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Friday, 29 May 2009
CHRONIQUE
REVIREMENTS
Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis, dit un adage populaire. Quelquefois, ce ne sont pas les futés qui s'adaptent, mais le cerveau le plus obtus qui se voit obligé par des circonstances généralement dramatiques, ou au contraire par des portes soudain ouvertes sur des utopies alléchantes, opportunités d'acquérir argent, pouvoir, notoriété, sexe et réaliser ses rêves de vengeance. Léon Festinger s'est rendu célèbre par sa Théorie de la Dissonance Sémantique, qui montre que les hommes ne supportent pas la concomitance d'informations contradictoires. Lorsque toute solution de conciliation a échoué, ce sont en général les croyances, les préjugés, les doctrines, qui l'emportent sur la faits. Le sujet a recours alors à bien des subterfuges. Ce n'est que lorsque le conflit engage l'individu, ce dernier réduit la dissonance en reformulant les faits pour qu'ils l'intègrent dans le modèle préconçu. ou encore est atteint de surdité sélective. Mais lorsqu'il n'est plus possible de nier le fait, on est obligé de renoncer à son modèle interne. C'est le revirement. Il est des personnalités comme Fouché, qui sont d'autant plus à l'aise dans ces métamorphoses radicales du système des valeurs, qu'ils s'en fichent.
Je vais donner des exemples de revirements d'appréciation provoqués par un romancier. C'est ce qu'on appelle un coup de théâtre. Je vais en emprunter une exemple dans Cockpit de Kosinski et relatif à la touchante et délicate amitié de Robert, le protecteur, pour le pauvre immigré. Je m'en étais ému et donné des exemples de cet amour qui se dissimule pudiquement.
J'ai toujours rêvé d'un amour aussi exclusif et profond et j'ai été touché par celui, infini, que je porte à Olaf Olafson et l'autre à Socrate. J'ai été également désorienté et perturbé par le jeune homme qui alterne affection et générosité d'autant plus rares qu'il est glacial, et le mépris le plus humiliant, lorsqu'il ne daigne même pas de prendre de mes nouvelles alors que je vis des moments dramatiques.
LE CAS ROBERT
Robert, à l'improviste, change de comportement envers Kosinski. Il est animé par une idée fixe qui faillit réussir : il veut absolument lui trancher la gorge. Enquête faîte, on apprend qu'il souffre de schizophrénie et qu'il a fait de fréquents séjours dans des hôpitaux psychiatrique. Le coup de théatre nous est ménagé avec un art consommé du suspense. Et s'il se passait quelque chose du même ordre sur le jeune homme ? Une personnalité schizoïde et légèrement autiste? Comme expliquer autrement ses alternances d'affection profonde et de parfaite indifférence?
LE CAS DU PACKAGE CULTUREL
J'ai reçu des e-mails de félicitations de jeunes qui ont appliqué à la lettre mes recommandations, et qui dégustent dans l'ordre chronologique toutes les sonates de Beethoven. Mais je me suis avisé qu'il y a bien d'autres voies, et qu'on peut aménager celle que je vous ai proposé. Voici les nouvelles recommandations sur l'écoute des sonates de piano de Beethoven. Ecoutez les deux sonates en Fa majeur qui pétillent d'esprit et de charme. Passer à la Pathétique, la "Clair de lune", la "Tempête" , l'Appassionata, l'Aurore, le départ, l'absence et le retour, et l'Op.101, l'Op. 110 toutes par Wilhelm Kempf, ainsi que son DVD impressionnant de l'Op.106 où il explique la sonate en un français rocailleux mais très clair. La terrifiante sonate op 106 est à son apogée dans un concert public donné au Carnegie Hall en 1955. 1955. L'op. 111 est une spécialité de Backhaus, à acheter absolument. Un livre d'accompagnement est celui de Brigitte et Jean Massin. Evitez absolument de telécharger, c'est bon pour la musique de consommation. Achetez des CD qui ont généralement des notices succinctes mais bien faites.
Sunday, 24 May 2009
CHRONIQUE
PINBALL (suite)
La manipulation a apparemment réussi car mon précédent billet est passé sur le Web. Continuons donc notre exploration de "Pinball" de Kosinski et avec elle la liste de mes interrogations.
2. Une des héroïnes du récit, une noire splendide et sexi, dont on ne nous épargne aucune des fantaisies les plus intimes, avec ou sans gadgets sexuels, est aussi une étudiante très sérieuse spécialisée dans la musique de Chopin. Elle est admise à un de ces concours fort nombreux dont un précédent célèbre est dû à la maîtresse de Ravel, Marguerite Long, une affreuse bonne femme, vénale et minaudière qui faisait payer à prix d'or son soutien au concours qu'elle avait créée avec Jacques Thibaud, un violoniste justement célèbre.
Elle procédait de la manière suivante : elle filtrait les candidats au moment des préparatoires, profitant du fait que les célébrités du jury étaient absentes, pour en rejeter les meilleurs, (sauf ses chouchous) et les pires. Au moment du concours final, les membres prestigieux du jury avaient de ce fait le choix entre les chouchous et les médiocres, et le tour était joué.
Le concours de la Reine Elisabeth de Belgique. révéla en Julius Katchen qui en fut le glorieux vainqueur ,un pianiste hors pair qui fut récompensé par une édition discographique des sonates de Beethoven, et surtout les variations sur un thème de Diabelli, particulièrement ardues, et l'intégrale enregistrée de la musique de piano de Brahms. Dès notre première rencontre, ménagée par un admirateur, le jeune et séduisant docteur Simmenauer, violoncelliste à ses heures perdues, je me brouillai violemment avec Katchen. Grisé par son succès, (il parlait tout le temps de son intimité avec la reine Elisabeth, et je croyais naïvement que c'était la Reine de Grande Bretagne, alors que c'était celle de Belgique qui le protégeait) il se permit d'affirmer que Beethoven n'aurait jamais dû composer la fugue de l'Op. 106, que la Wanderer Phantasie qui était un de ses succès médiatique, ne valait pas tripette et que les Variations sur un thème de Diabelli, il les avait apprises en deux semaines. Elles furent prêtes lorsqu'il fut capable de les jouer tout en lisant à haute voix le journal. Ses Diabelli reléguèrent dans l'ombre le disque de Wilhelm Backhaus, dont une vie de concentration et de méditation permit une interprétation magistrale.
Bernard Gavoty, (alias Clarendon,le critique tout-puissant du Figaro) et ses émules, écrivirent que Wilhelm Backhaus jouait comme un maître d'école. Ulcéré, le plus grand interprète des trois grands B, jura de ne plus donner un concert à Paris.
Il tint sa promesse sauf lorsqu'à l'occasion d'une tournée mondiale de Karl Böhm, il dût nécessairement honorer son contrat. Il est certain que le "Maître d'école" avait une vie terne et hygiénique (je le connus à la clinique Bircher Benner à Zürich, patrie du "Bircher müssli" spécialisée dans la diététique. Elle comptait à ce moment comme hôte, Sir Stafford Cripps, le chancelier de l'Echiquier). En revanche, Julius Katchen était homosexuel et ne le cachait nullement, et il est vraisemblable que pour luii la sexualité devait lui infuser passion, et énergie vitale.
On comprendra ma réaction en songeant à mon âge : vingt ans et à ma formation musicale dans la plus rigoureuse tradition allemande. Mon professeur, Berthe Lapp, était organiste à la cathédrale de Strasbourg. Elève de Hans Pfitzner et d'un célèbre pianiste russe dont je ne sus jamais orthographier le nom, qu'elle prononçait Lutschke, madame Lapp dût abandonner sa carrière lorsqu'elle se maria avec un banquier, vice-président de la BNCI,depuis UBP, Robert Lapp. Il avait peur en effet qu'à la suite de la carrière de son épouse, on découvreon nom : Berthe Levy. Etant donné l'antisémitisme dominant, il la cacha en quelque sorte. Elle en fut très malheureuse, et elle allait souvent répéter Salle Gaveau où on louait à l'heure des studios avec piano. N'ayant pas de piano, je dépensais mes maigres économies dans une location d'une heure de studio, dont je me faisais régulièrement chasser. J'entendis un jour provenant du studio contigu, des sons émouvants, exaltants. Assis par terre à la porte du studio magique, je fus surpris par une grosse femme au cheveux gris, au visage rougeaud et quelque peu porcin et aux toutes petites mains rouges et potelées. Elle me demanda de lui jouer quelque chose, et je massacrai l'adagio de la Sonate au Clair de Lune. Elle fut scandalisée et me proposa de me donner des leçons de piano.
- Je n'ai pas d'argent pour vous payer, madame,dis-je tout honteux.
- Qu'à cela ne tienne, je sens que vous avez l'étoffe d'un grand concertiste et je m'occuperai de vous à une condition : vous suivrez ponctuellement mes instructions, et vous jouerez chez moi.
Elle habitait rue Cognac-Jay dans un appartement très bourgeois mais équipé d'un magnifique demi-queue, un Steinway de New-York dont les basses sonnaient comme des cloches, et les aiguës comme des rires cristallins. J'étais confondu d'admiration. Monsieur Lapp fit la connaissance de mon père, impressionné par sa situation, et nous primes l'habitude de prendre tous les dimanches le thé chez Angelina, rue de Rivoli. Je m'ennuyais mortellement, car en dehors de la musique et de la littérature allemande, madame Lapp ne s'intéressait qu'au spiritisme.
Elle nous raconta un jour tout à fait sérieusement, qu'il est très dangereux de se transformer en chat pour me glisser chez mes ennemis, car je risquais de ne pas pouvoir reprendre ma forme humaine.
Mais au piano, elle me fit faire des progrès stupéfiants. M.Lapp obtint de mon père qu'il m'achetât un Steinway ou au moins qu'il me louât un piano décent. Ce fut cette dernière solution que choisit mon radin de père, et je jouai pendant des heures sur des casseroles infectes dont il fallait changer les cordes toutes les semaines, et le marteaux qui cassaient en fin de course, tous les mois.
Bruno Siebert, le directeur du Grand Hôtel, ou nous résidâmes pendant dix sept ans, avait mis gratuitement à ma disposition une très jolie salle insonorisée, et c'est là que Kirsten Flagstad, Martha Mödl et d'autres célébrités jouèrent.
Je fus élevé dans un rigueur extrême, n'abordant une sonate de Beethoven, qu'une fois la précédente assimilée. Mon répertoire finit par être bien que très réduit,car j'étais un très mauvais déchiffreur, concentré autour d'oeuvres majeures comme les Préludes et Fugues de J.S.Bach, les 24 Préludes de Chopin, les Variations Goldberg de Bach et surtout les Kreisleriana de Schumann. Je dus hélas renoncer à la carrière de concertiste, à cause d'une infirmité que je partageais avec Alfred Cortot : le trac! Cortot compensa en se droguant à mort, mais je refusai une telle extrémité, et je jouai tout seul pour moi même et un petit groupe de protecteurs. Vous comprenez pourquoi, élevé dans le respect sacré des grands génies, je ne me serais jamais permis de porter un jugement négatif sur eux. Cette austérité, qui était celle de la culture allemande au plus haut niveau était aux antipodes de la débauche sexuelle décrite par Kosinski. `
CHRONIQUE
Sexe et musique
Vous l'avez sans doute deviné. Ce billet, s'il vous parvient aborde les interrogations que soulève PINBALL l'ouvrage de Jerzy Kosinski. Il convient pour décoder ce livre fleuve et pourtant concis, de se reporter au climat des Années soixante, vues par un américain. Comme je crois vous l'avoir dit dans un précédent billet, j'ai providentiellement trouvé au marché de Deauville un livre de photos répondant exactement à ce dont j'avais besoin et que j'ai emporté pour dix euros. En voici les coordonnées : The Hulton Getty Picture Collecion. 1960s. Nick Yapp. Könemann, Köln 1998.
Voici donc une liste non limitative de mes doutes
1. Comment est-il possible que le sexe le plus effréné, le plus perverti et le plus dévorant aille de pair avec la composition d'une grande oeuvre?
Et à un moindre niveau d'un interprète de rang mondial. J'ai connu Pierre Boulez et Henri Dutilleux et la seule passion dévorante que je décelai en eux, était la composition musicale, la responsabilité qu'ils savaient endosser pour les générations qui suivraient. Certes, des zones d'ombres existent forcément pour ces génies mais elles restent dans les limites de la vie privée qui n'admet, pour eux comme pour vous aucune intrusion. Parmi les interprètes, je connais la vie rangée de Backhaus pour qui sa femme et son tabouret de piano, le suivent constamment. Ou encore de l'union orageuse entre Horowitz et sa femme, la fille de Toscanini. J'ai connu aussi Kirsten Flagstad et l'amour immense et dévoué qu'elle portait à son mari au point de risquer sa vie pour lui. Matha Mödl, elle, la plus grande Kundry de l'Après-guerre, ne rêvait qu'à une seule chose : gagner assez d'argent pour s'acheter une jolie maison tranquille pour elle et sa famille, tout ce qu'il y a de petit bourgeois. Je pourrais continuer longtemps cette litanie. Il est certain que Wilhelm Kempff, ou Karl Böhm connus pour leur avarice, et très intégrés dans le milieu musical allemand, n'avaient rien d'une star. C'était tout simplement des "meister" des maîtres respectés pour leur intégrité morale et artistique.
En revanche je réserve mon opinion pour des artistes à la mode, où adulés par les média Comme des météores fulgurants les Van Cliburn, les Byron Janis, autres gloires éphémères, envahirent le firmament des stars. D'autres, plus intelligents et dotés d'un grand talent durèrent longtemps et leur célébrité médiatique s'accrut avec l'écoulement du temps. Je songe à Léonard Bernstein, à Pavarotti, autrefois la Callas, vivant antithèse de la Tebaldi, dont la vie familiale était irréprochable. Il est tout à fait possible que la sexualité joue un rôle important chez ces divas.
Là où en revanche Kosinski tombe juste et frappe fort, c'est dans les milieu du pop, du rock ou de la musique électronique qu'il faut chercher le sexe roi. L'erreur provient tout simplement d'une confusion des genres. La thèse de Kosinski est de comparer la sophistication et la maîtrise du synthétiseur, l'évolution des combinaisons sonores inédites permises et quelquefois concoctées par la cuisine disco, avec celle d'un Stockhausen ou d'un Strawinsky convoqués en renfort et en référence.
Saturday, 9 May 2009
CHRONIQUE
Traduttore traditore
Qui ne connaît cet adage italien : traducteur = traître ?
Il est très difficile de trouver un équivalent exact à une oeuvre poétique ou littéraire, surtout lorsque les langues respectives sont l'anglais et le français par exemple. Que l'on songe aux transpositions plus ou moins fidèles de Shakespeare, aux mots et expressions intraduisibles faisant bon marché du contexte. En revanche la traduction de Faust II par exemple est relativement aisée si l'on suit le mot à mot, ce qui n'est guère le cas de bien des traductions qui sous prétexte de reconstituer le génie poétique du chef d'oeuvre, osent d'infâmes inventions. On se souvient à ce propos des absurdités de la traduction de "Don Giovanni ! " en " Voici l'heure !" ou encore "Don Jua-nan !" dans l'opéra éponyme de Mozart, alors qu'on aurait pu se contenter de faire chanter en italien cette impressionnante interpellation ! C'est d'ailleurs la raison de l'abandon des opéras traduits au profit des versions originales avec sur-titres. Le défi est évidemment encore plus difficile lorsque la langue écrite est étrangère aux règles de la langue traduite, par exemple les idéogrammes chinois et japonais. En revanche la différence est pratiquement nulle, lorsque la sémantique est identique pour toute la planète, et que la langue doit s'y conformer de force, en créant s'il le faut des néologismes.
C'est le cas des langues-outils comme la comptabilité, la finance, la science et la médecine ou l'informatique. Le cas de la transposition d'un texte littéraire en une version filmée est le cas le pire qu'on puisse rencontrer. Le cinéma a ses règles qui sont différentes de la lecture. Il doit reconstituer la subtilité d'une intrigue peaufinée, à savourer lentement en voyageant au besoin dans la phrase en images frappantes, condensées, destinées à faire appel aussi bien au son et à l'image qu'à ce qui ne devient qu'un scénario. Le cas est bien entendu différent dans une représentation théâtrale car, si le jeu des acteurs, leur personnalité, le décor et l'acoustique de la salle, altère le contexte, néanmoins l'intégralité du texte est préservée. On ne fait qu'à y ajouter des informations et des dimensions supplémentaires. Il y a des cas où le point de vue du cinéaste diffère de celui de l'auteur du scénario, par exemple "le Nom de la Rose", où le scepticisme de Umberto Eco, heurte l'optimisme de Annaud, comme celui-ci s'en explique dans le bonus du DVD. La fidélité est en revanche maximum lorsque auteur et cinéaste sont un seule et même personne. Le cas du film "being there" de Kosinski également l'auteur du roman, est exemplaire. D'autres transpositions sont particulièrement réussies comme celles de Boileau-Narcéjac dans "les diaboliques" (Clouzot) et "sueurs froides" alias "Vertigo" (Hitchcock).
Cela nous amène à la comparaison du "Club Dumas" de Arturo Pérez-Reverte et du film qui en est tiré "La neuvième porte". En dépit de la réussite de Polanski, les modifications apportées à l'intrigue sont telles qu'on peut parler de falsification. Et si certaines licences se justifient par les nécessités cinématographiques et ne font qu'appauvrir le roman, d'autres n'ont d'autres raisons d'être que d'introduire des images et des séquences inventées de toutes pièces dans des buts commerciaux. La recherche de spectaculaire dénature complètement le sens du livre. Je relèverai ici de mémoire des déviations grossières.
LE FILM : l'histoire du club Dumas et celle des neufs portes sont liées. Le club Dumas est une secte occulte comme celle de "Eyes Wide Shut" de Kubrick et se livre sous nos yeux à des messes noires démoniaques, où l'auteur des crimes fait irruption et déclame sa volonté de commercer avec le diable.
LE LIVRE : Le Club Dumas est une association bien innocente des admirateurs du romancier, qui se réunit tous les ans dans la demeure de la fanatique femme du premier mort, mais étrangère à sa pendaison comme aux autres morts. Son but est de s'emparer du manuscrit d'un chapitre des "trois mousquetaires" les autres étant confié aux mains de chaque membre de l'association. Le pendu a libéré une place et grâce au manuscrit apporté en don à l'association elle espère d'être acceptée comme 64ème membre. mais la tenue est inférieure à celle d'un Hitchcock ou d'un Kubrick. La découverte de l'indépendance entre le club Dumas et la recherche du livre magique, est un clou de l'intrigue et permet de mener à la conclusion, qu'il y a forcément deux manipulateurs distincts derrière les évènements.
LE FILM : La femme aux yeux verts est une sorcière jouée par Emmanuelle Seigner. C'est elle qui, au delà de la neuvième porte, environnée de flammes et d'une clarté insoutenable, se livre tout nue à une danse érotique de possession, sous les yeux d'un Johnny Depp médusé.
LE LIVRE : Le coup de théâtre supprimé par Polanski : on découvre que cette interprétation est fausse. La prétendue sorcière n'est qu'une jeune fille (comme on l'appelle dans le livre) très courageuse, pleine de pudeur, et capable d'une infinie douceur. A la fin, elle est simplement amoureuse de Corso et cela finit sur une scène de tendresse, certes moins spectaculaire que la danse érotique, mais combien plus émouvante.
LE FILM : Le nécromancien s'entoure d'un cercle de feu, pour prouver que les flammes ne le brûlent pas. Au début tout ce passe comme prévu et il pousse des cris de triomphe, bientôt mués en hurlements de douleur lorsque il découvre - trop tard que ce n'est pas le cas, et il finit comme Don Juan, entraîné en enfer. En effet le sortilège des neufs bois gravés était de la fantasmagorie issue de la superstition.
LE LIVRE. Si le nécromancien meurt c'est parce que les neuf bois étaient incomplets. Le neuvième était un faux réalisé par les restaurateurs espagnol d'après une reproduction prise dans une publication. C'est une autre surprise éludée par Polanski.
CONCLUSION : j'ai relu mes appréciations enthousiastes du film. C'est que je n'avais pas relu alors, le livre original de Arturo Pérez-Reverte que j'avais oublié. Ce qui montre que l'admiration peut avoir comme source l'ignorance. Il reste que le DVD est passionnant, les acteurs collent aux personnages, et la mise en scène particulièrement efficace. Mérite plusieurs visions répétées. Voyez le film, lisez le livre après coup sans vous laisser décourager par l'abondance de références relatives au métier de marchand de livres anciens.
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