avoir la sienne.
ALONZO
En revanche elle a un important Kosuth que vous avez dédaigné.
Mme REUBENSTEIN
Ah, oui, ces feuilles de dictionnaire. On y joignait pour le même prix une horloge de cuisine. Vous voyez ça dans mon salon!
ALONZO
Ce n'est pas une pièce destinée à être exposée, certainement pas dans un salon, à la rigueur dans un musée.
Mme REUBENSTEIN
Et puis il y avait une page de définition de French Cooking. Avec ce que disent de moi les méchantes langues!
Max FUCHS
Le sujet n'est qu'un prétexte. L'important, c'est le concept.
ALONZO
L'art comme art, comme Art.
FUCHS, KAHN et REUBENSTEIN, en chœur
L'art comme art, comme art !
Slogan indéfiniment ressasé par les théoriciens de l'art conceptuel.
Max FUCHS.
L'idéation délivrée de l'image et portée à sa puissance majeure.
ALONZO
À une puissance hallucinante que seules les mathématiques modernes permettent d'atteindre.
La rétention esthétique se joint à la naïveté scientiste et à l’admiration béate de l’ignorant pour les mathématiques, inénarrable superficialité des théoriciens modernistes.
Max FUCHS
La sérénité de la musique des sphères
dans la banalité du journal d'avant-hier.
ALONZO ânonnant
Inintérêt total et désaliénant, ennui brut et déconstructeur.
Là encore, nulle parodie. Les mouvements conceptuels et minimalistes prônent le banal, le non intentionnel, le quelconque.
Mme REUBENSTEIN
Ca va, ça va avec ces litanies. La suite et on va se coucher.
ALONZO. (Il montre une carte postale agrandie représentant un navire)
Mme AMAURY
On dirait une carte postale!
ALONZO
C'est en effet la peinture fidèle d'une carte postale. Le peintre, Morley, au prix d'une dure discipline qui lui coûta ses yeux, s'interdit d'introduire dans ses peintures le moindre trait original, personnel ou esthétisant. Il entend ex-primer par là la vacuité du contenu du simulacre. Et voici un exemple de cette démarche dû à Richard Estes.
Authentique. Les illustrations du manuscrit sont des copies fidèles d’œuvres de Morley et de Estes. Morley partage avec les artistes conceptuels le culte de la non-intentionnalité et la dénonciation des valeurs esthétisantes européennes. Morlez et Estes sont des artistes dits photoréalistes ou hyperréalistes, remarquable par l'extraordinaire fidélité de leurs toiles, à l'original, consistant en des photographies.
BASIL AMORY
Il me semble qu'on a déjà fait cela dans l'antiquité.
ALONZO
Sans doute avez-vous raison au premier degré. Mais Xeuxis, n'a pas connu Ad. Rheinhard, lui même inspiré par l'avant-garde russe. A première vue, voyez-vous, si j'ose m'exprimer ainsi, la vision des hyperréalistes paraît relever du pompiérisme. Mais elle peut revendiquer des sources plus nobles : le minimal art, Hooper, la négation objectivée et transcendantale des stéréotypes abstraits, par l'affirmation transcendée et objectivée des stéréotypes de la vie urbaine américaine. Voyez par exemple cette toile. Que vous raconte-t-elle?
Mme AMORY
J'y vois un cinéma.
Max FUCHS
L'oeuvre projette un artefact.
ALONZO
Et que voyez vous donc dans ce cinéma, s’il vous plait?
B. AMORY
Une inscription, Hot Girls, filles chaudes, et une pancarte représentant des prostituées.
Max FUCHS
L'oeuvre représente la peinture d'une scène de débauche.
ALONZO.
Allons plus loin, de grâce. Ces filles, de quelle couleur sont-elle peintes?
Mme AMAURY.
Elles sont... Comment dire... elles sont grises comme si elles avaient été photographiées.
Max FUCHS.
C'est très certainement une peinture faite d'après des photos. Des filles artificielles ont posé pour une caméra. On en a tiré un agrandissement recopié sur un calicot publicitaire accroché à la devanture du cinéma. Après quoi l'ensemble a été photographié par Estes, qui a peint sur toile l'agrandissement de sa photo, sans doute une diapositive, d'où le chef-d’œuvre que voici.
Mme AMAURY.
Ca donne le vertige.
ALONZO.
Je vois, Monsieur, que vous savez décoder les oeuvres hyperréalistes. (il montre un pot à moutarde)
Ceci est proprement extraordinaire. Ce pot contient les excréments du grand artiste Rimmel, une des grandes figures de l'Avant-garde. La valeur documentaire exceptionnelle de ce travail provient de sa date : 1960. Il précède donc d'un an le pichet d'urine de Ben et la Merda d'artista de Manzoni qui de surcroît est tiré à des dizaines d'exemplaires, autant que de jours de défécation dans le trimestre. Cela fera école.
Manzoni a produit des boites de conserves contenant ses excréments, qui sont devenues des icones de l'art contemporain. Des cartes postales de la merde d'artiste sont vendues dans les librairies des grands musées
Mme REUBENSTEIN
Je l'ai eu pour une bouchée de pain, et depuis ça a beaucoup monté.
Ce passage, écrit dans les années quatre vingt peut être considéré comme une anticipation réussie : aujourd’hui, l’art coprophagique, de Gilbert et Georges à Delvoye, a conquis une place importante dans les expositions et les musées. L’excrément est devenu sujet et médium à part entière. La merda d’artista de Manzoni se vend à prix d’or, et si Rimmel avait existé, il eût valu encore plus cher. David Nebreda, artiste espagnol, épouse en 1990 l'excrément jusqu'à s'en maculer le visage. Madame Reubenstein a fait un bon placement.
Max FUCHS
Je suis plus réservé quant à l'intérêt historique de cette démarche. C'est du déjà-vu. Du post-Dada. Dans son premier Merzbau, Kurt Schwitters avait déjà enfermé un témoignage de sa production corporelle. Tenez, je trouve même dans votre pot, une provocation kitsch esthétisante à la Clovis Trouille!
Clovis Trouille, porté aux nues, par dérision, par Salvador Dali, est un imagier passéiste flattant la perversion des décadents parisiens et représentant des religieuses dans des positions obscènes. En revanche, des experts comme Eward Lucie Smith reconnaissent que les provocations modernistes sont en deçà de DADA. ALONZO
Il ne faut pas décrypter ce document avec des lunettes trouillesques, mais selon le code de l'art éphémère. N'avez-vous pas décelé dans ce humble bocal, quelque chose de vivant, donc de changeant,de changeant donc de vivant? Demain il revêtira une autre texture, sa couleur virera jusqu'au moment où il ne subsistera de cet objet qu'un cadavre fossile. Une oeuvre qui meurt, est une oeuvre qui vit, qui vibre, vile peut-être mais si émouvante dans sa précarité.
Anticipation de l’Art éphémère. Robert Gigorov, en 1997, laisse pourrir sur lui, deux mois durant, une veste en viande.
Mme AMAURY
Pour ma part je ne trouve rien d'émouvant dans un pot de ... de... (Elle déglutit), dans un pot à moutarde.
Mme FUCHS
Vous n'avez pas encore dépassé vos stéréotypes de bourgeoise attachée à ses bibelots Louis XV. La nature rude et authentique vous effraye.
Mme REUBENSTEIN
Justement, le conservateur du musée d'Oshawa qui m'a rendu visite hier, a trouvé que mon goût était très anti-bourgeois. Il a même ajouté qu'un jour ma collection serait citée comme un refuge des non-valeurs de la civilisation occidentale. C'est bien ça Alonzo?
ALONZO.
Oui Madame et c'est un éloge non insignifiant dans la bouche de Jean Dumaine qui est un expert écouté.
Voici à présent un Kudo. Ce grand peintre japonais émigré en Europe, décrit dans son style spécifique, la civilisation post-hiroshimiesque... pardon, post-hiroshimesque. Il enferme dans des cages fluorescentes, chasses des temps à venir, des escargots phalliques bavant sur des crucifix de fausse matière plastique. Voici un de ces chefs-d'oeuvre : le masque décomposé d'Ionesco contemplant un phallus insolent émergeant d'un pot d'excréments. Ce remarquable mini-environnement est complété par des pièces maîtresse : le crucifix que je viens de citer et ce pied nu accroché à une potence et vampirisé par un pénis suceur. Voici une illustration de la terrifiante joie de vivre qui caractérise la nouvelle écologie.
Authentique, mais Kudo naguère tombé dans les oubliettes, est cependant honoré à Paris, d'une rétrospective.
Mme REUBENSTEIN. (Compétente)
C'est de l'Art écologique.
ALONZO
Quelques mots à ce propos, sur cette pièce de Cacodimonte. (Il montre une sphère close, à demi-remplie d'eau et reposant sur un réchaud électrique actionné par une pédale). Lorsqu'on chauffe la sphère, l'eau entre en ébullition et se condense au somme pour dégouliner, refermant ainsi le cycle des phases. Quelle audace dans la simplicité! Symboliser ainsi notre destin par une sphère de cristal, goutte d'eau distillée ou univers.
Mme REUBENSTEIN.
Ça montera, ça, c'est sûr!
ALONZO.
C'est grand, c’est fort, c’est bien dans la lignée des Vermeer, des Duchamp et des Klein!
Mme REUBENSTEIN
Et c'est aussi de l'art écologique. J'y crois beaucoup et d'ailleurs je pratique le zen macro-biotique.
Mme AMAURY
Tiens, moi aussi !
Mme REUBENSTEIN
Vous allez à la boutique du poisson qui pleure?
Mme AMAURY
Non. Je me sers dans une épicerie chinoise, le Lotus de Pékin, qui a un rayon macrobiotique.
Mme REUBENSTEIN. (Péremptoire et méprisante)
Il n'y a que le poisson qui pleure pour vous assu-rer la qualité macrobiotique authentique de vrais produits en équilibre zen.
L’épouse de Nicolas Schoeffer était une adepte fanatique de la cuisine macrobiotique et a servi de modèle à Mme Amaury.
ALONZO. (Toussant pour attirer l'attention) Ceci est un peu dur. Cette installation s'intitule "La Boucherie". Comme vous pouvez le constater c'est bien imité. Voici sur la balance un torse d'homme écorché, tête rasée pour l'hygiène. Les raviers contiennent des yeux, des langues, des pieds, des seins blancs ou bistres, des pénis de toute forme : en bananes, en cornichons, en saucisses, en brochette, au vinaigre
Max FUCHS.
J'ai déjà vu quelque chose de semblable au Musée de la Ville de Paris, l'été dernier.
ALONZO
Je vois. Vous faites allusion à l'installation de ce nabot sinistre, un canadien. Mais ce que je vous montre est d'une qualité supérieure, car c'est antérieur, et ... c'est authentique.
L’Exposition Sydney 2002 a présenté une simulation de Gilles Barbier montrant des bouchers en train de dépecer, vivants, des corps humains.
Mme AMAURY pousse un cri de dégoût. ALONZO.
L'injection de produits réducteurs a permis l'obtention de cette belle couleur rose et appétissante. (À Max Fuchs). Souvenez-vous, Monsieur, que les organes confectionnés par le canadien prenaient une teinte brunâtre peu séduisante.
En 1997, la réalité a rattrapé la fiction. Von Hagen réalise ses cadavres momifiés par une injection de plastiline. Mme AMORY.
Comment a-t-on le droit de....
ALONZO.
On a obtenu le consentement des modèles.
Mme REUBENSTEIN.
Avant leur mort.
ALONZO.
Ce ne sont d'ailleurs nullement des malades. Hans Wessel, l'artiste, n'admet que des êtres jeunes et sains, propres à l'étal et qu'il écorche fort méticuleusement. Dans un de ses chefs- d'œuvre : La Grande Boucherie, dont Madame n'a pas voulu acquérir l'environnement qui, il est vrai, manquait de ... discrétion, ce sont tous des moins de trente ans, pendus à des crocs de boucher et écorchés à maints endroits pour laisser admirer le jeu des muscles. Duane Hanson et Michel-Ange réunis en une admirable épiphanie charnelle.
Duane Hanson, comme d'Andrea, est un sculpteur hyperréaliste, reproduisant les corps avec une vérité saisissante, sans le caractère figé des figures de cire du musée Grévin.
Max FUCHS
Mais comment sont-ils morts?
ALONZO.
En général ils trépassent un à deux ans après avoir touché l'argent de la donation. Ils le dilapident aussitôt et se fourrent dans des pétrins invraisemblables. Un jour vient où arrive ce qui doit arriver : coup de poignard portoricain, chute dans une cuve d'huile d'olive, ou tout simplement drogue synthétique frelatée. Il est si facile de mourir dans certains paradis exotiques ! En général quand on les récupère, ils ne sont pas trop endommagés.
Mme AMAURY.
C'est ignoble! De telles pratiques devraient être interdites par la loi.
Mme FUCHS.
Ce n'est plus de l'art, c'est de l'assassinat.
Max FUCHS.
De l'assassinat considéré comme un des beaux-arts.
Dr. KAHN. (Ayant assisté plus d'une fois à la visite, il sort de son mutisme).
C'était le point de vue de certaines élites chinoises, immortalisé par Octave Mirbeau dans son Jardin des Supplices. Vous êtes prisonniers de vos tabous judéo-chrétiens. La part du diable, qu'est-ce que vous en faites?
Max FUCHS.
Après tout, de telles pratiques ont existé de tous temps.
BASIL AMAURY.
J'ai connu jadis de splendides matelots norvégiens, à la chair lisse et ferme, qui me servirent de modèles. Ils finirent par se faire tatouer à Nihavn, le quartier spécialisé de Copenhague. On leur versait une pension viagère en échange de leur scalp.
Le tatouage fait aujourd’hui partie de l’important mouvement de l’Art corporel qui pratique notamment des mutilations pouvant entraîner la mort. (Gina Pane, Orlan etc).
ALONZO
Ils avaient de fortes chances d'abréger leur vie sans que leur précieuse parure soit endommagée.
BASIL AMAURY.
Certains de ces tatouages sont tout à fait remarquables, toute une recherche iconographique leur a été consacrée cette année par un département de l'Université de Santa Samarea.
MAX FUCHS
N'exagérons rien. Cette imagerie populaire n'est pas à proprement parler artistique, elle ne saurait prétendre au statut...
Mme REUBENSTEIN. (L'interrompant, sûre d'elle).
J'ai lu moi aussi un article sur les tatouages paru dans le Financial Tribune. Il parait que les meilleurs valent des fortunes!
Mme FUCHS. (Pincée)
Veuillez nous excuser, mais nous voudrions nous retirer.
Mme AMAURY
Moi aussi, je vais prendre congé, je me sens soudain fatiguée et demain je dois me lever de bonne heure.
Mme REUBENSTEIN
C'est bien dommage car vous ne verrez pas les merveilles que je viens de recevoir : une poubelle d'Arman, très ancienne, ramassée chez un pédicure pédéraste, une théière emballée par Christo et un chat de l'époque Han empaqueté par le même. Il y a aussi une caisse pleine de chaussettes sales de Piotr d’Islande.
ALONZO I
Il n'utilise que des sous-vêtements qu'il a portés personnellement, ce qui limite la production et en garantit l'authenticité.
Authentique : il s’agit de Deschamps, de La Villéglé et, bien entendu, d’Arman.
Mme REUBENSTEIN
Et puis... il y a cette chose folle. Il faut absolument que vous la voyiez car c'est ma découverte personnelle. C'est l'oeuvre d'un jeune suisse, beau comme un dieu étrusque, l'oeil vif, les hanches étroites, le poitrail impressionnant, et avec ça, doux comme un lionceau amoureux. La critique a dit de lui, qu'il apportait une bouffée d'air pur dans la pollution des galeries new-yorkaises.
Dr. KAHN. (Aigre)
Précisez chère amie. On a écrit dans New Old Art que ses croûtes apportaient dans la porcherie de l'avant-garde de Soho, une bouffée de l'air des étables helvétiques.
La séquence s’achève de manière burlesque. Mrs. Reubenstein montre l’art qu’elle comprend et qu’elle aime, qui est aussi celui préféré par la petite bourgeoisie et par les masses incultes. On ne saurait mieux illustrer l’abîme qui sépare l’Art moderne prétendument ouvert au peuple, et le goût spontané de ce dernier.
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Signaux faibles Le rapport signal-bruit est un paramètre important qui a un impact décisif sur la désinformation. Celle-ci fleurit en effet, lorsque les messages sont noyés dans le magma: bruit de fond, signaux parasites, formes aléatoires, in
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