CHRONIQUE
CLÉS
Je viens de recevoir des e-mails d'internautes satisfaits par ma nouvelle mouture du package culturel, mais l'ancienne préconisation, plus exigeante et par petits pas, est appréciée également. Ce qui est réclamé en revanche c'est un minimum de soutien pédagogique de ma part, des clés qui ouvrent sur la première marche de l'initiation. J'y souscris bien volontiers et je m'y consacrerai dans ce billet.
BONHEUR
Hier, Olaf Olafson a demandé à T*** de m'amèner chez Hermès à Deauville et qu'on m'habille de pied en cap. J'étais à la fois tout heureux de me voir aussi élégant, mais gêné de recevoir de tels cadeaux, si peu mérités. Moi-même, de l'état de moineau déplumé, je suis passé à celui de paon vaniteux. Je me suis surpris à me regarder avec complaisance dans le miroir !
Ce matin, il m'a téléphoné de je ne sais où pour avoir des nouvelles de ma santé qui le préoccupe vraiment. Il a s'est montré d'une telle tendresse, d'une telle sollicitude, d'une telle générosité que, comme d'habitude j'ai senti mon coeur fondre, mon âme débordant de gratitude, et remerciant le Seigneur de m'avoir donné comme compensation à mes souffrances physiques, le support moral d'êtres d'élite que j'aime et que je respecte.
On me disait de toutes parts : tu as tort de lui faire autant confiance puisqu'il te lâchera tôt ou tard, et tu souffrira doublement. Effectivement, je me suis trompé bien des fois, et je ne connais Oleg, Socrate et LH III depuis à peine deux ans. Mais cela est plus fort que moi, je crois en eux, en leur sincérité quand ils ont signé les quatre covenants (ce qui n'est pas le cas de LH III) : confiance absolue, respect absolu, ponctualité, et éternité; Je pense à Socrate et à Olaf.
Mais le plus touchant de tous est Olaf. Je ne crois pas qu'une telle amitié, entre deux hommes que tout sépare soit quelque chose de courant. Je crois que c'est - pour moi, en tout cas - un miracle d'amitié, plus encore que de l'amitié, un don complet sans compromission qui engage tout l'être. Ce n'est pas un excès de sentimentalité qui me fait parler mais un besoin d'exprimer mon admiration et mon affection, renforcés de part et d'autre par la certitude que jamais elle ne s'affaiblira avec le temps, et qu'elle se prolongera après ma mort par ce que je lui aurai légué et par ma dépouille mortelle dans le village de ses aïeux.
CODE
Ci-dessous, comme promis, voici quelques clés pour faciliter l'entrée dans la grande musique dite classique.
L'Occident s'est distingué par un développement prodigieux de la polyphonie. On entend par là l'art de superposer plusieurs mélodies selon des règles très strictes, celles dites du contrepoint (point contre point, note contre note). On pourrait ainsi comparer un morceau de musique polyphonique à une grille de mots croisés, les lignes figurant les mélodies, les colonnes au résultat de leur superposition : les accords. Le grand maître de la polyphonie a été Jean Sebastien Bach
Pour la suite des explications, allez dans le corps du billet (continuer à lire).
QUELQUES CLÉS POUR COMPRENDRE LA MUSIQUE CLASSIQUE OCCIDENTALE
On l'appelait "grande musique" par opposition à la "musique de variétés" : chanson, ou opérette". Aujourd'hui celle-ci fait figure de forme artistique par rapport à ce qu'on peut nommer la climatisation musicale. Si l'on prend comme critères de noblesse, les facteurs de complexité ou intégration (nombre et nécessité de chaque élément en fonction du tout) de novation, de qualité d'exécution, il nous faut, comme le pense Kosinski dans Pinball, considerer le très bon jazz et la musique synthétique, comme "musique sérieuse" à part entière, avec ses difficultés d'accès en dépit de son caractère Pop.
Il est difficile de juger, cependant il apparaît que la musique dite classique, est constitué par un massif unique et compact d'où émergent de grands pics : Bach-Beethoven- Wagner-Debussy-Mahler-Schoenberg, Webern, hérissés de monts isolés. Contrairement aux génies que je viens de mentionner, leur absence n'aurait pas autant changé le cours de la musique, mais musicalement ils ne sont pas inférieurs des pics principaux : j'entends Mozart et Chopin.
Entre ces pics, nous avons de très hautes montagnes assurant transitions et liaisons : Haendel admiré par Beethoven, Haydn, le papa de l'école classique, Schumann le plus authentique des romantiques, Brahms, qui incarne le post-romantisme classique, et le roi de la variation,Liszt, le génie le plus novateur, Berg, le troisième de l'école de Vienne : Schoenberg- Webern (l'équivalent de la triade cubiste Picasso, Braque - Juan Gris), Strawinsky le Protée multiforme.
A côté de la chaîne principale que nous venons de décrire sommairement, selon des critères éminemment subjectifs, on trouve ce que l'on appelle les écoles nationales : Sibélius pour la Finlande, Grieg pour la Norvège, Dorak pour l'Europe Centrale, De Falla pour l'Espagne,le grand opéra et le bel canto dominés par Verdi et Puccini, pour l'Italie, Gershwin pour l'Amérique, Purcell et Britten pour la Grande Bretagne, Tchaïkowsky, Mussorgsky, Prokofiev, Scriabin, pour la Russie...
LES FORMES CLASSIQUES
LA FUGUE
C'est une forme très élaborée, dans laquelle les règles qui régissent les colonnes sont très strictes. Généralement elles sont composées de deux mélodies : le sujet dominant, le contre-sujet, mélodie antagoniste et moins importante. La fugue est un jeu de mots croisé de deux, trois, quatre lignes (figure la plus courante) voire six. On les appelle des voix. Par exemple un quatuor à cordes utilisera la forme à quatre voix de même que le modèle du genre "L'Art de la Fugue". Ecoutez l'Art de la Fugue oeuvre ultime de J.S.Bach, dans sa version transcendante de Hermann Scherchen (évitez le autres !) un des plus grands CD jamais édités. Au bout de quatre auditions, vous saurez ce qu'est une fugue !
LE THEME ET VARIATIONS
L'artiste montre son habileté à tirer le maximum d'un morceau donné, en général assez court et l'imagination et la variété contrastant avec la simplicité du modèle de base. C'est comme un corps nu que l'on transforme par une multitude de vêtements. Bach a composé le modèle insurpassable du genre avec les "Variations Goldberg" (achetez-les au clavecin par Georges Malcolm,au piano, par le Claudio Arrau d'avant guerre. Beethoven a essayé de l'égaler avec les Variations sur un thème (hyperbanal) de son éditeur Diabelli. Acheter par Wilhelm Backhaus) Brahms a suivi avec les ariations sur un thème de Paganini et sur un thème de Haendel. (Plusieurs bonnes versions disponibles, entre autres Katchen).
LE RONDO
C'est une forme éminemment populaire consistant en un thème ou refrain revenant sans cesse et séparé par un "remplissage". ABACADAEA etc. Si vous achetez le DVD de Wilhelm Kempff où il explique et joue l'austère op.I06, vous écouterez avec délices le rondo de Beethoven qui sert de hord d'oeuvre. Un miracle de finesse et de grâce dans la légèreté.
LE LIED
C'est un mouvement lent, méditatif ou triste, chantant, que l'on trouve dans la chanson classique allemande. Les rois du lied furent Schubert (le Roi des Aulnes, le voyage d'hiver) la référence étant Hans Hotter. Mais aussi Schumann, Brahms, Hugo Wolf (connu uniquement par ses lieder). "Les cinq derniers lieder" peuvent être considérés comme le chant du cygne de Richard Strauss, que j'ai oublié de citer parmi les écoles nationales, ici autrichienne et quelque peu surévalué en Autriche et en Allemagne.
LE POEME MUSICAL
C'est une forme romantique ou post romantique, illustrée par Liszt, Berlioz (un autre oublié, gloire de l'école française avec Ravel), par Schumann et Mahler. Il raconte une histoire mise en musique, avec des thèmes représentant les different personnages. La traduction du poème en ballet a donné naissance à des chefs d'oeuvre, comme Le Casse Noisettes, (Tchaikowsky) ou Roméo et Juliette (Prokofiev).
LA FORME SONATE
Ce fut la plus grande conquête de la musique classique, raffinée progressivement et stabilisée par le père de la Symphonie : Joseph Haydn.`
Une précision s'impose auparavant .
La Sonate est une forme qui transcende la spécificité musicale. Une Sonate, peut être jouée pour piano,ou pour violon, mais cela va au delà.
Un trio, un quatuor ... un octuor, un concerto, sont des sonates. Si une symphonie pour orchestre n'est pas une sonate, on l'appelle : mouvement symphonique.
UNE SYMPHONIE EST UNE SONATE POUR ORCHESTRE
La sophistication polyphonique s'épuisait. L'accent porté sur l'écriture verticale, se faisait au détriment du raffinement horizontal, elle ne permettait pas une longue durée des lignes horizontale ni un plan d'ensemble s'étendant sur des laps de temps importants. La création de la Sonate se fit en même temps qu'un allègement de la polyphonie. Au mieux deux mélodies en contrepoint flottaient sur une soupe harmonique.
Les principes structurels de la sonate sont :
La prréminence de la dialectique. Deux thèmes s'opposent, se combattent, s'allient : le thème principal, le deuxième qui l'équilibre.
L'importance de la structure tonale. Les tonalités sont le système de référence des mélodies et sont fixés dans le Clavier Bien Tempéré, où Bach prouve qu'on peut composer dans toutes les tonalités, dont la base est la gamme. Les deux modes sont majeur (gai, masculin) et mineur (triste). Le passage d'une tonalité à l'autre est une modulation, et cette transition joue un rôle essentiel dans la sonate.Une mélodie peut en effet être transposée dans une gamme cinq notes au dessus,(passage à la dominante) ou quatre notes (passage à la sous dominante).
Le plan des tonalités est le suivant :
EXPOSITION : Tonalité originale (par exemple do majeur) exposant le thème A en majeur et le thème antagoniste dans le mode opposé. CODA ou fin de l'exposition) qui module à la dominante (Sol majeur).
Une coda, ou troisième thème court, consolide cette tonalité.
LE DEVELOPPEMENT : Le thème antagoniste est développé de même que la coda, et la musique module sans cesse pour se retrouver en sous-dominante (Fa majeur)
LA REEXPOSITION : Le thème module de sous dominante à la tonalité originale. Alors que dans l'exposition le schéma était : premier thème tonalité originale, deuxième thème, dominante, dans la réexposition, les deux thèmes sont tous deux dans la tonalité originale, toute tension est apaisée.
LA CONCLUSION : C'est une coda développée qui affirme triomphalement la tonalité de départ (celle du premier thème) qui donne son titre à l asonate. (Par exemple sonate en do majeur, signifie que le premier thème est en do majeur).
Autre caractéristique de la forme Sonate : elle est construite comme un drame à trois ou, où quatre actes ou encore, un roman divisé en trois ou quatre chapitres.
On les appelle des MOUVEMENTS. Les sonates à deux ou cinq mouvements sont rares La célèbre sonate-testament n'avait que deux mouvements. Anton Schindler le rigide factotum de Beethoven lui demanda pourquoi il avait omis le troisième mouvement. Le maître répondit négligemment : ah, c'est exact, j'ai dû oublier ! Comme le cuistre insistait, il lui dit qu'il n'avait pas eu le temps de l'achever. Ce fut évidemment pour des raisons structurelles et dramatiques que Beethoven simplifia la dialectique.
Les chapitres sont soigneusement codifiés.
Le premier mouvement est rapide et animé,
Le second mouvement introduit une pause mélancolique ou sentimentale, c'est un lied, adagio ou largo.
Le troisième mouvement issu du menuet radicalise la forme ABA, A étant un condensé du thème 1, B ou trio, condensant le thème 2. Beethoven conéra un caractère fantasque ou obsédant au menuet, qui devint un SCHERZO ( une plaisanterie, en italien).
Le dernier mouvement supprime la dialectique pour faire dominer le thème A. Les formes obligées sont dés lors le rondo, le thème et variation et la fugue. On l'a compris, la forme sonate est un jeu d'une extrême complexité, longuement illustré et évolutif dans sa permanence. Le mieux pour s'en familiariser est de disposer d'une carte géographique, consacrée dans les moindre détails à une sonate particulière. Si cela vous intéresse, faîtes le savoir, je la chargerai sur un prochain billet. Bruno Lussato 30 Mai 2009 5h20 du matin.