Nicolas Sarkozy aux prises avec Lyssenko
La polémique autour de l'inné et l'acquis
Le docteur Mario Bensasson, esprit curieux et cultivé me rapporte, indigné, le débat Nicolas Sarkozy - Michel Onfray dans le N°8 de Philosophie J'ai rendu compte de son écho dans Le Nouvel Obs, qui n'a présenté que l'opinion du "philosophe", qui n'est qu'une longue litanie d'injures de style soviétique. Car c'est bien de cela qu'il s'agit, car ce qu'on reproche à Nicolas Sarkozy est aligné sur la position du PC pendant la guerre froide, condamnant la génétique de Mendel, comme étant incompatible avec la doctrine communiste, et menant au nazisme. La grossiereté de l'attaque, qui n'honore pas le magazine qui l'a présentée dans des pages pleines de complaisance, m'a dissuadé de me reporter à l'article de la publication citée.
Le docteur Bensasson s'étonne que l'on puisse ainsi ériger en condamnation idéologique ce qui relève de la connaissance scientifique la plus répandue. En effet il est largement prouvé que le développement de l'homme résulte de la combinaison de caractères innés, génétiques ou géniques et de leur exploitation par l'environnement et l'acculturation. Si les nazis se sont exclusivement centrés sur l'inné, (cf.L'innéisme), les communistes ont misé exclusivement sur l'acquis. Ainsi Mendel a-t-il été considéré un adepte de la science bourgeoise, alors que Mitchourine, a été loué, pour ses déclarations en faveur d'une science exclusivement fondée sur les doctrines de Marx, Engels, Lénine et Staline. Les plus grands généticiens russes et tous ceux qui osaient les citer étaient envoyés au Goulag pour y mourir dans des conditions atroces. Tout cela, parce qu'on estimait que seul un environnement culturel correct, pouvait transformer n'importe quel homme en un parfait communiste. Le fait que l'on pouvait hériter d'une psychose, contredisait le principe de la toute-puissance de l'endoctrinement égalitaire communiste.
Ceux qui ont diabolisé Nicolas Sarkozy pour avoir osé rappelé que l'acquis n'est pas seul responsable, et qu'une part déterminante d'inné pouvait rendre compte de certaines pathologies psychologiques, n'ont pas eu, heureusement, la possibilité d'envoyer le candidat au bagne ou à l'institution psychiatrique.. M.Onffray, n'aurait sans doute pas hésité, à en juger par son appréciation du candidat de "la bourgeoisie". Voici un extrait des répliques incriminées :
N. S. :...l'être humain peut être dangereux. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons tant besoin de la culture, de la civilisation. Il n'y a pas d'un côté des individus dangereux et de l'autre des innocents. Non, chaque homme est en lui-même porteur de beaucoup d'innocence et de dangers.
M. O. : Je ne suis pas rousseauiste et ne soutiendrais pas que l'homme est naturellement bon. À mon sens, on ne naît ni bon ni mauvais.
On le devient, car ce sont les circonstances qui fabriquent l'homme.
N. S. : Mais que faites-vous de nos choix, de la liberté de chacun ?
M. O. : Je ne leur donnerais pas une importance exagérée. Il y a beaucoup de choses que nous ne choisissons pas. Vous n'avez pas choisi votre sexualité parmi plusieurs formules, par exemple. Un pédophile non plus. Il n'a pas décidé un beau matin, parmi toutes les orientations sexuelles possibles, d'être attiré par les enfants. Pour autant, on ne naît pas homosexuel, ni hétérosexuel, ni pédophile. Je pense que nous sommes façonnés, non pas par nos gènes, mais par notre environnement, par les conditions familiales et socio-historiques dans lesquelles nous évoluons.
N. S. : Je ne suis pas d'accord avec vous. J'inclinerais, pour ma part, à penser qu'on naît pédophile, et c'est d'ailleurs un problème que nous ne sachions soigner cette pathologie. Il y a 1 200 ou 1 300 jeunes qui se suicident en France chaque année, ce n'est pas parce que leurs parents s'en sont mal occupés ! Mais parce que, génétiquement, ils avaient une fragilité, une douleur préalable. Prenez les fumeurs : certains développent un cancer, d'autres non. Les premiers ont une faiblesse physiologique héréditaire. Les circonstances ne font pas tout, la part de l'inné est immense.
Il est certain que rien ne permet à qui que ce soit d'affirmer qu'on nait pédophile, encore que le candidat à la présidence parle "d'inclination à penser" et non de certitude. Dire que la part de l'inné est immense, donc du biologique, est conforme au réductionnisme à la Changeux qui est caractéristique des biosciences. Par ailleurs en tant qu'homme politique on a reproché à Sarkozy d'avoir prononce des paroles susceptibles d'être, comme racaille, séparées de leur contexte. Mais c'est oublier, précisément le contexte, oubli caractéristique de la désinformation. Dans les deux cas, Sarkozy n'émettait pas une parole, il répondait à une parole. Dans racaille, il reprenait l'expression d'une habitante des banlieues chaudes terrorisée par ... la racaille ! Car c'est de cela qu'il s'agit. Dans sa phrase " les circonstances ne font pas tout, la part de l'inné est immense", il contredit avec raison les propos de l'étrange philosophe qu'est Onfray : Nous sommes façonnés non par nos gènes mais par notre environnement, par les circonstances familiales et socio-historiques dans lesquelles nous évoluons".
En effet il est scientifiquement difficile d'évaluer le poids de l'inné et de l'acquis. La seule chose que nous sachions, et qu'ignore le grand public, est que contrairement à ce qu'on pourrait penser, le poids de l'inné augmente avec l'âge.
Mais le fond du problème n'est pas là. Onfray a choisi, comme Lyssenko et les communistes de la guerre froide, d'ignorer les données objectives de la science afin de se conformer à la même idéologie : ce sont les circonstances socio-historique qui façonnent l'homme et, je cite : " N.S. Mais que faites-vous de nos choix, de la liberté de chacun? - M.O. : Je ne leur donnerai pas une importance exagérée". On rétrograde soudain un demi-siècle en arrière.
Mais il y a un autre aspect plus répugnant dans ce débat qui tourne à l'invective et à la chasse aux sorcières. C'est un des procédés courants de la désinformation, dit "du miroir" qui consiste à accuser l'adversaire de nos propres travers. On a déjà vu la gauche accuser Sarkozy de tenir les médias, passant sous silence la diabolisation sournoise ou haineuse des journaux Le Monde, Le Nouvel Obs, Marianne, Le Canard Enchaîné, Libé, sans compter l'AFP, et la majorité des radios francophones. De même on a essayé de faire passer le candidat comme un personnage dangereux, violent, incontrôlé, et de faire mine d'avoir peur de ses représailles. A ce jeu, Onfray dépasse toutes les bornes. Il est vrai qu'au delà de la frontière de la décence, il n'y a plus de limites. Notre "philosophe" montre son impartialité en proclamant qu'il va au débat comme on "assiste au musée des horreurs à la faculté de médecine ou au zoo". Voici le décor planté. Il n'y a plus que faire passer l'adversaire pour un monstre ou un singe. Procédé typiquement nazi ou stalinien. Or les minutes des débats ne montrent rien de tel. Nicolas Sarkozy est courtois et posé. Onffray a alors recours à la "non verbal communication", à l'insulte au dénigrement de l'apparence physique et gestuelle de l'adversaire, aux connotations les plus méprisantes et les plus ignobles, precédé également caractéristique des racistes, envers les sous-hommes. Au cas où on estimerait que j'exagère, reportez-voue au blog du Nouvel Obs.
En voici un exemple édifiant où l'étrange philosophe dissèque "le cerveau d'un homme de droite". (Sic). Lui même se décrit comme Senèque face à Néron. (Sans rire).
De fait, l’ensemble de cette première demi-heure se réduisait à la théâtralisation hystérique d’un être perdu corps et âme dans une danse de mort autour d’une victime émissaire qui assiste à la scène pendant que, de part et d’autre des deux camps, deux fois deux hommes assistent, impuissants, à cette scène primitive du chef de horde possédé par les esprits de la guerre. Grand moment de transe chamanique dans le bureau d’un Ministre de l’intérieur aspirant aux fonctions suprêmes de la République ! Odeurs de sang et de remugles primitifs, traces de bile et de fiel, le sol ressemble à la terre battue jonchées d’immondices après une cérémonie vaudoue…
Voici à présent la description du candidat, décrit comme un autiste, bête blessée incapable de tenir un rôle de responsabilité à la tête d'une République bicentenaire.
Début houleux. Agressivité de sa part. Il tourne dans la cage, regarde, jauge, juge, apprécie la situation. Grand fauve blessé, il a lu mes pages de blog et me toise – bien qu’assis dans un fauteuil près de la cheminée. Il a les jambes croisées, l’une d’entre elles est animée d’un incessant mouvement de nervosité, le pied n’arrête pas de bouger. Il tient un cigare fin et long, étrange module assez féminin. Chemise ouverte, pas de cravate, bijoux en or, bracelet d’adolescent au poignet, cadeau de son fils probablement. Plus il en rajoute dans la nervosité, plus j’exhibe mon calme.
Premier coup de patte, toutes griffes dehors, puis deuxième, troisième, il n’arrête plus, se lâche, agresse, tape, cogne, parle tout seul, débit impossible à contenir ou à canaliser. Une, deux, dix, vingt phrases autistes. Le directeur de cabinet et le porte-plume regardent et écoutent, impassibles. On les imagine capables d’assister à un interrogatoire musclé arborant le même masque, celui des gens de pouvoir qui observent comment on meurt en direct et ne bronchent pas. Le spectacle des combats de gladiateurs.
Je sens l’air glacial que transportent avec eux ceux qui, d’un geste du pouce, tuent ou épargnent. Poursuite du monologue. Logorrhée interminable. Vacheries lancées comme le jet de fiel d’une bile malade ou comme un venin pulsé par le projet du meurtre.
Retrospectivement, alors que le candidat Nicolas Sarkozy a gardé son calme face à la saine colère de Ségolène Royal, et que le président de la République est plébiscité par le peuple français pour son ouverture et sa maîtrise, les propos de Michel Onfray posent un problème. C'est celui de l'abîme qui sépare les gens qui lui ressemblent de la majorité de la population. Et plus encore, leur nostalgie de l'époque de la guerre froide, où l'on vilipendait les Kravchenko qui dénonçaient les goulags. Les mots tuent aussi et les "vacheries lancées (par Les Lettres Françaises) comme un venin pulsé par le projet de meurtre" ont poussé au suicide Kravchenko et au désespoir les victimes des camps de concentration soviétique, dont les cris étaient étouffés par les émules de Jean-Paul Sartre. Le cas de Michel Onfray, décrit comme "un des plus grands philosophes français" ou comme "un fou exalté", est tristement représentatif d'une intelligentsia qui se prend pour une entité culturelle légitime. C'est l'aile radicale de Médusa, responsable de ce qu'il y a de pire dans la fameuse "exception française".
L'information derrière l'information
Ce journal traite des noeuds sémantiques. Il ne se borne pas à dénoncer les procédés de désinformation, il dévoile les aimants idéologiques qui les instrumentalisent, en l'occurrence Diamant Vertueux.(le marxisme-léninisme- stalinisme)
Ce qui frappe dans le cas Onfray, est l'emprise de Diamant Vertueux à la fois dans le fond et dans la forme.
Le fond "Diamant vertueux"
Le fond, car Onfray soutient le déterminisme des forces socio-culturelles, le libre arbitre étant marginalisé, et excommunie tous ceux qui se rallient à l'hypothèse génique ou génétique, d'une influence importante de l'acquis. C'est cette hypothèse, aujourd'hui admise par la science, qui valut le goulag et la mort aux scientifiques russes. C'est l'opposition idéologique des Onfray, qui décida Jacques Monod à quitter le parti communiste.
Mais on aurait tort de penser que cette posture est sans importance, provenant d'un "philosophe" se mêlant de choses qui dépassent sa compétence. (En effet le débat scientifique entre l'acquis et l'inné, appartient aux généticiens et aux psychologues, le reste n'est que littérature pseudo-philosophique). Lorsque j'étais étudiant en psychotechnique à l'INOP, on était obligé d'être béhavioriste. Le béhaviorisme épousait les doctrines Lyssenkiennes à sa manière. On affirmait que le comportement d'un individu ne dépendait que des réponses à l'environnement. (Théorie Stimulus-Réponse). Skinner et Watson, influencés par Pavlov, niaient le libre-arbitre et la conscience, comme échappant à l'observation scientifique (dite à la deuxième personnes). Leur réductionnisme les poussaient à postuler " qu'il n'y a de scientifique que du mesurable" et que la personne n'était que le produit de son conditionnement socioculturel. "Donnez-moi un enfant et j'en ferai un criminel ou un génie" affirmait Watson.
De même que le stalinisme est mort, mais laisse des déchets toxiques, le béhaviorisme est dépassé, mais impregne encore les mentalités, après avoir exclu de la communauté scientifique les esprits les plus brillants, ou forcer des psychologues illustres comme Piaget et Osgood, à restreindre leur pensée. On dit souvent à voix basse dans les universités américaines que le béhaviorisme a quitté la psychologie, mais que ses adeptes ont rejoint la psychiatrie.
La forme : Diamant vertueux, swastika, djihad
Pour en revenir à Michel Onfray, on ne peut que constater que son expression nous ramène à l'époque stalinienne des "vipères lubriques" et qu'elle dévalorise son statut de philosophe. Il devrait savoir en effet qu'il faut tuoujours séparer avec soin les faits observables des inférences et des jugements. Il est patent que dans le récit que le Nouvel Obs a publié unilatéralement, le jugement (cerveau d'homme de droite, specimen du musée des horreurs d'une faculté de médecine) a influencé les inférences (autiste, dictateur malade entouré des sbires qui sans broncher voient agoniser leur victime, bête blessée), et a retenu des faits ce qui cadrait avec ses inférences.
Ces procédés sont communs aux régimes et aux doctrines totalitaires les plus fanatiques : le communisme pur et dur (Diamant vertueux), le nazisme et l'extrême droite (Swastika) et l'islamisme fondamentalisme (Djihad). Même mépris de l'autre, même invention fantasmatique d'un danger imaginaire (l'autre), même mauvaise foi consciente dans la manipulation des arguments et dans l'effet miroir. De ce point de vue, que l'on soit de droite ou de gauche (notions qui tendent à se dissoudre dans un flou sémantique), il faut bien reconnaître que le cas Onfray est exemplaire. S'il n'existait, il faudrait l'imaginer pour l'inclure dans un des salons imaginaires de L'Entretien. Merci Onfray !