CHRONIQUE
L'HOMME À LA BULLE
C'est moi et la bulle est mon blog.
En effet lorsque je rédige mon billet, ce qui est actuellement mon cas, le monde extérieur disparait, les conversations que l'on tient autour de moi semblent un murmure lointain, mon cerveau est en contact avec vous et exclut toute autre information. Pour les gens qui m'entourent cela est d'autant plus frustrant qu'ils ont l'impression injustifiée que je me terre dans cet univers intérieur quatre à six heures par jour. Or les 90% de ce temps est employé à me battre avec mon Apple pour le faire fonctionner à peu près correctement.
NOTE : L'apple a arrété de fonctionner depuis trois jours.
Le complaisant et hyper compétent Marc Guilhery m'a donné la recette pour envoyer les emails alors que je ne pouvais que les recevoir. Après application de son très compliqué mode d'emploi, je ne puis à présent ni les envoyer ni les recevoir ! C'est catastrophique car je dois accomplir toutes sortes de formalités pour mon voyage en Russie dans moins de dix jours. C'est de tels cas que l'on prend conscience de l'état de dépendance où nous a subrepticement mis le système télématique (faisant appel à un réseau collectif pour avoir accès à vos données personnelles). C'est pour cette raison que j'ai fait imprimer tous mes billets jusqu'au mois de Juillet. Aujourd'hui pour la première fois mon blog est à nouveau accessible. Hier j'ai gaspillé tout mon dimanche à essayer, en vain, de communiquer avec vous.
LA BULLE, MOI, ET LES AUTRES
Ce que j'entends par bulle est un état prolongé de concentration sur un sujet bien déterminé, correspondant à un rêve persistant et cohérent. Ce rêve peut être une simple rèverie, une obsession de vengeance ou de gloire, de récit fantaisiste qu'on se conte à soi-même, ce qu'on nomme l'imagination diffluente. Mais ce peut être un travail en cours, tendu vers un projet concrêt et destiné à apporter sa pierre dans la collectivité. Wagner ressasant pendant sept ans les matériaux du Ring sans que rien n'y transparaisse, les multiples remaniements de Faust, les esquisses inlassablement répétées de Léonard, les questions non résolues que se posent Darwin, Einstein ou Bernardo Trujillo, le théoricien de la grande distribution.
Je n'ai cité que des noms célèbres, des êtres arrivés au sommet de la gloire, mais tout être animé par un projet créateur fort, et déterminé à lui donner vie, de le faire accoucher et non avorter, se renferme dans un état second, proche du somnambulisme qui nous coupe des autres et nous donne la réputation d'être un esprit chagrin et asocial. Il est certain que les choses ne sont pas si simples et que bien des créateurs sont en même temps socialement adaptés et capales de s'extraire de cet état. Proust, Oscar Wilde, Chopin lui-même étaient intégrés à leur environnement. Pierre Boulez entretenait des liens très étroits de bien des personnalités politiques.
Je dois reconnaître que malheureusement je vis presque exclusivement dans cet état de concentration excluant le milieu extérieur, même si son objet est très varié. D'en d'autras termes, on me reproche d'être "trop sérieux" et cela explique certainement la difficulté de me trouver une épouse (je me suis marié à 43 ans !) voire même des amis. Les deux qui me sont fidèles Olaf et Socrate, me voient à petite dose.
Marina hier soir trouva dans ce trait de caractère la raison de l'abandon d'Axel Poliakoff. Voici un jeune homme, hédoniste, aimant s'habiller, conduire de belles voitures, fréquentant la jeunesse dorée, face à un vieillard malade, sans fortune, sans avenir, l'accablant de son affection encombrante et malade d'anxiété dès que son petit fils adoptif fait preuve d'indifférence ou pis encore, de mépris courtois. Il suffit que quelques amis bien intentionnés le calomnient pour se donner un pretexte à rupture.
Je me souviens à ce propos, qu'en pleine violence contestataire de Mai 68, je fus toujours respecté par les plus barbares des révoltés. Jamais personne n'aurait porté la main sur moi. On me dit souvent que j'étais comme protégé par un mur de glace.
Sans doute l'enveloppe transparente de la bulle.
Commentaires